Le salarié protégé peut obtenir une indemnisation au titre de son licenciement pour inaptitude malgré l’autorisation de licencier délivrée par l’administration
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Procédure de licenciement du salarié protégé : rappel
Certains salariés et notamment les représentants du personnel bénéficient d’un statut protecteur.
Cette protection concerne les mesures de ruptures du contrat de travail que pourraient prendre unilatéralement l’employeur (licenciement) ou les mesures de ruptures de contrat résultant de l’accord des deux parties (rupture conventionnelle) ou encore des éventuelles modifications que l’employeur voudrait apporter au contrat de travail du salarié.
Lorsque l’employeur décide de licencier un salarié protégé, il doit, préalablement à la notification du licenciement, demander l’autorisation à l’inspecteur du travail. Ce dernier peut autoriser ou refuser la mesure de licenciement. Pour se faire, l’inspecteur du travail va rechercher si la procédure a été sur la forme respectée mais aussi si la mesure de licenciement n’est pas prise en considération du mandat représentatif du salarié (et donc discriminatoire).
Dans le cas d’un projet de licenciement pour inaptitude, l’inspecteur du travail doit vérifier que l’inaptitude est réelle et justifie bien la mesure de licenciement. Pour autant, il n’a pas à rechercher la cause de l’inaptitude. En effet, le principe de séparation des pouvoirs judiciaire et administratif ne permet pas à l’inspecteur du travail (pouvoir administratif) de rechercher la cause de l’inaptitude.
Cependant, que peut faire le salarié protégé licencié pour inaptitude sur autorisation de l’administration lorsqu’il estime que cette inaptitude est liée au non-respect par l’employeur de son obligation de sécurité ? Le salarié peut-il obtenir un dédommagement ou l’autorisation de l’inspecteur du travail empêche toute action ?
Indemnisation du salarié protégé au titre de son inaptitude résultant des manquements de l’employeur
La décision de l'inspecteur du travail d’autoriser le licenciement du salarié protégé ne fait pas obstacle à ce que ce dernier fasse valoir devant les juridictions compétentes les droits résultants de l'origine de l'inaptitude lorsqu'il l'attribue à un manquement de l'employeur.
En effet, dans cette affaire un salarié, assistant comptable, bénéficie d’un statut protecteur en considération de sa fonction de conseiller du salarié et de candidat aux élections professionnelles. Victime d’une violente altercation avec un collège, il est déclaré inapte par le médecin du travail quelques temps plus tard. Le salarié introduit une action en résiliation judiciaire de son contrat de travail pour faire dire le contrat de travail rompu aux torts de l’employeur du fait de ses manquements à son obligation de sécurité. Concomitamment, l’employeur, qui obtient l’autorisation de l’inspecteur du travail, licencie le salarié pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement. Le salarié conteste cette mesure de licenciement devant le conseil de prud’hommes.
Si plusieurs chefs étaient avancés, on retiendra principalement que le salarié demandait une indemnisation au titre de son licenciement, pourtant autorisé par l'administration du travail, en considérant que celui-ci résultait d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
La cour d’appel estime que le conseil des prud’hommes n’était pas compétent pour statuer sur la demande de dommages et intérêts introduite par le salarié en raison de la rupture abusive de son contrat compte tenu des manquements de l’employeur à son obligation de sécurité.
La Cour de cassation n’est pas du même avis. En effet, selon les hauts magistrats, le conseil des prud’hommes était tout à fait compétent pour statuer sur la demande du salarié d’obtenir des dommages et intérêts en raison de l'existence de manquements de l’employeur à son obligation de sécurité ayant conduit à l’inaptitude.
L’autorisation de licencier délivrée par l’inspecteur du travail ne pouvait pas faire obstacle à la saisine par le salarié du conseil de prud’hommes afin de faire respecter ses droits résultants de l’origine de l’inaptitude.
Ainsi, si l’origine de l’inaptitude se trouve bien dans le non-respect de l’employeur à son obligation de sécurité, il appartient aux juges du fond de faire droit aux demandes d’indemnisation du salarié, au titre de l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement.
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Cour de cassation, chambre sociale, 17 octobre 2018, n° 17-17.985 (le salarié protégé licencié, avec autorisation de l’inspecteur du travail, pour inaptitude physique peut être dédommagé par le conseil de prud’hommes lorsque l’origine de l’inaptitude résulte des manquements de l’employeur à son obligation de sécurité)
Juriste droit social
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