Diagnostic RPS : le cas d’un service de gestion d’assurance

Publié le 18/01/2017 à 08:07, modifié le 07/12/2020 à 11:57 dans Risques psychosociaux.

Temps de lecture : 5 min

Contenu ancien

Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.

Voici un exemple de cas de diagnostic risques psychosociaux et de plan d’actions menés en interne au sein d’un service de gestion d’une entreprise.

Les faits

Alerté par de nombreuses remontées émanant de salariés se plaignant d’une charge de travail trop importante, le comité d’établissement de l’entreprise a donné mission au CHSCT de réaliser une inspection au sein d’un service de gestion dans les meilleurs délais. Le but de cette inspection était alors d’analyser les conditions de travail des salariés du service et de recueillir auprès d’eux toutes les informations sur les difficultés rencontrées. Il s’agit d’un service de gestion en assurance dont les 25 salariés gèrent les dommages corporels occasionnés par divers accidents (accident de la route, morsures de chiens, incendie, etc.).

Le CHSCT se réunit et détermine une méthodologie d’enquête pour répondre à la demande du CE. Il est acté qu’un questionnaire sera adressé à tous les salariés et que ces derniers seront également reçus en entretien collectifs et individuels par le psychologue du travail et un membre du CHSCT. Parallèlement, la direction métier analysera les indicateurs clés du service objectivant la charge de travail.

Un stress élevé et une motivation faible

D’un point de vue méthodologique, la passation d’un questionnaire auprès de 25 personnes ne permet pas de garantir une grande fiabilité des résultats. Ce questionnaire a surtout été proposé pour répondre à une demande des membres du CHSCT et servir d’amorce pour engager le dialogue qui interviendrait lors des entretiens individuels et collectifs. Malgré l’écueil méthodologique, le questionnaire dont le taux de participation était de 100 % a permis de distinguer des niveaux de stress et de motivation différents en fonction des types de gestionnaires. Ainsi, les gestionnaires « généralistes » déclaraient un niveau de motivation au travail faible et un stress moyennement élevé, et les gestionnaires « experts » déclaraient un niveau de motivation au travail moyen et un stress élevé.

Une charge de travail en baisse mais un effectif moins important

L’analyse des indicateurs de charge de travail révélait quant à elle une diminution de plus de 20 % de prises d’appels et de dossiers traités mais une diminution sur les trois dernières années de plus de 25 % de l’effectif (départs en retraite non remplacés).

Les entretiens individuels et collectifs menés à la suite du questionnaire ont permis de mettre en avant les éléments suivants :

  • la multiplicité des process et le nombre croissant de tâches qu’elle génère ;
  • l’aspect décourageant de la « corbeille » dans laquelle ils reçoivent en non-stop les demandes de traitement de dossiers. Le nombre de dossiers étant parfois supérieur en fin de journée qu’au début de journée ;
  • la crainte de faire des erreurs ;
  • des pics d’activité plus fréquents et une activité qui globalement se densifie et ne permet pas de « reprendre son souffle » ;
  • le sentiment d’inutilité et l’aspect chronophage des nombreuses réunions (réunions flashs, réunion d’équipe, réunion Groupe, réunion mensuelle, etc.) ;
  • la répartition arbitraire des dossiers conduisant à surcharger les plus performants et contribuer à un sentiment d’injustice au sein des équipes ;
  • les contacts de plus en plus « musclés » avec les sociétaires ;
  • le traitement de situation lourde émotionnellement : décès et handicap notamment.

Quel plan d’actions ?

La Direction, très impliquée sur ce dossier, a choisi de mettre en place un plan d’actions comprenant une série de mesures de prévention primaire, secondaire et tertiaire.

Ainsi, en prévention primaire, les actions suivantes ont été décidées :

  • transfert d’une partie de la charge de travail vers un service de gestion d’une autre région en attendant la montée en compétences des deux gestionnaires encore en formation ainsi que le recrutement d’un alternant afin d’aider à traiter les activités moins complexes et permettre aux gestionnaires les plus anciens de pouvoir transmettre leur expérience et jouer un rôle de sachant ;
  • création de groupes de réflexion, ayant pour mission d’analyser l’activité des gestionnaires. La finalité de ces groupes était de trouver des solutions pour alléger les procédures, échanger sur les bonnes pratiques, réfléchir aux tâches sans valeur ajoutée. Les travaux seront présentés au comité de direction ;
  • la mise en place d’un temps dédié à l’approfondissement des connaissances et la mise à disposition d’un « espace calme » permettant de s’isoler pour la réflexion et le travail seul ou en groupe.

Les actions de prévention secondaire étaient les suivantes :

  • formation aux nouveaux modes de gestion pour répondre aux évolutions du métier de gestionnaire : le mail et le contact téléphonique ont remplacé la rédaction et l’envoi de courrier, les pratiques de gestion également ;
  • les gestionnaires ayant fait part de tensions parfois fortes avec le public, une formation à la gestion des incivilités a été proposée ;
  • certains gestionnaires ont fait part des difficultés auxquelles ils peuvent être confrontés lorsqu’ils traitent un dossier « lourd » aux conséquences sociales et humaines difficiles. Une formation à la prise de distance et à la gestion des émotions a été proposée.

Les actions de prévention tertiaire :

  • une cellule d’écoute a été mise à disposition ;
  • une revue du personnel a été organisée par le médecin du travail.



Benjamin Chaillou
Consultant