Liberté d’expression des syndicats sur Internet
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Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.
Ce qu’il a fait : Un syndicat ouvre un site Internet sur lequel il publie des informations relatives à une société (évolution des salaires, chiffre d’affaires des panels et profitabilité des créations publicitaires, salaire de chaque catégorie de personnel, primes, évolutions des salaires de 1996 à 2003).
Estimant que certaines informations qui portaient sur sa rentabilité et les négociations salariales étaient confidentielles et que cette diffusion portait atteinte à ses intérêts et constituait une violation des règles de confidentialité, la société saisit le TGI en référé pour que soit ordonnée la suppression de certaines rubriques. La cour d’appel déboute l’entreprise. Cette décision est censurée par la Cour de cassation.
Ce qu’en disent les juges : Comment concilier les intérêts de l’entreprise qui parfois souhaite que certaines informations économiques ne soient pas diffusées et ceux des représentants du personnel qui souhaitent éclairer le plus possible les salariés ? Peut-on en ce nom demander à un juge de censurer les informations d’un site syndical ? La liberté de parole des uns justifie-t-elle la divulgation de tout type d’information ?
Pour les juges de la cour d’appel, le syndicat, comme tout citoyen, était libre de divulguer des informations sur l’entreprise. Il n’est pas lié par les obligations de confidentialité pesant sur les salariés, les membres du CE ou les experts, parce qu’il est tiers à l’entreprise, qu’il n’a aucun lien avec elle.
La Cour de cassation tempère cette affirmation. Si un syndicat a le droit de communiquer librement des informations au public sur un site Internet, cette liberté peut être limitée dans la mesure de ce qui est nécessaire pour éviter que la divulgation d’informations confidentielles porte atteinte aux droits des tiers. La Cour se réfère, d’une part, à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme (art. 10, § 2) selon laquelle des restrictions peuvent être prévues par la loi lorsqu’elles sont nécessaires à la protection des droits d’autrui à condition d’être proportionnées au but légitime poursuivi. Ce qui est le cas lorsqu’il s’agit d’empêcher la divulgation d’informations confidentielles. La Cour de cassation se réfère, d’autre part, à la loi pour la confiance dans l’économie numérique qui, dans son article 1er dispose que l’exercice de la communication électronique peut être limité dans la mesure requise notamment par la protection de la liberté et de la propriété d’autrui.
Il appartient donc à la cour d’appel de rechercher si les informations litigieuses ont un caractère confidentiel et si ce caractère était de nature à justifier l’interdiction de leur divulgation au regard des intérêts légitimes de l’entreprise.
Autrement dit, il n’y a pas lieu de traiter différemment les sites syndicaux externes des sites personnels ou institutionnels : la liberté d’expression reste la règle mais il faut veiller à ce que le site ne porte pas atteinte aux droits des tiers (entreprise, autres syndicats, personnel, etc.).
Le juge devra donc effectuer un contrôle de proportionnalité et se poser cette question : la liberté de communication ne porte-t-elle pas atteinte aux intérêts vitaux de l’entreprise ?
(Cassation sociale, 5 mars 2008, n° 06–18.907)
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