Défaut de vaccination obligatoire : la suspension du contrat contestée ?
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Défaut de vaccination obligatoire : une suspension du contrat
Depuis le 16 octobre, dans les secteurs soumis à la vaccination obligatoire, il est nécessaire de disposer d’un schéma vaccinal complet pour continuer à travailler (ou ne pas y être soumis en raison de contre-indication médicale ou d’un rétablissement après une contamination).
- pour les personnes qui exercent dans les établissements soumis à l’obligation vaccinale (établissements de santé, résidences-services dédiées à l’accueil des personnes âgées ou handicapées, établissements et services médico-sociaux, etc.) ;
- mais aussi pour celles dont la profession est soumise à l’obligation (sapeurs-pompiers, ostéopathe, psychothérapeute, etc.).
L’employeur doit contrôler le respect de l’obligation de vaccination des personnes sous sa responsabilité en demandant les documents nécessaires : justificatif de statut vaccinal, certificat de rétablissement ou certificat médical de contre-indication.
Si un travailleur n’a pas les justificatifs nécessaires, il doit l’informer sans délai des conséquences et des moyens de régulariser sa situation. Le salarié qui fait l'objet d'une interdiction d'exercer peut utiliser, avec l’accord de l’employeur, des jours de repos conventionnels ou des jours de congés payés. A défaut, son contrat de travail est suspendu.
La durée de la suspension du contrat de travail n’est pas assimilable à une période de travail effectif et n’est pas rémunérée.
Attention, il n’y a pas de date de fin pour la vaccination obligatoire à l‘image de ce qui existe pour le pass sanitaire.
Suspension du contrat pour défaut de vaccination : les doutes des juges
Les premières contestations des salariés dont le contrat de travail a été suspendu pour défaut de vaccination commencent à émerger. Intéressons-nous particulièrement à deux affaires dans lesquelles deux salariées ont agi en référé devant les conseils de prud’hommes de Troyes et Saint-Brieuc. Elles ont demandé qu’il soit fait interdiction à l’employeur de suspendre leur contrat de travail (en invoquant attendre la mise sur le marché du vaccin SANOFI) et en parallèle ont déposé une question prioritaire de constitutionnalité. Parmi les arguments cités : la nécessité de faire respecter les conventions internationales qui interdisent de priver le travailleur d’une rémunération par différents artifices et notamment une suspension arbitraire du contrat.
La loi prévoit un double filtre : la QPC est d'abord examinée par le juge du fond, puis par la Cour de cassation ou le Conseil d'Etat.
Les deux conseils de prud’hommes ont décidé de faire suivre à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité.
Plusieurs conditions doivent être remplies pour qu’une QPC soit recevable notamment que :
- la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux (incontestable ici) ;
- que la disposition législative critiquée n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel. Ici le conseil de prud’hommes de Troyes a considéré cette condition remplie car le Conseil constitutionnel ne s’est pas prononcé sur l’article 14-II de la loi qui prévoit la suspension mais sur l’article 14-1 A relatif à l’obligation vaccinale elle-même.
Dans une de ces affaires la salariée était en arrêt maladie ; or le conseil de prud’hommes de Saint-Brieuc a relevé que la loi ne précise pas la durée et l’issue de la suspension du contrat de travail dans ce cas. Il a donc carrément décidé de suspendre l’obligation vaccinale jusqu’à la décision de la Cour de cassation ou du Conseil Constitutionnel.
La Cour de cassation a maintenant 3 mois pour décider si elle renvoie la QPC devant le Conseil constitutionnel qui aurait alors lui-même 3 mois pour se prononcer. On devrait donc y voir plus clair au printemps prochain. A suivre !
Loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, Jo du 6
Conseil de prud’hommes de Saint-Brieuc, formation de référés, 12 octobre 2021, minute n° 226-2021
Conseil de prud’hommes de Troyes, section référé, 5 octobre 2021, minute n° 21-00031
Décision du Conseil constitutionnel n° 2021-824 DC du 5 août 2021
Juriste en droit social
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