Statut protecteur : violation, réintégration, résiliation

Publié le 19/05/2021 à 08:01 dans Protection des RP.

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En cas de violation par l’employeur du statut protecteur, le salarié protégé peut solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail. Petite piqûre de rappel de la Cour de cassation sur les notions de réintégration du salarié protégé et des effets juridiques de la résiliation judiciaire sollicité par celui-ci : licenciement sans cause réelle et sérieuse ou licenciement nul ?

Statut protecteur et réintégration

Du fait de l’exercice de son mandat, le salarié bénéficie d’une protection légale contre le licenciement. Non pas que son licenciement soit interdit, mais il demeure soumis à une procédure spéciale dont l’autorisation préalable de l’inspection du travail.

A défaut d’autorisation, ou en cas d’annulation de celle-ci, le salarié protégé a le droit de demander sa réintégration au sein de l’entreprise.

Notez-le
Le juge qui statuera sur votre demande de réintégration le fera en référé, c’est-à-dire en urgence. En effet la violation du statut protecteur constitue un « trouble manifestement illicite », autrement dit une violation de la loi si importante qu’il convient d’intervenir rapidement pour y mettre fin.

Il s’agit d’un droit à réintégration, ce qui signifie que le salarié protégé a le choix d’en faire usage ou non. Cette réintégration doit être opérée dans l’emploi du salarié ou sur un emploi équivalent. A défaut, l’employeur devra justifier de l’impossibilité de le réintégrer.

Faute pour l’employeur de respecter son obligation de réintégration, le salarié protégé peut alors solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur.

Statut protecteur et résiliation

La résiliation judiciaire consiste à saisir le juge afin qu’il prononce la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur en cas de manquements graves par ce dernier de ses obligations.

Le défaut de réintégration, sans motif légitime, constitue un manquement grave de l’employeur. En effet, celui-ci doit fournir le travail et la rémunération convenus au salarié (protégé ou non) et respecter le statut protecteur.

La résiliation judiciaire du contrat de travail produit les effets d’un licenciement. Cela signifie que la rupture est imputable à l’employeur.

Il convient de distinguer le licenciement nul du licenciement sans cause réelle et sérieuse, dont les effets ne sont pas les mêmes en termes d’indemnisations.

Le licenciement nul est celui qui est prononcé pour un motif illicite (discrimination, atteinte à une liberté fondamentale …). La nullité doit être prévue par un texte (« pas de nullité sans texte »).

Le licenciement nul ouvre droit à l’indemnisation au titre du licenciement d’une part (indemnité de préavis, indemnité de congés-payés, indemnité de licenciement et dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse), et au titre de la violation du statut protecteur d’autre part (indemnité correspondant aux salaires perçus pendant la période de protection. Cette indemnité ne peut être inférieure à 6 mois de salaires et elle est plafonnée à 30 mois de salaires).

Statut protecteur et licenciement nul

Dans l’affaire soumise ici, la Cour de cassation reproche aux juges d’appel d’avoir dit que le licenciement de la salariée protégée est dépourvu de cause réelle et sérieuse. En fait il est nul. La différence est de taille en termes d’indemnisation du préjudice du salarié.

La salariée, conseiller prud’hommes, est licenciée après autorisation de l’inspection du travail. Elle conteste et obtient l’annulation de celle-ci, puis demande sa réintégration.

Il s’agit du premier rappel de la Cour de cassation : l’employeur doit réintégrer le salarié protégé à sa demande soit sur son poste soit sur un poste équivalent. A défaut, il doit justifier de l’impossibilité de proposer la réintégration. Ce qu’en l’espèce l’employeur ne fait pas.

Le second rappel concerne les effets de la résiliation judiciaire du contrat de travail d’un salarié protégé.

La salariée protégée sollicite la résiliation de son contrat face à la persistance du refus de l’employeur de la réintégrer, ce qu’elle obtient, sauf que les juges d’appel considèrent qu’il s’agit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Cassation obligée : le défaut de réintégration constitue une violation du statut protecteur, et en cas de résiliation judiciaire celle-ci produit les effets d’un licenciement nul.


Cour de cassation, chambre sociale, 17 mars 2021 n° 19-19.446 (la résiliation judiciaire prononcée aux torts de l'employeur qui refuse de réintégrer un salarié protégé licencié sans autorisation produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur)