Durée maximale de travail et violation de l’obligation de sécurité

Publié le 14/02/2023 à 08:39, modifié le 16/02/2023 à 16:41 dans Risques professionnels.

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Dans une récente décision, la Cour de cassation vient rappeler qu’un dépassement de la durée maximale de travail relève d’une violation par l’employeur de son obligation de résultat en matière de santé et de sécurité au travail. C’est un aspect que les entreprises doivent réguler. Explication et décryptage.

Une durée de travail sous surveillance

Un ex-directeur demande à son ancien employeur des dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité résultant du non-respect du mi-temps thérapeutique, des durées maximales de travail et du repos journalier et hebdomadaire.

La cour d’appel l’a débouté de sa demande en lui reprochant notamment de ne pas avoir rapporté la preuve de son préjudice.

Le 14 décembre 2022, la Cour de cassation a rappelé que le seul constat du non-respect des temps de repos quotidien et hebdomadaire et du dépassement d’une durée maximale de 48 heures par semaine – sauf circonstances exceptionnelles – ouvre droit à réparation.

Le salarié n’est donc pas tenu d’apporter la preuve de son préjudice : le simple constat de ces dépassements est de nature à caractériser la violation de l’obligation de sécurité de l’employeur.

Rappel

Les salariés doivent aussi bénéficier d’un repos quotidien d’au moins 11 heures consécutives (Code du travail, art. L. 3131-1) et d’un repos hebdomadaire d’au moins 35 heures consécutives (C. trav., art. L. 3132-2).

Pour toutes vos questions sur la réglementation en santé-sécurité au travail, les Editions Tissot vous proposent leur documentation « Santé et sécurité au travail ACTIV ».

Durée de travail et santé au travail

Quel est le lien entre dépassement d’une durée maximale de travail et obligation de résultat ?

Le collège d’expertise présidé en 2010 par le sociologue Michel Gollac pour déterminer des indicateurs de risques psychosociaux souligne que la durée du travail est un facteur de risque pour la santé.

La durée du travail est un indicateur de l’intensité et de la complexité de celui-ci. En outre, l’exposition à des horaires longs présente un risque accru d’état dépressif, d’anxiété et de difficultés de sommeil.

Par ailleurs, dans les pays d’Asie du Sud-Est, la pratique des horaires longs est suspectée d’être à l’origine de syndrome de Karoshi, à savoir la mort subite par accident vasculaire cérébral (AVC) ou infarctus du myocarde.

Ces dernières décennies, de nombreux travaux de recherche ont mis en évidence des relations de cause à effet entre horaires longs et maladies cardio et cérébro-vasculaires. En 2021, l’organisation mondiale de la santé et l’organisation internationale du travail ont publié une étude mettant en évidence que travailler 55 heures ou plus par semaine est associé à une hausse du risque d’AVC ou de décès dus aux maladies cardiaques.

C’est donc un enjeu de santé au travail. D’ailleurs les dispositions de la directive européenne mentionnées dans l’arrêt de la Cour de cassation visent bien la protection de la santé des salariés.

Réduire la durée du travail

Certaines activités laissent peu de marges de manœuvre. Cependant, il est possible :

  • d’aborder les sujets de temps et d’organisation du travail dans le cadre de la négociation collective ;
  • d’échanger sur ce sujet avec l’inspection du travail, le CSE, les services de prévention et de santé au travail, la CARSAT, l’OPPBTP ou la MSA ;
  • dans tous les cas, de rester vigilant sur l’état de santé et la fatigue de ses salariés pour réagir en cas d’alerte.

Vous pouvez également aborder la problématique sous l’angle de la régulation de la charge de travail et, pour ce faire :

  • discuter sur la charge de travail lors de l’entretien annuel et de points réguliers ;
  • améliorer l’organisation du travail pour la rendre plus efficace ;
  • en particulier, revoir les procédures pour limiter les doublons et laisser plus de place à l’autonomie ;
  • mettre en place un dispositif de recours au service RH en cas de difficulté.

Cour de cassation, chambre sociale, 14 décembre 2022, n° 21-21.411 (le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à la réparation)

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Michaël Bouvard

Chargé de mission qualité de vie au travail

Chargé de mission qualité de vie au travail, j'oeuvre sur différents sujets relevant de ce domaine : prévention et évaluation des risques psychosociaux, prise en compte de la qualité de vie au …