Petite chronologie juridique d’une restructuration (2/2)
Publié le 02/10/2009 à 00:00, modifié le 11/07/2017 à 18:19 dans Fonctionnement des RP.
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Retrouvez la seconde partie de notre dossier portant sur le rôle du comité d’entreprise et les différentes étapes à respecter lors de la réorganisation d’une entreprise.
Une restructuration est un phénomène complexe, car c’est une période, parfois longue, de transformations multiples. Le droit du travail organise ce processus en plusieurs étapes qu’il faut savoir repérer.
Ce travail de reconstruction, en quelque sorte, de la réorganisation joue deux rôles essentiels :
Sur le moment, le contenu et la procédure selon lesquels le comité d’entreprise (CE) a le droit d’intervenir dans le processus, voir la 1re partie de notre dossier dans notre lettre d’actualité n° 54 du 4 septembre 2009.
Étapes de la réorganisation et mobilités
Étape 1 – La réorganisation des emplois
Il faut regarder uniquement les conséquences de la réorganisation sur les emplois, pour distinguer ceux qui sont affectés par des mesures soumises au régime du licenciement pour motif économique (LME) et les autres.
Étape 2 – Des emplois aux catégories professionnelles
Les emplois affectés par des mesures soumises au régime du LME doivent être rattachés à des catégories professionnelles.
Une catégorie professionnelle correspond à tous les emplois qui requièrent le même type de compétences, au-delà de leur intitulé : un salarié peut occuper l’un quelconque de ces emplois après, éventuellement, une simple formation d’adaptation.
Il faut s’opposer à un découpage du type 1 emploi = 1 catégorie, car il donnerait à la direction une plus grande maîtrise dans la détermination des salariés qui seront concernés par la procédure de LME. Le CE devra donc forger sa propre appréciation, en exigeant la production des fiches de poste et en consultant les salariés et la grille de classification de la convention collective.
Etape 3 – Des catégories aux salariés
L’application des règles de l’ordre des licenciements va distinguer :
Pourquoi ne pas envisager directement le LME des salariés dont l’emploi est affecté et permettre aux autres salariés dont l’emploi n’est pas affecté de le conserver ?
Parce que, certes, ces mesures touchent les salariés, mais elles ne sont pas liées à leur personne ou leur travail. C’est pourquoi les salariés finalement concernés seront choisis par application de critères objectifs et encadrés qui ont pour but :
En conséquence, du point de vue des droits des salariés, les mobilités se répartissent en des :
Mobilités liées à la réorganisation
Pour classer les mobilités directement liées à la réorganisation, il faut :
En cas de changement des conditions de travail, un refus est en principe passible d’une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement (il n’obéit pas aux règles du LME). Cependant, il ne s’agit pas nécessairement d’une faute grave (par exemple, refus de changer d’horaire de déjeuner qui permettait de faire déjeuner ses enfants scolarisés).
Le refus peut même, exceptionnellement, ne pas être fautif lorsque la décision de l’employeur paraît :
S’il s’agit d’une modification de contrat :
Les mesures d’accompagnement des salariés ayant accepté la modification (aides à la mobilité, formation, maintien de salaire, etc.) sont à négocier avec l’employeur : ce ne sont pas des obligations légales, contrairement aux mesures liées à la procédure de LME (notamment la possibilité, si des postes de reclassement existent, de choisir entre plusieurs postes ou lieux d’affectation et les autres mesures d’un éventuel PSE).
Remarque : la réponse à la proposition de modification est donc un choix cornélien : si la 2de consultation n’a pas encore été ouverte, l’employeur n’a pas levé le voile, à ce stade, sur les possibilités de reclassement, ni les mesures d’accompagnement des LME envisagés.
Or, le secrétaire ne peut en imposer l’ouverture qu’après la date d’expiration du délai de refus, sauf si la réorganisation s’accompagne d’au moins 2 suppressions ou transformations d’emplois. Mais, même dans ce cas, ne serait-il pas prématuré d’engager la consultation avant de connaître l’issue des propositions de modifications de contrat ?
Mobilités liées à l’ordre des licenciements
Dans l’hypothèse où le régime du LME est applicable, les LME envisagés concernent, à ce stade, des catégories professionnelles et non des salariés identifiés. Une fois le nombre de LME envisagés connu pour chaque catégorie professionnelle, il faut :
Mobilités liées au reclassement
L’obligation de reclassement consiste à proposer aux salariés inclus dans la procédure de LME, individuellement et par écrit, l’ensemble des postes disponibles relevant de la même catégorie que ceux qu’ils occupent ou un emploi équivalent ou, à défaut, un emploi relevant d’une catégorie inférieure.
La recherche de reclassement doit s’opérer dans tous les établissements de la société ou UES, et dans d’autres sociétés dont les activités, l’organisation ou le lieu de travail permettent la permutation de tout ou partie du personnel, notamment les sociétés du même groupe, voire même des sociétés partenaires, y compris hors de France.
Le salarié est toujours en droit de refuser un reclassement : il n’est pas nécessaire de rechercher si ce reclassement constituerait une modification de son contrat. Le refus d’une proposition de reclassement n’est jamais fautif.
Si le salarié refuse tous les reclassements, il sera licencié en accédant aux mesures d’accompagnement.
Si le salarié accepte un reclassement, il échappe au LME :
Article publié le 2 octobre 2009
Ce travail de reconstruction, en quelque sorte, de la réorganisation joue deux rôles essentiels :
- organiser une progression, étape par étape, de la dimension organisationnelle de la restructuration vers la situation de chaque salarié. A travers les salariés qui semblent concernés par les mobilités envisagées, ce sont, en réalité, d’abord des emplois qui sont mis en cause. Reconstruire cette progression à partir du projet présenté par la direction soulève de nombreuses difficultés pratiques : la définition des emplois et catégories professionnelles varie d’une convention collective à une autre, et il faut les confronter à l’organisation des postes et sites de l’entreprise ;
- déterminer les droits des salariés qui se verront imposer ou proposer des mobilités, en fonction de l’étape à laquelle cette mobilité intervient, et notamment la possibilité pour eux de s’opposer, individuellement, aux changements qui affectent leur situation, les conséquences de leur acceptation ou de leur refus, ainsi que la possibilité de réclamer des propositions alternatives.
Sur le moment, le contenu et la procédure selon lesquels le comité d’entreprise (CE) a le droit d’intervenir dans le processus, voir la 1re partie de notre dossier dans notre lettre d’actualité n° 54 du 4 septembre 2009.
Étapes de la réorganisation et mobilités
Étape 1 – La réorganisation des emplois
Il faut regarder uniquement les conséquences de la réorganisation sur les emplois, pour distinguer ceux qui sont affectés par des mesures soumises au régime du licenciement pour motif économique (LME) et les autres.
Étape 2 – Des emplois aux catégories professionnelles
Les emplois affectés par des mesures soumises au régime du LME doivent être rattachés à des catégories professionnelles.
Une catégorie professionnelle correspond à tous les emplois qui requièrent le même type de compétences, au-delà de leur intitulé : un salarié peut occuper l’un quelconque de ces emplois après, éventuellement, une simple formation d’adaptation.
Il faut s’opposer à un découpage du type 1 emploi = 1 catégorie, car il donnerait à la direction une plus grande maîtrise dans la détermination des salariés qui seront concernés par la procédure de LME. Le CE devra donc forger sa propre appréciation, en exigeant la production des fiches de poste et en consultant les salariés et la grille de classification de la convention collective.
Etape 3 – Des catégories aux salariés
L’application des règles de l’ordre des licenciements va distinguer :
- les salariés visés par un LME qui pourront réclamer l’application du droit au reclassement ;
- les salariés non visés par un LME et, parmi eux, ceux dont l’emploi a été affecté par la réorganisation (il leur sera proposé de reprendre l’emploi d’un des salariés visés par un LME) et les autres (qui conserveront leur emploi).
Pourquoi ne pas envisager directement le LME des salariés dont l’emploi est affecté et permettre aux autres salariés dont l’emploi n’est pas affecté de le conserver ?
Parce que, certes, ces mesures touchent les salariés, mais elles ne sont pas liées à leur personne ou leur travail. C’est pourquoi les salariés finalement concernés seront choisis par application de critères objectifs et encadrés qui ont pour but :
- d’une part, d’éviter que la direction ne puisse écarter des « éléments indésirables » sous couvert de mesures affectant leur emploi ;
- et, d’autre part, d’épargner les salariés qui subiraient le préjudice le plus important en raison de leur âge, leurs charges de famille, etc.
En conséquence, du point de vue des droits des salariés, les mobilités se répartissent en des :
- mobilités directement liées à la réorganisation : elles peuvent concerner tout emploi, au choix de la direction ;
- mobilités qui sont liées à l’ordre des licenciements : elles concernent les salariés occupant des emplois relevant des catégories professionnelles concernées par les mesures de la réorganisation auxquelles le régime du LME est applicable ;
- mobilités qui sont liées à la recherche d’un reclassement : elles concernent, parmi les salariés précédents, ceux déterminés par application de l’ordre des licenciements.
Mobilités liées à la réorganisation
Pour classer les mobilités directement liées à la réorganisation, il faut :
- obtenir une cartographie précise des emplois dans l’entreprise, tous établissements confondus, avant et après la réorganisation ;
- identifier les suppressions d’emploi, en faisant la différence entre ces deux cartographies. Attention : ce travail préalable de cartographie des emplois est indispensable. La suppression d’emplois ne se traduit pas nécessairement par une diminution d’effectif, elle peut se traduire par une réaffectation des salariés sur d’autres emplois, y compris de nouveaux emplois. Si on ne s’intéresse qu’aux conséquences concrètes sur les salariés, il est donc difficile de distinguer une mobilité qui serait directement liée à la réorganisation (étape 1) d’une mobilité qui serait en réalité liée à l’application du régime du LME (étape 3), suite à une suppression d’emploi. Le silence gardé par la direction sur l’existence de suppressions d’emploi lui permet ainsi d’échapper à l’application du régime du LME (notamment en comptant sur l’accord des salariés concernés, ou sur le fait qu’il ne s’agit pas de modifications de contrat). Lorsque des mobilités sont envisagées, il faut donc commencer par s’assurer qu’elles ne masquent pas des suppressions d’emploi ;
- après identification des suppressions d’emploi, distinguer les changements des conditions de travail, qui relèvent du pouvoir de l’employeur, et les modifications de contrat de travail, qui requièrent l’accord du salarié. Même si la modification de contrat s’inscrit dans le cadre d’une restructuration (qui affecte un emploi et non nécessairement le salarié qui l’occupe), elle a toujours une dimension en partie individuelle, car elle ne peut jamais être imposée au salarié. Sa réponse joue un rôle déterminant pour savoir si l’emploi qu’il occupe sera ou non considéré comme affecté par la procédure de LME.
En cas de changement des conditions de travail, un refus est en principe passible d’une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement (il n’obéit pas aux règles du LME). Cependant, il ne s’agit pas nécessairement d’une faute grave (par exemple, refus de changer d’horaire de déjeuner qui permettait de faire déjeuner ses enfants scolarisés).
Le refus peut même, exceptionnellement, ne pas être fautif lorsque la décision de l’employeur paraît :
- abusive (par exemple une mutation sans délai) ;
- disproportionnée par rapport à une liberté du salarié (par exemple un changement de domicile imposé alors qu’il existe des solutions alternatives) ;
- ou étrangère à l’intérêt de l’entreprise (par exemple dans la seule intention de nuire au salarié).
S’il s’agit d’une modification de contrat :
- le défaut de réponse dans le délai d’un mois vaut accord (cette règle ne vaut que pour les modifications pour motif économique) ;
- le refus permet de considérer qu’un LME est envisagé. Cet emploi entrera dans le décompte des emplois affectés par une mesure relevant du régime du LME permettant de déterminer la procédure applicable ainsi que la catégorie professionnelle concernée par la procédure de LME ;
- l’accord du salarié induit que son emploi ne sera pas considéré comme affecté par une mesure soumise au régime du LME, mais en aucun cas que ce salarié ne sera pas, lui, concerné par la procédure de LME, car cette question dépend de la détermination des catégories professionnelles attachées aux emplois affectés par une mesure soumise au régime du LME (étape 2) et de l’application de l’ordre des licenciements (étape 3).
Les mesures d’accompagnement des salariés ayant accepté la modification (aides à la mobilité, formation, maintien de salaire, etc.) sont à négocier avec l’employeur : ce ne sont pas des obligations légales, contrairement aux mesures liées à la procédure de LME (notamment la possibilité, si des postes de reclassement existent, de choisir entre plusieurs postes ou lieux d’affectation et les autres mesures d’un éventuel PSE).
Remarque : la réponse à la proposition de modification est donc un choix cornélien : si la 2de consultation n’a pas encore été ouverte, l’employeur n’a pas levé le voile, à ce stade, sur les possibilités de reclassement, ni les mesures d’accompagnement des LME envisagés.
Or, le secrétaire ne peut en imposer l’ouverture qu’après la date d’expiration du délai de refus, sauf si la réorganisation s’accompagne d’au moins 2 suppressions ou transformations d’emplois. Mais, même dans ce cas, ne serait-il pas prématuré d’engager la consultation avant de connaître l’issue des propositions de modifications de contrat ?
Mobilités liées à l’ordre des licenciements
Dans l’hypothèse où le régime du LME est applicable, les LME envisagés concernent, à ce stade, des catégories professionnelles et non des salariés identifiés. Une fois le nombre de LME envisagés connu pour chaque catégorie professionnelle, il faut :
- établir la liste des catégories professionnelles puis, pour chaque catégorie professionnelle, la liste des emplois relevant de cette catégorie ;
- établir la liste des salariés occupant l’ensemble des emplois relevant de chacune des catégories concernées par les LME, catégorie par catégorie et sur l’ensemble de l’entreprise (même si un seul établissement est concerné) ;
- classer, pour chaque catégorie, ces salariés selon les critères et la méthode applicable dans l’entreprise pour établir un « ordre des licenciements » ;
- identifier les salariés concernés par les LME en fonction de leur classement et du nombre de licenciements envisagés. Ainsi, des salariés dont l’emploi n’était pas affecté directement par la réorganisation vont se trouver concernés par la procédure de LME. Réciproquement, d’autres, qui étaient visés par la réorganisation, vont en être exclus.
Mobilités liées au reclassement
L’obligation de reclassement consiste à proposer aux salariés inclus dans la procédure de LME, individuellement et par écrit, l’ensemble des postes disponibles relevant de la même catégorie que ceux qu’ils occupent ou un emploi équivalent ou, à défaut, un emploi relevant d’une catégorie inférieure.
La recherche de reclassement doit s’opérer dans tous les établissements de la société ou UES, et dans d’autres sociétés dont les activités, l’organisation ou le lieu de travail permettent la permutation de tout ou partie du personnel, notamment les sociétés du même groupe, voire même des sociétés partenaires, y compris hors de France.
Le salarié est toujours en droit de refuser un reclassement : il n’est pas nécessaire de rechercher si ce reclassement constituerait une modification de son contrat. Le refus d’une proposition de reclassement n’est jamais fautif.
Si le salarié refuse tous les reclassements, il sera licencié en accédant aux mesures d’accompagnement.
Si le salarié accepte un reclassement, il échappe au LME :
- s’il s’agit d’un reclassement interne à la société, le contrat se poursuit, si besoin après signature d’un avenant ;
- s’il s’agit d’un reclassement externe, dans une autre société de l’UES, du groupe ou une société partenaire, le salarié change d’employeur et débute un nouveau contrat. Une convention entre le salarié, l’ancien employeur et le nouveau pourra régler les questions de reprise de l’ancienneté ou de certains avantages, etc. Lorsqu’un PSE existe, c’est le PSE qui contient ces engagements ;
- le reclassement doit, si nécessaire, s’accompagner d’une formation d’adaptation au nouvel emploi. Il peut aussi ouvrir droit à d’autres mesures d’accompagnement (aides à la mobilité, formation qualifiante, etc.), notamment dans le cadre d’un PSE.
Article publié le 2 octobre 2009
Thématique : Fonctionnement des RP
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