Terme du CDD d’un salarié protégé : la procédure d’autorisation évolue

Publié le 11/05/2018 à 08:00 dans Protection des RP.

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L'arrivée du terme du contrat de travail à durée déterminée d’un salarié protégé n'entraîne sa rupture qu'après constatation, par l'inspecteur du travail, que le salarié en question n’a pas fait l'objet d'une mesure discriminatoire en raison du mandat détenu. Mais que se passe-t-il réellement en cas d’omission ? Depuis le 1er avril 2018, les cas de saisine de l’inspecteur du travail ont été limités.

Fin de CDD d’un salarié protégé et procédure d’autorisation : la nullité de la rupture rime avec constitutionnalité

Pour rappel, la fin de CDD d’un salarié protégé est soumise à une procédure d’autorisation (Code du travail, art. L. 2421-8):

  • lorsque l’employeur envisage de rompre le CDD de manière anticipée (dans des cas de faute grave ou de reconnaissance d’inaptitude en cours de contrat par le médecin du travail) ;
  • lorsque l’employeur décide « discrétionnairement » de ne pas renouveler ledit CDD et ce, que ce dernier comporte ou non une clause de renouvellement ;
  • lorsque l’employeur est « paradoxalement » non autorisé à renouveler ledit contrat (exemple : atteinte de la durée maximale fixée pour le contrat en cause compte tenu du motif de recours).

A défaut, et en cas de non-respect desdites dispositions, la relation de travail est réputée se poursuivre sous le régime du contrat à durée indéterminée. Ainsi, sa rupture est considérée comme nulle.

Par conséquent, le salarié en cause peut alors prétendre, outre le versement des indemnités de rupture dites « classiques » en matière de CDD à :

  • une indemnité réparant le préjudice résultant du caractère illicite de la rupture ;
  • une indemnité forfaitaire spécifique au titre de la violation du statut protecteur (indemnité égale aux salaires que le salarié aurait dû percevoir jusqu’à l’expiration de la période de protection).

Un employeur a tenté de s’exonérer de ladite sanction par le biais d’une question prioritaire de constitutionnalité.
Ainsi, il entendait argué que la sanction pécuniaire automatique et forfaitaire prévue en cas de méconnaissance de la procédure d’autorisation portait atteinte :

  • « aux droits et libertés garantis par la Constitution de la République française ;
  • et, notamment, aux principes d'individualisation et de personnalisation des sanctions, de proportionnalité et de nécessité des délits et des peines résultant des articles 1er, 8 et 16 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 ».

En réponse, la Cour de cassation n’a retenu, dans la rédaction dudit article et des conséquences qui en découlent, aucun risque de non-conformité à la Constitution française.

Elle expose, premièrement que, « la disposition subordonnant la rupture, à l’arrivée de son terme, du CDD d’un salarié investi d’un mandat de représentant du personnel ou d’un syndicat à l’autorisation préalable de l’inspecteur du travail trouve son fondement dans l’exigence constitutionnelle de participation des travailleurs à la gestion des entreprises ».

Deuxièmement, et concernant le versement de l’indemnité forfaitaire liée à la violation du statut protecteur, la Cour écarte toute atteinte au principe d’individualisation des sanctions.

En effet, « la poursuite de la relation contractuelle dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée qui, pour cette raison, résulte nécessairement de la méconnaissance de cette disposition et se traduit par un droit à indemnisation réparant l’intégralité du préjudice subi pendant tout le temps de la protection conférée par le mandat, ne constitue pas une sanction au sens de l’article 8 de la Déclaration de 1789 ».

Le Conseil Constitutionnel ne sera donc pas sollicité.

Arrêt de Cour de cassation chambre sociale, 22 mars 2018, n° 17-24.193

Fin de CDD d’un salarié protégé et procédure d’autorisation : la nullité de la rupture se trouve in fine privée de base légale

La loi de ratification des ordonnances Macron, modifie, a contrario des principes énoncés ci-dessus, la rédaction de l’article litigieux.

En effet, la nouvelle rédaction du texte aboutit à supprimer purement et simplement l’obligation de saisine de l’inspection du travail du fait de l’arrivée du terme CDD. Ce dernier énonce que : « le salarié bénéficie de la protection lorsque l'employeur envisage soit de rompre le contrat de travail avant l'échéance du terme, soit de ne pas le renouveler en non-respect d'une clause de reconduction prévue dans le contrat de travail, ou par accord d'entreprise ou accord de branche mentionné à l'article L. 1244-2-2 ».

Par conséquent, la saisine et le contrôle de l’inspecteur du travail se trouveront limités :

  • aux salariés protégés et dont le CDD fait l’objet d’une rupture anticipée (cf ci-dessus) ;
  • aux salariés ne voyant pas leur contrat renouvelé malgré l’existence d’une clause en ce sens ;
  • aux saisonniers.

Ainsi, cette modification, entrée en vigueur à 7 jours près, limitera considérablement la portée de la jurisprudence précitée.


Cour de cassation chambre sociale, 22 mars 2018, n° 17-24.193 (rejet d’une QPC concernant les dispositions sanctionnant le défaut d’autorisation de fin de CDD d’un salarié protégé)

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Stéphanie Roujon-Paris

De formation supérieure en droit social éprouvée, sur le terrain, par des années d'application quotidienne du droit du travail, des relations sociales et de la négociation collective, j’ai toujours …