Faute inexcusable de l’employeur : peut-elle être exclue en cas de mesure de prévention ?
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Reconnaissance de la faute inexcusable : conditions
La faute inexcusable est reconnue lorsqu'il est établi que l'employeur :
- « avait ou aurait dû avoir conscience » du danger auquel était exposé son collaborateur et ;
- qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.
Il appartient en principe au salarié de prouver que ces conditions cumulatives sont réunies pour que la faute inexcusable soit reconnue. Mais il existe là encore des exceptions.
Par exemple, les salariés temporaires affectés à des postes de travail « présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité » doivent obligatoirement bénéficier :
- d’un accueil et d’une information adaptés dans l’entreprise dans laquelle ils sont employés ;
- d’une formation renforcée à la sécurité.
En cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle alors que l’intéressé n’a pas effectivement bénéficié de cette formation renforcée à la sécurité, la loi prévoit une « présomption de faute inexcusable de l’employeur » (Code du travail, art. L. 4154-3).
Encore faut-il bien sûr qu’il n’y ait pas de discussion sur la liste des postes à risques, dressée par l’employeur.
Mais même dans ce cas, rappelons qu’il existe des mesures spécifiques dans le Code du travail destinées à la prévention de certains risques d'exposition (risques chimiques, biologiques, vibrations mécaniques, etc.) : quelle incidence sur la reconnaissance d’une faute inexcusable ?
Faute inexcusable et mesures de prévention de certains risques d’exposition
Un intérimaire, polisseur-ébavureur, est mis à la disposition des sociétés du groupe Auvergne Aéronautique entre août 2008 et décembre 2010. Victime d'ulcères digitaux pris en charge par la CPAM en juin 2011 (tableau n° 69 des maladies professionnelles), il engage un contentieux pour faire reconnaître une faute inexcusable de son employeur.
Au niveau de la cour d'appel, la demande est rejetée : le salarié ne démontre pas que l'emploi de polisseur était « ou aurait dû être » classé comme poste à risque ni que les employeurs savaient (ou devaient savoir) que les outils de polissage utilisés par celui-ci étaient susceptibles de provoquer la maladie diagnostiquée. La cour retient aussi qu’il ne démontre pas quelles dispositions particulières auraient dû être prises afin d'éviter cette pathologie.
Au niveau de la Cour de cassation, le raisonnement n’est pas le même ! Il aurait d’abord fallu rechercher si l'employeur avait satisfait aux mesures de prévention des risques d'exposition aux vibrations mécaniques et de formation du salarié prévues par le Code du travail. Cette réglementation impose en effet à l’employeur une obligation particulière : difficile de considérer ensuite qu'il pouvait ignorer le risque.
Faut-il donc prévoir sur la liste des « postes à risques » tous ceux qui peuvent relever des mesures de prévention de certains risques d’exposition prévues par la réglementation ?
Retenons surtout que la Cour de cassation continue à vivement inciter l’employeur à engager une démarche de prévention des risques professionnels.
Pour vous aider à cerner l’étendue de votre obligation en termes de prévention des risques, les Editions Tissot vous conseillent leur documentation « Réglementation en Santé Sécurité au travail ».
Cour de cassation, 2e chambre civile, 9 novembre 2017, n° 16-22538 (l’employeur qui ne satisfait pas aux mesures de prévention des risques spécifiques d’exposition aux vibrations mécaniques et aux obligations de formation commet une faute inexcusable)
Sabine Guichard, juriste de droit social de formation, a successivement occupé des postes en entreprise et fédération professionnelle, d'abord en conseil puis de manière opérationnelle. Aujourd'hui, …
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