Absence de visite de reprise et accident du travail : l’employeur ne peut pas licencier le salarié pour absence injustifiée
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La protection accordée à un salarié victime d’un accident du travail joue tant que la visite de reprise auprès du médecin du travail n’a pas été réalisée. Et cela même si le salarié n’envoie plus de justificatif d’arrêt de travail !
Accident du travail : protection contre le licenciement pendant la suspension du contrat
Le salarié victime d’un accident de travail bénéficie d’un régime particulier.
Tout d'abord, celui-ci se retrouve dans une fiction juridique lorsque son arrêt de travail est supérieur à 30 jours. Ainsi, le salarié demeure en arrêt de travail jusqu’à sa visite de reprise, réalisée par le médecin du travail, laquelle met fin à la période de suspension du contrat.
Tant que la visite médicale de reprise n'est pas passée, le salarié est toujours considéré en période de suspension de contrat et bénéficie notamment de la protection contre le licenciement.
Cette protection limite les capacités de l’employeur à rompre le contrat du salarié. En effet, pendant la période de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut licencier un salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, et ce, sous peine de nullité, sauf en cas de faute grave ou d’impossibilité de maintenir le contrat.
La faute grave est celle qui rend impossible la poursuite de la relation de travail et justifie un licenciement immédiat, sans préavis ni indemnité de licenciement. Pendant la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, l'employeur peut seulement, dans le cas d'une rupture pour faute grave, reprocher au salarié des manquements à son obligation de loyauté.
Il a déjà été jugé que commet une faute grave justifiant son licenciement le salarié qui ne justifie pas auprès de son employeur d'une prolongation d'arrêt de travail et refuse de se présenter à la visite de reprise.
Pour autant, qu’en est-il lorsque le salarié ne justifie plus de ses prolongations d’arrêt de travail mais qu’aucune visite de reprise n’a été organisée par l’employeur ? L’absence « injustifiée » caractérise-t-elle ici une faute grave permettant le licenciement du salarié ?
Illustration.
Accident du travail : l’absence de visite de reprise ne permet pas à l’employeur de licencier le salarié
En l’absence de visite de reprise organisée par l’employeur, le contrat de travail demeure suspendu et l’employeur ne peut reprocher au salarié son absence ni le licencier pour ce motif. L’absence de justificatif d’arrêt de travail ne constitue pas, par ailleurs, un manquement à l’obligation de loyauté permettant de rompre le contrat de travail au cours d’une période de suspension.
C’est ainsi que s’est prononcée la Cour de cassation dans un arrêt récent qui opposait un salarié victime d'un accident du travail, et son employeur qui le licencie pour faute grave pour absence injustifiée, au motif que le salarié ne produisait plus d’arrêt de travail depuis le 1er novembre 2013. En effet, le salarié, en arrêt à la suite de son accident de travail, n’a plus produit de justificatif et n’a pas répondu à deux mises en demeure de son employeur.
A l’appui de son action, le salarié conteste la nullité de son licenciement en estimant que l’absence injustifiée reprochée n’était pas justifiée car même en l’absence de certificat d’arrêt de travail seule la visite de reprise organisée par le médecin du travail peut mettre fin à la suspension de son contrat.
La cour d’appel de Paris va considérer que le salarié aurait dû manifester son intention de reprendre le travail afin que l’employeur organise une telle visite. Ce qui n’était pas le cas. Le salarié était donc bien en absence injustifiée et cela justifiait le licenciement pour faute grave.
Mais les hauts magistrats vont casser la décision de la cour d’appel. En effet, les magistrats rappellent que seule la visite de reprise, pratiquée par le médecin du travail, met fin à la période de suspension du contrat de travail provoquée par un accident du travail.
L’employeur ne peut reprocher au salarié son absence. De plus, aucun manquement du salarié à son obligation de loyauté n’a été caractérisé par la cour d’appel. De ce fait, le licenciement prononcé à l’encontre du salarié est nul.
Pour toutes vos questions relatives à la protection accordée aux accidentés du travail, les Editions Tissot vous conseillent leur documentation :
Cour de cassation, chambre sociale, 1er juin 2023, n° 21-24.269 (en l’absence de visite de reprise organisée par l’employeur, le contrat de travail demeure suspendu et l’employeur ne peut reprocher au salarié son absence ni le licencié pour ce motif)
Juriste droit social
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