Réunions DP : certains propos peuvent être considérés comme diffamatoires

Publié le 10/11/2015 à 08:12, modifié le 11/07/2017 à 18:27 dans Protection des RP.

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Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.

Il relève de la mission des DP de relayer les problèmes rencontrés par les salariés mais il faut faire attention à ne pas porter d’accusations diffamatoires.

Les faits

Lors d’une réunion de DP, une déléguée syndicale qui assiste les délégués du personnel en réunion en tant qu’invitée, demande à l’employeur de faire cesser le harcèlement moral dont est victime une salariée de l’entreprise du fait de son supérieur hiérarchique. Cette responsable mise en cause s’estime victime de diffamation publique et intente une action pour diffamation au pénal.

Ce qu’en disent les juges

Les juges de la cour d’appel écartent le caractère public de la diffamation en relevant que « les propos incriminés ont été tenus lors d’une réunion de délégués du personnel à laquelle participaient douze personnes, salariées de la même entreprise, liées par une communauté d’intérêts, qui exclut l’existence d’une publicité ; (…) la poursuite concerne donc une diffamation non publique ».

Mais la Cour d’appel retient qu’il y a quand même eu diffamation (non publique) : « Les propos tenus par la prévenue lors de la réunion du 21 février 2013 sont, par la nature des faits allégués, à savoir une accusation de harcèlement d’une salariée, objectivement diffamatoires et constitutifs d’une atteinte personnelle pour madame X., supérieure hiérarchique de celle-ci, qui a été nommément désignée comme l’auteur du harcèlement ».

Malgré cela, la déléguée syndicale est relaxée en raison de sa bonne foi, aucune intention de nuire n’étant relevée à son encontre.

Et les juges d’avancer trois éléments pour écarter la responsabilité pénale de la syndicaliste :

  • la prévenue avait le droit, en tant qu’invitée à la réunion des délégués du personnel, de poser des questions. « En posant une question relative aux conditions de travail d’une salariée et aux incidences sur sa santé, la prévenue poursuivait un but légitime » ;
  • la prévenue a satisfait au devoir d’enquête préalable puisqu’elle était en contact direct avec la salariée en question. Et les juges de relever que la prévenue a reçu un appel téléphonique, puis un courriel de la salariée 3 jours avant la réunion, indiquant que celle-ci était en arrêt maladie depuis un mois, qu’elle avait fait l’objet d’un acharnement et qu’elle ne se voyait pas retourner au travail avec cette pression. La salariée lui demandait expressément de parler de cela lors de la réunion à venir. Par ailleurs, la prévenue avait déjà fait parvenir un courriel d’alerte, le 12 août 2008, en qualité de déléguée syndicale FO à un responsable de l’entreprise avec copie à l’inspection du travail sur les relations entre certains agents et des superviseurs, relevant du harcèlement moral ;
  • enfin, « la prévenue a fait preuve de prudence dans l’expression » en faisant remarquer « qu’elle appelle cela du harcèlement (…) car le conseiller va très mal et n’est pas en état de reprendre son travail ».

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Cour de cassation, chambre criminelle, 8 septembre 2015, n° 14–81.495 (il n’y a pas diffamation en cas de bonne foi)