De nouveaux aiguillages sur la caractérisation du préjudice d’anxiété
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Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.
Accessible à tous les salariés, la reconnaissance du préjudice d’anxiété oscille entre la présomption et la démonstration. Se retrouvent alors tenus à une exigence de preuve les salariés n’ayant pas travaillé dans un établissement ouvrant droit à l’allocation de cessation anticipée d'activité (ACAATA). Quels sont les motifs susceptibles de le caractériser ? Retour sur trois récentes décisions de la Cour de cassation.
Indemnisation du préjudice d’anxiété : les règles applicables aux salariés inéligibles à l’ACAATA
Depuis 2019, les salariés non éligibles à l’ACAATA peuvent demander réparation de leur préjudice d’anxiété.
Rappel
Le préjudice d'anxiété permet de réparer l'ensemble des troubles psychologiques résultant du risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l’exposition à un agent nocif.
Pour cela, il faut caractériser un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité en établissant :
- une exposition à l’amiante ou à une autre substance nocive/toxique générant un risque élevé de développer une pathologie grave ;
- un préjudice d’anxiété personnellement subi résultant de cette exposition.
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Indemnisation du préjudice d’anxiété : les règles applicables aux salariés inéligibles à l’ACAATA
Depuis 2019, les salariés non éligibles à l’ACAATA peuvent demander réparation de leur préjudice d’anxiété.
Rappel
Le préjudice d'anxiété permet de réparer l'ensemble des troubles psychologiques résultant du risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l’exposition à un agent nocif.
Pour cela, il faut caractériser un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité en établissant :
- une exposition à l’amiante ou à une autre substance nocive/toxique générant un risque élevé de développer une pathologie grave ;
- un préjudice d’anxiété personnellement subi résultant de cette exposition.
Notez le
Depuis un important arrêt du 8 février 2023, les salariés peuvent dorénavant envisager une action en réparation en invoquant un manquement de l’employeur à son obligation de loyauté (voir sur ce sujet : Exposition à l’amiante : condamnation de l’employeur en raison d’un manquement à son obligation de loyauté).
Dès lors, la réalité du préjudice d’anxiété ne peut être déduite de la seule exposition au risque de développer une pathologie grave. Le salarié doit, au contraire, démontrer que sa connaissance de ce risque a engendré chez lui des troubles psychologiques.
Reposant sur des éléments personnels et circonstanciés, la caractérisation du préjudice d’anxiété est un sujet régulièrement présenté à la Cour de cassation. En témoignent ces trois nouvelles décisions.
Rappel des faits
Les faits rapportés aux juges de la Cour de cassation sont relativement similaires.
Un ou des salariés, parfois décédés au jour du jugement, ont été exposés à l’amiante sur leur lieu de travail. Ces derniers saisissent la juridiction prud’homale pour obtenir une réparation de leur préjudice d'anxiété. En appel, toutes les affaires se soldent par la condamnation de l’employeur.
Les pourvois formés sont alors soutenus par un même argument : les salariés n’ont pas caractérisé l’existence d’un préjudice d’anxiété personnellement subi et résultant du risque élevé de développer une pathologie grave.
La Cour de cassation va alors, selon les cas d’espèce, s’aligner ou s’opposer aux solutions rendues par les cours d’appel. De quoi orienter les futures parties dans la réalisation de cet exercice exigeant.
Première affaire
Dans cette première affaire, la cour d’appel justifiait cette caractérisation au motif que de nombreux salariés avaient été atteints d'affections consécutives à une exposition à l'amiante. Affections qui, par ailleurs, avaient été prises en charge au titre de la législation sur les risques professionnels. La Cour de cassation censure ce raisonnement. Les éléments présentés étaient insuffisants pour caractériser le préjudice d’anxiété.
Deuxième affaire
Dans cette seconde affaire, la cour d’appel considérait que la réalité du préjudice d’anxiété était établie puisque le salarié, ayant été exposé à l'inhalation de poussières d'amiante, se trouvait de ce fait en proie à l'inquiétude permanente de développer une maladie. Encore une fois, la Cour de cassation écarte cette motivation. Cette simple déduction n’est pas assez probante.
Troisième affaire
La Cour de cassation adopte une position plus nuancée pour ce dernier litige.
Elle considère, en premier lieu, que le préjudice d’anxiété était caractérisé à l’égard de trois salariés.
Et pour cause, ces derniers faisaient état :
- d’une exposition à l’agent nocif ;
- de l'existence d'un suivi médical post-exposition ;
- de la révélation d’un résultat significatif à la suite de ce suivi médical.
Illustration
Le premier d’entre eux bénéficiait d'un suivi médical régulier et souffrait d'une grande anxiété qui avait été renforcée par la révélation d'un épaississement pleural.
Le second faisait l'objet d'un suivi médical très régulier ayant mis en évidence l’existence de micro-nodules. Il produisait également un courrier d'un médecin constatant qu’il avait été fortement exposé aux poussières d'amiante.
Le troisième exposait que son suivi médical avait révélé la présence d’un nodule alvéolaire et d’une formation spiculée scissurale nécessitant un contrôle dans six mois.
De même, elle juge que l’existence du préjudice était démontrée pour les salariés ayant présenté certaines attestations. Établies par des proches ou par leur médecin traitant, celles-ci relataient les manifestations de leurs troubles psychologiques : état d'inquiétude, état anxio-dépressif, état de crainte de pathologie pulmonaire, peur de déclarer un cancer lié à l'amiante, stress de se savoir en sursis.
Concernant une autre partie des salariés, les juges reconduisent un raisonnement déjà vu. Une simple déduction est insuffisante pour caractériser ce préjudice. En conséquence, une réparation ne pouvait être accordée au seul motif que les salariés, du fait d’une exposition régulière et durable à l'amiante, étaient forcément anxieux et que cette anxiété était réactivée dans certaines circonstances (contrôle médical, connaissance de problèmes de santé des anciens collègues en lien avec l’exposition).
Bon à savoir
N’oubliez pas que les opérations de traitement d’amiante doivent être saisies sur la plateforme DEMAT@MIANTE depuis le 1er février 2023.
Pour vous accompagner dans la réalisation des démarches liées à l’amiante, les Editions Tissot vous suggèrent leur documentation « Santé sécurité au travail ACTIV ».
Cour de cassation, chambre sociale, 29 mars 2023, n° 21-13.988 et suivants, n° 21-14.824, n° 21-20.343 (le préjudice d'anxiété, qui ne résulte pas de la seule exposition au risque créé par une substance nocive ou toxique, est constitué par les troubles psychologiques qu'engendre la connaissance du risque élevé de développer une pathologie grave par les salariés)
Juriste en droit social et rédacteur au sein des Editions Tissot
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