Discrimination au travail, un risque important de dépression

Publié le 07/06/2023 à 07:02 dans Risques psychosociaux.

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Une étude relayée en avril 2023 par le centre national de recherche sur l’environnement de travail (NFA) du Danemark montre que les discriminations sur le lieu de travail sont des facteurs de risque d’apparition de troubles dépressifs. En France, près du quart de la population active déclare avoir vécu une discrimination dans l’emploi.

Rares sont les recherches concernant les effets sur la santé des discriminations au travail, qu’elles soient en fonction du sexe, de l’âge, de l’origine, des convictions religieuses, de l’état de santé ou encore de l’orientation sexuelle.

Des chercheurs danois spécialisés en santé au travail se sont penchés sur la question. Ils ont interrogé près de 9000 travailleuses et travailleurs danois afin d’identifier d’une part le nombre de personnes exposées à une discrimination au travail au cours des 12 mois précédents l’enquête et d’autre part l’impact de ces discriminations sur la santé mentale des victimes, en particulier les troubles dépressifs.

Les femmes plus touchées que les hommes

Le centre national de recherche sur l’environnement de travail rappelle que la discrimination au travail revêt de nombreuses formes, plus ou moins insidieuses. Il peut s’agir d’un commentaire grossier de la part d’un client, de remarques humiliantes ou encore de la blague déplacée d’un collègue.

Au total, près de 5 % des personnes interrogées ont déclaré avoir été victimes de discriminations au travail au cours des 12 mois précédents. L’étude montre que les femmes sont davantage concernées par une discrimination sur le lieu de travail, avec 6 % de femmes ayant souffert de discrimination contre 3,7 % chez les hommes.

Un risque de dépression 3 fois plus élevé

Les participants à cette étude prospective ont été invités à répondre à un questionnaire destiné à évaluer l’incidence des troubles dépressifs. Par rapport aux autres répondants, les personnes ayant déclaré avoir été victimes de discrimination sont 2,7 fois plus susceptibles de développer un trouble dépressif au cours de la période de suivi de six mois.

L’exposition à une discrimination est clairement un facteur de risque de dépression en lien avec le travail, un risque que les auteurs préconisent de considérer pour la prévention des RPS au travail et plus globalement pour la prévention de la dépression en population générale. D’après une étude du NFA de 2019, près de 7 % des salariés danois ont déclaré avoir été exposés à une discrimination au travail au cours de l’année.

L’étude montre que les salariés se déclarant victime de discrimination travaillent pour la majorité d’entre eux dans les activités de commerce en contact direct avec la clientèle, l’hôtellerie/restauration ou encore l’éducation. La culture et les loisirs ou les soins aux personnes âgées sont également au-dessus de la moyenne nationale en termes de proportion de salariés victimes de discrimination.

Baromètre des discriminations dans l’emploi en France

Chaque année, le Défenseur des droits en France et l’Organisation internationale du travail (OIT) publient conjointement un baromètre de la perception des discriminations dans l’emploi.

D’après la 13ème édition de ce baromètre rendue publique fin 2020, 23 % des personnes actives déclarent avoir vécu au cours de leur vie une discrimination ou un harcèlement discriminatoire. Les principaux critères évoqués sont l’apparence physique (40 %), le sexe (40 %) et l’état de santé (30 %). Un peu plus de 40 % des personnes actives précisent avoir été témoins de discriminations ou de harcèlement discriminatoire.

Cette étude pointe les conséquences délétères de ces expériences sur les individus et leurs parcours de vie. Près de la moitié des personnes actives déclarant avoir été victimes de discriminations ont connu des conséquences négatives sur leur emploi. Et près de la moitié des personnes ayant fait l’expérience de discriminations signalent un sentiment de fatigue, de tristesse, de déprime ou une dégradation de l’état de santé.

Le secteur des services à la personne particulièrement concerné

La dernière édition du baromètre de la Défenseure des droits et de l’OIT, publiée fin 2022, est consacrée aux personnes employées dans le secteur des services à la personne dans lequel 87,3 % des emplois sont occupés par des femmes. Les personnes nées à l’étranger y sont surreprésentées et une part importante de ces employées est à la tête d’une famille monoparentale.

Dans le secteur des services à la personne, 1 travailleuse sur 4 déclare avoir été victime de discrimination au travail que ce soit dans le cadre de la recherche d’emploi ou lors de leur activité professionnelle. Les personnes d’origine étrangère et perçues comme non-blanches sont surreprésentées chez les salariées exposées à une discrimination.

Les conséquences de ces discriminations sont très délétères. Après avoir vécu une discrimination, près de 70% des professionnelles indiquent avoir traversé une période au cours de laquelle leur santé mentale s’est dégradée (tristesse, fatigue, dépression, sentiment d’isolement).

Si les discriminations au travail sont en théorie prohibées, les professionnelles de ce secteur victimes de discrimination engagent beaucoup moins de recours auprès de l’inspection du travail ou des juridictions compétentes que dans d’autres secteurs d’activité. La plupart du temps, elles se confient à leur entourage sans engager de procédures par peur d’éventuelles représailles.

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Etude danoise : Workplace discrimination and onset of depressive disorders in the Danish workforce: A prospective study
Baromètre des discriminations dans le secteur des services à la personne