Renonciation au mandat de délégué syndical : à quel moment est-elle opposable à l’employeur ?
Temps de lecture : 4 min
Un délégué syndical peut, à tout instant, démissionner de son mandat. Mais alors, à quelle date cette décision prend-elle effet à l’égard de l’employeur ? Autrement dit, jusqu’à quand le salarié peut-il se prévaloir du statut de salarié protégé ? Cette question, à laquelle la Cour de cassation vient de répondre, présente un intérêt pratique lorsque l’employeur décide, peu après, de licencier ce dernier.
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Renonciation du salarié : motif de fin anticipée du mandat de délégué syndical
En tant que délégué syndical, votre mandat doit prendre fin, au plus tard, lors du premier tour des prochaines élections professionnelles.
Pour autant, certaines circonstances peuvent aboutir à anticiper ce terme initial. C’est notamment le cas lorsque, pour des raisons qui vous appartiennent, vous décidez de renoncer à votre mandat.
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Votre renonciation ne vous prive pas du droit d’être à nouveau désigné délégué syndical. Une double réserve doit être cependant respectée concernant :
- le moment de la désignation : qui doit survenir au cours du même cycle électoral ;
- et vous-même : car vous devez toujours satisfaire aux conditions de désignation.
Cet événement peut alors soulever une interrogation anodine en apparence : à quel moment votre renonciation est-elle opposable à votre employeur ?
Or, comme l’illustre cet arrêt récent de la Cour de cassation, elle peut faire naître un enjeu pratique dans l’hypothèse où votre employeur déciderait, dans une période concomitante, d’engager une procédure de licenciement à votre encontre.
En effet, rappelons ici que les délégués syndicaux bénéficient d’une protection contre le licenciement. A ce titre, la rupture de leur contrat de travail, soumise à une procédure plus exigeante, nécessite de recueillir une autorisation préalable de l’inspection du travail. Il en va de même concernant les anciens délégués syndicaux ayant exercé leur fonction pendant au moins un an.
Ainsi, l'autorisation administrative de licenciement est requise lorsque, à la date d'envoi de la convocation à l'entretien préalable, le salarié bénéficie de cette protection légale.
Tout licenciement prononcé en violation de cette obligation doit être annulé.
Renonciation du salarié à son mandat de délégué syndical : opposable à l’employeur à la date à laquelle la démission est portée à sa connaissance
Dans cette affaire, une salariée est désignée en qualité de déléguée syndicale le 3 décembre 2015. Le 28 janvier 2016, cette dernière est convoquée à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement. Or, elle avait annoncé à son syndicat la semaine précédente, le 21 janvier 2016, qu’elle décidait de renoncer à son mandat. L’information est alors portée à la connaissance de l’employeur, le 1er février 2016, par une lettre dans laquelle le syndicat lui notifie la désignation de son remplaçant. Considérant que cette démission prenait effet au 21 janvier 2016, et étant donné que la salariée avait accompli un mandat inférieur à un an, ce dernier procède à un licenciement en dehors des règles applicables aux salariés protégés.
La salariée conteste et sollicite la nullité de la mesure. D’après cette dernière, elle bénéficiait toujours du statut de salarié protégé à la date d'envoi de la convocation à l'entretien préalable.
Sa demande est accueillie favorablement à hauteur d’appel. En désaccord avec la solution retenue par les juges du fond, l’employeur forme un pourvoi en cassation.
Pour lui, la protection de la salariée était effectivement échue depuis le 21 janvier 2016. Et pour cause :
- la renonciation de la salariée produisait, à son égard, immédiatement effet de sorte qu’elle ne pouvait plus revendiquer cette qualité et la protection attachée ;
- il pouvait opposer cette prise d’effet instantanée à la salariée dans la mesure où l’information lui était parvenue postérieurement.
La Cour de cassation rejette cependant ces arguments et confirme l’analyse des juges d’appel.
C’est à la date à laquelle la démission est portée à la connaissance de l’employeur que celle-ci prend effet à son égard. Or, les éléments de faits relatent que cette prise de connaissance est intervenue le 1er février 2016, date à laquelle l’employeur avait reçu le courrier du syndicat. Celui-ci ne pouvait reporter cette prise d’effet au 21 janvier 2016, date à laquelle la salariée avait notifié sa décision auprès de son syndicat.
En conséquence, au 28 janvier 2016, la salariée jouissait encore de la qualité de salarié protégé. Son licenciement, prononcé en violation de ce statut, a été justement annulé.
Pour en savoir davantage sur la désignation et le mandat des délégués syndicaux, les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « CSE ACTIV » :

Cour de cassation, chambre sociale, 14 juin 2023, n° 21-18.599 (la démission du salarié de son mandat de délégué syndical prend effet, à l'égard de l'employeur, à la date à laquelle cette démission est portée à sa connaissance)
Juriste en droit social et rédacteur au sein des Editions Tissot
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