Négociation sur les salaires : le rôle du CSE pour les négociations à venir sur le 4e trimestre 2023

Publié le 20/10/2023 à 08:12 dans Négociations collectives.

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Les leaders syndicaux ont annoncé la couleur : les délégués syndicaux vont être offensifs face aux employeurs lors des négociations récurrentes obligatoires (anciennes NAO) organisées en fin d’année. Des négociations qui s’annoncent tendues, les employeurs risquant d’opposer aux demandes appuyées sur l’inflation les incertitudes économiques liées à la situation internationale et à la crise énergétique. Les délégués syndicaux pourraient avoir le soutien de la part des membres du CSE.

NAO 4e trimestre 2023 : les priorités dans la négociation

Des statistiques issues d’études de plusieurs cabinets de recrutement prévoient ainsi une hausse moyenne des salaires en 2023 de 4,5 %, pour une inflation annoncée à 5,7 %. Des demandes de rattrapage en fonction des évolutions des années précédentes (inflation à 5,2 % en 2022) et de l’inflation 2023 vont sans surprise être portées par les organisations syndicales lors des négociations récurrentes obligatoires à venir.

Quelles demandes précises pour une revalorisation des salaires ? L’axe d’attaque classique : les demandes relatives aux augmentations collectives ainsi que l’enveloppe des augmentations individuelles.

A côté de ces axes classiques, les délégués syndicaux peuvent négocier la mise en place d’outils de rémunération indirecte.

Par exemple, l’épargne salariale. Pour l’intéressement, les entreprises sont encouragées à le mettre en place avec plusieurs mesures dédiées. Directement, la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat du 16 août 2022 facilite le recours à l’intéressement en augmentant la durée maximale de validité du régime, passant de 3 à 5 ans. Accord d’intéressement dont il est possible d’assurer un renouvellement sans limite par tacite reconduction.

Et pourquoi ne pas évoquer les titres restaurant ? Il est possible de négocier avec application immédiate une hausse de la participation patronale sur les titres remis aux salariés. Le plafond maximal est fixé depuis le 1er janvier 2023 à 6,91 euros au lieu de 6,50 euros. Si l’entreprise décide de monter sa participation au maximum sur les trois derniers mois de l’année 2023, avec une base de 22 titres remis par mois, le gain pour le salarié se monte au total à 27,06 euros lorsque l’entreprise prenait en charge jusqu’alors 6,50 euros. Mais le gain peut être bien plus important dans les entreprises dont la participation patronale était bien inférieure au plafond d’exonération de 6,50 euros (avec une entreprise passant de 4 euros à 6,91 euros à sa charge, le gain sur 3 mois se monte à 192,06 euros). Pour rappel, la participation patronale respectant les critères d’exonération est intégralement exonérée de charges sociales et d’impôt sur le revenu.

Outil existant depuis quelques années mais encore peu mobilisé, le forfait mobilités durables. En pratique, l’employeur peut prendre en charge 700 euros par an par bénéficiaire (voire 800 euros dans le cas où le bénéficiaire se voit déjà prendre en charge 50 % d’un abonnement de transport public) au titre des frais exposés pour réaliser le trajet domicile-lieu de travail quotidiennement. L’avantage du forfait, dont la mise en place peut résulter d’un accord conclu lors des négociations sur les salaires, est la simplicité : une attestation sur l’honneur annuelle des bénéficiaires suffit à bénéficier d’une exonération totale de charges sociales et d’impôt sur le revenu. Les plafonds de 700 euros et 800 euros ne sont pour l’instant prévus que jusqu’à la fin de l’année 2023. C’est donc le moment de les mobiliser en prévoyant un versement avant le 31 décembre 2023.

Attention

La prime de partage de la valeur reste aussi un outil de rémunération central en 2023 grâce à sa simplicité de mise en œuvre et ses avantages sociaux et fiscaux pour l’entreprise comme pour les salariés. A noter qu’une loi pourrait prochainement revoir le régime de la prime de partage de la valeur, en étendant dans le temps les avantages sociaux et fiscaux uniquement pour les entreprises de moins de 50 salariés. Le projet de loi envisage la mise en place d’un nouveau dispositif de rémunération appelée « plan de partage de la valorisation de l'entreprise ». Peut-être bientôt une nouvelle idée à défendre face à l’employeur pour améliorer les rémunérations des salariés !

NAO 4e trimestre 2023 : le soutien apporté par les élus du CSE

La négociation obligatoire ne concerne que les entreprises disposant d’au moins un délégué syndical. Ce sont les délégués syndicaux qui vont mener les négociations face à l’employeur et signer l’éventuel accord trouvé. Les élus du CSE n’interviennent pas avec leur casquette d’élu lors de cette négociation.

Mais ils ont des possibilités d’action directes ou indirectes.

Ainsi, les élus du CSE peuvent pour certains être choisis parmi les salariés accompagnant les délégués syndicaux lors de la négociation.

Les élus ont aussi plusieurs modes d’action pour aider à la réussite des négociations grâce aux moyens du CSE. Ils ont par exemple la possibilité de fournir de nombreuses informations aux délégués syndicaux, permettant de mieux définir la stratégie à adopter face à l’employeur lors de la négociation. Informations collectées lors des réunions du CSE, présentes dans la BDESE, fournies dans des rapports d’expertise, obtenues en rencontrant et échangeant avec les salariés, apprises lors de formations, etc. La nature des informations est large, comme il a pu être débattu lors du webinaire organisé par les Editions Tissot le 3 octobre 2023 sur le rôle des élus lors des NAO en contexte inflationniste. Vous pouvez visionner ce webinaire en replay.

Conjointement au partage des informations, les élus ont bien entendu toute latitude pour partager des idées et des propositions.

Conseil

Et pourquoi ne pas aider financièrement les délégués syndicaux ? Grâce au compte de fonctionnement, la majorité des élus titulaires dispose du pouvoir de financer des formations au profit des délégués syndicaux. Ce financement est prévu par l’article L. 2315-61 du Code du travail. Une formation avant de se lancer dans les négociations peut aider à se montrer plus efficace lors des négociations.

Enfin, il est possible que les élus du CSE se substituent complètement aux délégués syndicaux pour mener les négociations face à l’employeur. Pour cela, il faut que le CSE se soit transformé en conseil d’entreprise. Néanmoins, pour cela, il est nécessaire que les délégués syndicaux aient conclu un accord d’entreprise avec l’employeur et aient accepté de confier leur pouvoir de négociation aux élus du CSE. Cette situation est très rare en pratique.

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Olivier Castell

Expert en droit du travail et relations sociales, www.didrh.fr

Auteur des documentations SOCIAL BATIMENT, SOCIAL TRAVAUX PUBLICS et RESPONSABLE ET GESTIONNAIRE PAIE BTP pour les Editions Tissot. Formateur en droit du travail auprès des entreprises et des …