Accident du travail postérieur à la réception de la lettre de licenciement : quel effet ?

Publié le 08/03/2023 à 09:12 dans Accident du travail.

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Lorsque le salarié est victime d’un accident du travail, il bénéficie d’une protection contre les mesures de licenciement que l’employeur pourrait prendre à son encontre pendant son arrêt de travail. L’employeur risque ainsi la nullité du licenciement. Mais qu’en est-il lorsque le salarié a déjà reçu sa lettre de licenciement lorsqu’il est victime d’un tel accident ?

Accident du travail et licenciement : rappel du principe de protection

Un accident du travail est un accident qui survient « par le fait ou à l'occasion du travail » du salarié, quelle qu'en soit la cause.

Pour que l'accident du travail soit reconnu, deux conditions doivent être réunies :

  • le salarié doit avoir été victime d'un « fait accidentel » dans le cadre de son activité professionnelle ;
  • ce fait accidentel soudain doit avoir entraîné l'apparition d'une lésion.

Le salarié victime d’un tel accident bénéficie d'une protection particulière contre les mesures de licenciement que l’employeur peut prendre contre lui pendant son arrêt de travail. Ainsi, l'employeur ne peut licencier un salarié victime d'un accident du travail qu’en cas de faute grave ou impossibilité de maintenir le contrat. À défaut, le licenciement est nul.

Certaines situations ont amené les juges à se prononcer sur le périmètre d’application de cette protection et notamment lorsque l’accident de travail survient alors que la procédure de licenciement est déjà engagée voire prononcée.

Ainsi le salarié reste protégé contre le licenciement alors que son accident de travail survient après qu’il ait reçu une convocation pour un entretien préalable à licenciement.

La solution est un peu différente lorsque le salarié a déjà reçu sa lettre de licenciement lorsqu’il est victime d’un accident de travail. Dans un tel cas, le licenciement n’est pas nul. Les effets du licenciement sont seulement reportés à l’issue de la période de suspension de son contrat provoquée par l’effet de son arrêt.

Toutefois … faut-il encore que l’accident soit bien qualifié d’accident du travail !

C’est à ce sujet que s’est prononcée la Cour de cassation dans une affaire du 25 janvier dernier.

Pas de suspension du licenciement après l’envoi de la lettre de licenciement sans apprécier que l'arrêt de travail est en relation avec un accident du travail

Dans cette affaire, une salariée, engagée en qualité d'attachée commerciale, est licenciée pour cause réelle et sérieuse le 2 novembre 2015. Elle informe son employeur avoir été victime d’un accident du travail ce même 2 novembre et conteste son licenciement en justice.

La cour d’appel suspend les effets du licenciement jusqu’à la date de la fin de l’arrêt de travail de la salariée, appliquant ainsi les mesures protectrices applicables au salarié victime d’un accident de travail.

L’employeur conteste et fait valoir que la salariée ne rapporte aucune preuve du caractère professionnel de son accident, la CPAM lui ayant refusé une telle qualification corroborée par la décision de rejet de la commission de recours amiable contre la décision de refus de la CPAM.

Ainsi, en l’absence de toute décision de prise en charge d'accident du travail susceptible de qualifier l’arrêt de travail comme un accident du travail, celui-ci n’en était pas un et la protection contre le licenciement ne pouvait s’appliquer.

La Cour de cassation le suit. Les hauts magistrats rappellent qu’en effet, lorsque la lettre de licenciement est envoyée au salarié avant qu'il ne soit victime d'un accident du travail, les effets du licenciement prononcé pour une autre cause que la faute grave ou l'impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie sont reportés à l'expiration de la période de suspension. Toutefois la cour d’appel aurait dû vérifier si les éléments produits par la salariée caractérisaient l’existence d’un accident de travail. De ce fait l’affaire est renvoyée devant une autre cour d’appel pour être rejugée.

Pour toutes vos questions relatives à la protection accordée aux accidentés du travail, les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « Santé sécurité au travail ACTIV ».


Cour de cassation, 25 janvier 2023, n° 21-17.791 (lorsque la lettre de licenciement a été envoyée au salarié avant qu'il ne soit victime d'un accident du travail, les effets du licenciement sont reportés à l'expiration de la période de suspension du contrat de travail consécutive à cet accident. Faut-il encore que l’accident de travail soit réellement qualifié comme tel)

Audrey Gillard

Juriste droit social