Les conséquences de la prise d’heures de délégation pendant la contrepartie obligatoire en repos

Publié le 10/07/2017 à 08:41, modifié le 13/07/2017 à 22:33 dans Fonctionnement des RP.

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Les heures de délégation constituent un outil à disposition des représentants du personnel afin qu’ils soient en mesure d’effectuer leurs différentes missions. Le paiement, comme la récupération de ces heures, est à l’origine d’un abondant contentieux. La Cour de cassation est venue, une fois encore, en préciser les contours.

Le paiement des heures de délégation : rappel des règles applicables

En tant que représentants du personnel titulaires, vous disposez d’un crédit d’heures de délégation mensuel vous permettant de remplir efficacement les missions qui vous incombent.

Ce crédit d’heures est assimilé à du temps de travail effectif. Cela signifie qu’il est payé comme tel.

Ces heures bénéficient d’une présomption de bonne utilisation : si l’employeur conteste leur utilisation, il ne pourra le faire qu’après vous les avoir payées.

Cependant, certaines situations dans l’entreprise peuvent nécessiter l’utilisation d’un nombre plus important d’heures que celles prévues dans le crédit. On parle de dépassement pour circonstances exceptionnelles.

Afin que l’employeur vous rémunère ces heures, il vous appartient de démontrer l’existence de ces circonstances exceptionnelles et de veiller à ce que l’utilisation de ce surplus d’heures soit conforme à votre mission.

Les heures de délégation peuvent être prises en dehors des heures habituelles de travail si les nécessités du mandat le justifient.

Elles seront alors :

  • soit majorées comme des heures supplémentaires ;
  • soit récupérées par le bais d’un repos compensateur (si un accord collectif le prévoit)
Notez-le
Ce repos compensateur n’est pas la contrepartie obligatoire en repos correspondante au dépassement du contingent annuel d’heures supplémentaires.

La prise d’heures de délégation pendant la contrepartie obligatoire en repos : quelles compensations possibles ?

Lorsque le contingent annuel d’heures supplémentaires est épuisé, les heures effectuées au-delà ouvrent droit à une contrepartie obligatoire en repos.

Il vous est tout à fait possible d’utiliser vos heures de délégation durant ce temps de repos.

Le 20 mai 1992 la Cour de cassation est venue préciser que l’élu qui utilise ses heures de délégation durant son repos compensateur ne peut être privé, du fait de l’exercice de son mandat, de la part de repos correspondante.

Son employeur doit alors lui faire bénéficier d’un report de cette part du temps de repos.

Néanmoins, s’est posée la question de la possibilité de remplacer le report par un paiement de la part de repos compensateur correspondante au temps de délégation.

C’est à cela qu’a répondu récemment la Cour de cassation.

Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, 23 mai 2017, n° 15–25.250 (pdf | 5 p. | 56 Ko)

En l’espèce, une élue cumulant plusieurs mandats a utilisé du temps de délégation durant sa contrepartie obligatoire en repos. Son repos compensateur était ainsi réduit proportionnellement au nombre d’heures de délégation accomplies et considérées comme du temps de travail effectif.

Son employeur n’ayant pas reporté la quote-part de repos correspondante au temps de délégation, elle demande le paiement par provision de cette quote-part devant le conseil des prud’hommes qui répond favorablement à sa demande.

En effet, ce dernier estime qu’en l’absence de report du temps de repos correspondant au temps de délégation, l’employeur doit payer cette quote-part à la salariée élue.

La Cour de cassation n’est pas d’accord.

Selon elle, « ce n’est que lorsque le contrat de travail prend fin avant que le salarié ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il a droit ou avant qu’il ait acquis des droits suffisants pour pouvoir prendre ce repos qu’il reçoit une indemnité en espèce dont le montant correspond à ses droits acquis ».

Cela signifie que :

  • si le contrat de travail du salarié prend fin avant que ce dernier n’ait pu récupérer sa quote-part de repos compensateur, l’employeur doit la lui payer ;
  • si le contrat de travail du salarié n’est pas rompu, la quote-part de repos compensateur doit être reportée et non payée.

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Marc Kustner
Juriste en droit social

Cour de cassation, chambre sociale, 23 mai 2017, n° 15–25.250 (ce n’est que lorsque le contrat de travail prend fin avant que le salarié ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il a droit ou avant qu’il ait acquis des droits suffisants pour pouvoir prendre ce repos qu’il reçoit une indemnité en espèces)
Cour de cassation, chambre sociale, 20 mai 1992, n° 89–43.103