Prise d’acte de rupture d’un salarié protégé : les effets de votre mandat
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Prise d’acte de rupture du contrat de travail : le principe
Lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de fait(s) qu’il reproche à son employeur, cette rupture est susceptible de produire les effets suivants, à savoir :
- d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (licenciement abusif) si le ou les fait(s) invoqué(s) par le salarié le justifient ;
- d’une démission si, dans le cas contraire, le ou les fait(s) invoqués ne sont pas de nature à « compromettre » l’employeur et/ou, à tout le moins, la pérennité de la relation de travail.
La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser que la prise d’acte permet au salarié de rompre le contrat de travail aux torts de l’employeur et ce, en cas de manquement(s) suffisamment grave(s) de ce dernier. Le manquement se devant d’empêcher la poursuite de la relation contractuelle.
Par conséquent, il convient donc que le salarié puisse démontrer le caractère grave des faits motivant sa prise d’acte ; ces faits devant par ailleurs justifier « l’arrêt » immédiat du contrat. Toute prise d’acte de rupture a pour conséquence de ne pouvoir être rétractée.
Si nous partons du principe que les griefs en cause s’avèrent être fondés (hypothèse la plus « intéressante »), l’employeur pourra alors être condamné au versement des indemnités suivantes :
- une indemnité de licenciement (légale ou conventionnelle) ;
- une indemnité compensatrice de préavis et de congés payés attachés à ce préavis (quelle que soit la situation du salarié) ;
- une indemnité de congés payés (pour les congés payés acquis jusqu’à la date de prise d’acte de rupture et non pris) ;
- une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse au moins égale à 6 mois de salaire pour les salariés ayant deux années d’ancienneté ou plus dans une entreprise d’au moins 11 salariés ;
- une indemnité pour défaut d’information en lien avec la portabilité de la prévoyance ;
- des dommages et intérêts au titre de préjudice(s) « autres » (exemple : préjudice moral en lien avec le contexte de la rupture etc.) ;
- des intérêts légaux exigibles à compter de la date de prise d’acte de la rupture.
Prise d’acte de rupture : situation des salariés mandatés
La prise d’acte de rupture exercée par un salarié titulaire d’un mandat produira, cette fois ci :
- les effets d’un licenciement nul si le ou les fait(s) invoqué(s) par le salarié le justifient.
Sur ce point, la nullité du licenciement est retenue compte tenu de la violation du statut protecteur, l’inspecteur du travail n’ayant pu se prononcer sur la rupture du contrat ; - dans le cas contraire, les effets d’une démission.
Illustration : Un vendeur automobile avait sollicité le paiement d’un certain nombre d’heures supplémentaires accomplies au titre des cinq années précédentes, mais non rémunérées par son employeur. A défaut de réponse, il avait pris acte de la rupture de son contrat de travail et saisi la juridiction prud’homale pour que soit requalifié son licenciement en licenciement nul. Ce salarié avait été, entre sa demande de paiement et sa prise d’acte de rupture, élu délégué du personnel.
L’employeur contestait la décision rendue par la cour d’appel (ayant fait droit à la demande du salarié) estimant que la prise d’acte aurait dû produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et non d’un licenciement nul puisque les faits reprochés étaient tous antérieurs au mandat.
La Cour de cassation n’entend pas faire droit à cette argumentation se voulant, au bout du bout, d’introduire un distinguo entre des faits antérieurs au mandat et des faits postérieurs au mandat, pour apprécier s’il s’agit d’un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse. Pour cette dernière, seul compte le statut du salarié au jour de la prise d’acte de rupture, à savoir si ce dernier se trouve être titulaire d’un mandat ou non.
Dans ce cadre, l’employeur pourra alors être condamné à payer en plus des indemnités énumérées ci-dessus et à la place de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse :
- une indemnité réparant le préjudice résultant du caractère illicite de la rupture (au moins égale à 6 mois de salaire sans condition d’ancienneté) ;
- une indemnité forfaitaire spécifique au titre de la violation du statut protecteur égale aux salaires que le salarié aurait dû percevoir jusqu’à l’expiration de la période de protection, dans la limite de deux années correspondant à la durée légale minimale du mandat augmentée de 6 mois soit, de 30 mois.
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Cour de cassation, chambre sociale, 21 juin 2017, n° 17-11.227 (la prise d’acte de la rupture d’un salarié protégé produit, si elle est justifiée, les effets d’un licenciement nul)
De formation supérieure en droit social éprouvée, sur le terrain, par des années d'application quotidienne du droit du travail, des relations sociales et de la négociation collective, j’ai toujours …
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