Prise d’acte du salarié protégé : précisions sur l’articulation avec le licenciement en cours

Publié le 29/10/2019 à 08:41 dans Protection des RP.

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Le salarié protégé ayant pris acte de la rupture de son contrat de travail est fondé à solliciter la nullité de son licenciement, quand bien même le ministre du Travail aurait, postérieurement à celle-ci, annulé le refus d’autorisation du licenciement prononcé par l’inspecteur du travail.

Prise d’acte et licenciement du salarié protégé : deux motifs de rupture distincts

Le salarié protégé peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail. Il rompt alors son contrat, invoquant un manquement de son employeur.

Le manquement invoqué doit alors être suffisamment grave pour faire obstacle à la rupture du contrat de travail.

Si tel est le cas, la prise d’acte est considérée comme un licenciement nul, car prononcé en violation du statut protecteur, permettant au salarié d’obtenir diverses indemnités : indemnité de violation du statut protecteur, indemnité compensatrice de préavis, congés payés afférents, indemnité de licenciement, dommages et intérêts pour licenciement abusif.

Le licenciement du salarié protégé suppose, quant à lui, l’autorisation de l’inspection du travail. L’autorisation ou le refus d’autorisation peut alors être contesté devant le ministre du Travail, puis le tribunal administratif.

Prise d’acte et licenciement du salarié protégé : articulation des deux procédures menées de façon concomitante

Dans l’espèce évoquée devant la Cour de cassation, un salarié protégé avait saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, le 26 octobre 2011.

L’employeur avait, par la suite, et avant que le conseil de prud’hommes ne se prononce sur la résiliation judiciaire, demandé à l’inspection du travail d’autoriser le licenciement pour faute grave de ce salarié.

L’inspection du travail avait refusé d’autoriser le licenciement le 9 mai 2012. L’employeur contestait ce refus devant le ministre du Travail le 1er juin 2012.

Le salarié prenait acte de la rupture de son contrat de travail, le 7 juin 2012.

Le ministre du Travail annulait le refus d’autoriser le licenciement prononcé par l’inspection du travail, le 1er octobre 2012.

L’employeur, considérant que la prise d’acte n’était pas justifiée, tentait par ailleurs de faire valoir la décision du ministre considérant que le comportement du salarié était d’une gravité suffisante pour justifier le licenciement demandé.

La Cour de cassation ne retient pas l’argument, énonçant que la prise d’acte du salarié protégé en raison de faits qu’il reproche à son employeur produit les effets d’un licenciement nul pour violation du statut protecteur quand les faits invoqués le justifient, quand bien même le ministre, saisi d’un recours hiérarchique antérieurement à la prise d’acte du salarié, a annulé postérieurement à cette prise d’acte le refus d’autorisation de licenciement prononcé initialement par l’inspection du travail.

La solution est logique et conforme à la position antérieure de la Cour de cassation, la prise d’acte entraine rupture immédiate du contrat, dès lors, l’autorisation de licencier intervenue postérieurement, sur un contrat déjà rompu, est sans objet.


Cour de cassation, chambre sociale, 10 juillet 2019, n° 17-22.319 (lorsqu'un salarié titulaire d'un mandat de représentant du personnel prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur quand les faits invoqués le justifiaient, quand bien même le ministre du Travail, saisi d'un recours hiérarchique antérieurement à la prise d'acte du salarié, a annulé postérieurement à cette prise d'acte le refus d'autorisation de licenciement prononcé initialement par l'inspecteur du travail)

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Geoffrey Del Cuerpo

Avocat au Barreau de Montpellier