Départ anticipé à la retraite pour pénibilité : l’impact de la réforme du compte de prévention de la pénibilité

Publié le 14/02/2018 à 08:15 dans Obligations de l’employeur.

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Le salarié peut partir à la retraite de manière anticipée dans trois cas : pour carrière longue, s’il souffre d’un handicap lourd et, depuis 2011, pour pénibilité avérée à un ou plusieurs facteurs de risques figurant au compte de pénibilité. L’une des ordonnances Macron a réformé le compte de prévention de la pénibilité (du C3P au C2P) notamment en retirant 4 risques d’expositions sur 10.

Compte tenu du fait que la retraite anticipée pour pénibilité est liée à l'apparition d‘une maladie professionnelle résultant d’une exposition à un des risques figurant au compte de pénibilité, quel est l’impact de cette réforme sur la retraite anticipée pour pénibilité ? Toutes les maladies professionnelles permettent-elles au salarié de bénéficier de ce départ anticipé ?

Départ anticipé à la retraite pour pénibilité : le point sur la réforme du compte pénibilité

L’employeur est titulaire d’une obligation de préserver la santé de ses salariés. Les risques induits par le travail qu’il leur confie doivent être anticipés, les moyens de protection et mesures de préventions doivent être suffisants pour éviter que le travail ne cause un dommage au salarié.

A cet effet, le compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P) a été créé afin d’obliger l’employeur à déclarer à la caisse de retraite les risques auxquels étaient exposés ses salariés.

Les facteurs de pénibilité étaient alors au nombre de 10 :

  • travail de nuit ;
  • travail en équipe successives ;
  • travail répétitif caractérisé par la répétition d'un même geste, à une fréquence élevée et sous cadence contrainte ;
  • activités en milieu hyperbare ;
  • activités exposant le salarié à des températures extrêmes ;
  • exposition au bruit ;
  • manutentions manuelles de charges ;
  • postures pénibles définies comme positions forcées des articulations ;
  • vibrations mécaniques ;
  • agents chimiques dangereux.

Sous couvert d’un système trop complexe, les ordonnances Macron a transformé le C3P en C2P (compte de prévention de la pénibilité). L’une des modifications majeures tient au fait que ce nouveau compte contient 6 risques au lieu de 10. Ne sont plus considérés comme des facteurs de risques entraînant une pénibilité et donc octroyant des points pour le salarié exposés (voir infra), les risques suivants :

  • manutentions manuelles de charges ;
  • postures pénibles définies comme positions forcées des articulations ;
  • vibrations mécaniques ;
  • agents chimiques dangereux.

Ce compte (C3P ou C2P) permet pourtant au salarié exposé aux risques qui y figurent, d’acquérir des points lui permettant par la suite :

  • soit de changer de métier pour occuper un emploi moins pénible ;
  • soit de bénéficier d’une activité à temps partiel ;
  • soit encore de bénéficier de manière anticipée d’un départ à la retraite avant l’âge légal.

Compte tenu du fait que le salarié ne peut plus voir inscrire de point dans son C2P résultant de son exposition aux 4 facteurs de risques sortis du compte, peut-il encore bénéficier d’une retraite anticipée pour pénibilité lorsqu’il développe une maladie professionnelle en lien avec une exposition à un de ces risques ? A priori oui et un arrêté devait fixer la liste des maladies professionnelles concernées. C’est désormais chose faite.

Départ anticipé à la retraite pour pénibilité : exposition à des risques ne figurant pas au compte de pénibilité

Pour prétendre à un départ anticipé à la retraite pour pénibilité, l'assuré doit justifier :

  • soit d’un taux d'incapacité physique permanente (IPP) d'au moins 20 % au titre d'une maladie professionnelle ou d'un accident de travail ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle ;
  • soit d’un taux d’IPP compris entre 10 et 20 % sous réserve d'avoir été exposé pendant au moins 17 ans à un ou des facteurs de risques professionnels ouvrant droit à un compte personnel de pénibilité.

De ce fait, et depuis la réforme du compte de pénibilité, le salarié dont le taux d’IPP est compris entre 10 et 20 % en raison de son exposition à un des 6 facteurs de risques figurant au C2P, dont l’exposition a duré au moins 17 ans et qui prouve qu’il existe un lien direct entre l’IPP et l’exposition à ces facteurs, peut bénéficier d’un départ anticipé à la retraite.

Le salarié qui dispose du même taux d’IPP en raison d’une exposition à un des 4 facteurs non compris dans le C2P depuis la réforme du 22 septembre 2016 (voir supra) peut également bénéficier d’une retraite anticipée mais de manière simplifiée. Ainsi, il n’a pas à justifier d’une exposition pendant 17 ans et n’a pas à établir de lien entre l’IPP et l’exposition au risque.

Seule condition : les maladies professionnelles ouvrant droit à la retraite anticipée doivent être inscrites sur une liste fixée par arrêté. C’est ainsi qu’un arrêté du 26 décembre 2017 fixe la liste des maladies professionnelles ouvrant droit à un départ anticipé à la retraite pour le salarié dont le taux d’IPP est fixé entre 10 et 20 %.

Ces maladies professionnelles sont soient celles figurant aux tableaux de maladies professionnelles, soit les maladies admises via le système complémentaire de reconnaissance des maladies professionnelles et imputables à un ou plusieurs de ces 4 risques.

Notons qu’avant la réforme du compte de pénibilité, le salarié contractant une maladie professionnelle en raison de son exposition à un des 10 facteurs de risques (dont les 4 aujourd’hui exclus du C2P) devait justifier, si le taux d’IPP était entre 10 et 20 % d’une exposition depuis 17 ans et d’un lien entre cette exposition et le taux d’IPP…

Gageons que le système actuel soit plus favorable au salarié.

Négociation sur les facteurs de risques : avant/après les ordonnances Macron

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En savoir plus sur ce dossier spécial

Arrêté du 26 décembre 2017 fixant la liste des maladies professionnelles mentionnées aux articles L. 351-1-4 du code de la sécurité sociale et L. 732-18-3 du code rural et de la pêche maritime, JO du 29 décembre
Ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 relative à la prévention et à la prise en compte des effets de l'exposition à certains facteurs de risques professionnels et au compte professionnel de prévention, Jo du 23

Audrey Gillard

Juriste droit social