Engager les salariés dans les réflexions post-Covid

Publié le 21/04/2021 à 06:57, modifié le 23/04/2021 à 13:29 dans Risques psychosociaux.

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La crise du Covid-19 rythme depuis plus d’un an le quotidien des salariés. Résultat : nombre d’entre eux affichent aujourd’hui une difficulté croissante à s’impliquer pleinement dans leurs tâches professionnelles. Selon un sondage réalisé à l’automne, 42 % des salariés interrogés expliquent que leur travail leur plaît moins qu’auparavant. Coup dur pour les dirigeants et managers, pour qui impliquer les salariés dans les réflexions à propos des opportunités post-Covid est primordial. Face à cette crise de sens, les recherches en psychologie apportent des pistes de réflexion intéressantes pour motiver les salariés à envisager l’après.

Redonner un sentiment de maîtrise

Après un an passé à subir les changements liés à la progression de la pandémie, beaucoup de salariés se sentent aujourd’hui impuissants et démunis. L’incertitude répétée et durable engendre en effet un sentiment nouveau : celui de manquer de maîtrise par rapport à son quotidien. En d’autres termes, il semble aujourd’hui difficile pour une majorité de personnes de percevoir leur pouvoir d’action quant à leur vie professionnelle. Tout se passe comme si tout était géré bien au-dessus de nous, et donc que toute action personnelle était de base vouée à l’échec. L’enjeu est alors de redonner aux salariés ce sentiment de maîtrise, de reconnecter actions et résultats pour motiver à aller de l’avant.

En psychologie, ce sentiment porte le nom d’auto-efficacité. Les recherches portant sur ce sujet ont notamment montré que l’auto-efficacité se développe avec l’expérience de la réussite. Plus une personne réussit ou voit les autres réussir, plus elle se sent capable et donc plus elle osera à l’avenir. Motiver les salariés à s’impliquer dans les réflexions sur l’après-crise passe donc dans un premier temps par l’encouragement, la valorisation des réussites quotidiennes des uns et des autres (même des plus minimes) et une posture rassurante quant aux capacités d’action de l’équipe.

Impulser un état d’esprit tourné vers le futur

Le défi de la démotivation est d’autant plus complexe pour les entreprises qu’il survient alors que nombre de sociétés n’ont aucune visibilité concernant leur activité. Difficile, dès lors, de donner des perspectives. Or, la visibilité sur l’avenir est à la base de la motivation. En effet, la capacité d’un individu à se représenter ses objectifs sous la forme d’un but précis est essentielle. Pas de motivation sans objectifs. Comment dès lors réconcilier une réalité centrée sur l’incertitude et ce besoin de repères pour avancer ?

Pour les managers et dirigeants qui font face à cette question, l’important sera de communiquer une vision la plus précise possible de ce que pourra être l’activité post-covid. Un but, pour être motivant, doit en effet être spécifique et doit pouvoir challenger les équipes. À ce stade de la pandémie, il semble que les salariés aient besoin d’être guidés pour entrevoir la manière dont leur activité pourra saisir les opportunités proposées par la crise. N’hésitez donc pas à vous inspirer des transformations vécues par d’autres entreprises pour faire des propositions concrètes à votre équipe, qui pourront être déclinées et opérationnalisées par la suite. En cas d’impossibilité à transformer l’activité dans l'immédiat, utilisez la formation comme un ressort pour maintenir un état d’esprit tourné vers l’avenir.

Poser les bases de la sécurité psychologique

Autre condition importante pour inciter les salariés à participer aux réflexions concernant l’activité post-Covid : se sentir autorisé à s’exprimer. Les psychologues parlent de sécurité psychologique. Cette forme de sécurité est nécessaire pour apprendre, contribuer et contester le statu-quo, tout cela sans craindre d'être embarrassé, marginalisé ou puni d'une manière ou d'une autre. Elle est donc une alliée redoutable pour faire face à la transformation des modes de travail à venir.

Maintenir ou insuffler un sentiment de sécurité psychologique exige une certaine discipline, notamment dans le cadre des réunions d’équipe. En tant que manager ou dirigeant, il est essentiel de poser un cadre qui permettra l’émergence d’un sentiment de confiance. Egalité des temps de parole, valorisation de la diversité des points de vue et définition des objectifs communs deviennent alors la base des échanges. Mais la sécurité psychologique passe aussi par la création de canaux d’échanges plus discrets. N’hésitez pas à provoquer des échanges individuels réguliers avec les salariés pour recueillir leurs idées, leurs avis et leurs points de vue en se détachant de l’influence du groupe.

En résumé, la durée de la crise sanitaire semble porter atteinte à la motivation des salariés, qui peinent désormais à se sentir acteurs de leur vie professionnelle. Pour les dirigeants et managers, miser sur le sentiment de maîtrise, la visibilité et la sécurité psychologique permettra de créer les meilleures conditions pour remobiliser les équipes dans un état d’esprit tourné vers l’avenir.


Références
Bandura, A. (2013). The role of self-efficacy in goal-based motivation. Springer.
Clark, T. R. (2020). The 4 stages of psychological safety: defining the path to inclusion and innovation. Berrett-Koehler Publishers.
Empreinte Humaine, Opinion Way (2020). Baromètre T4 Empreinte Humaine – Crise Covid-19 : état psychologique, risques psychosociaux, burn-out des français. Disponible en ligne : https://empreintehumaine.com/barometre-t4/
Keller, J. M. (2010). The Arcs model of motivational design. In Motivational design for learning and performance (pp. 43-74). Springer, Boston, MA.
Kesselman, G. A., Hagen, E. L., & Wherry, R. J. (1974). A factor analytic test of the Porter-Lawler expectancy model of work motivation. Personnel Psychology.
Locke, E. A., & Latham, G. P. (2002). Building a practically useful theory of goal setting and task motivation: A 35-year odyssey. American psychologist, 57(9), 705.

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Nolwenn Anier

Docteure en psychologie - Consultante R&D

Docteure en psychologie, diplômée de l'université Clermont-Auvergne, Nolwenn a mené au cours de ses travaux de thèse différentes études ayant permis d'examiner la promotion de la diversité …