Formation à la prévention des risques psychosociaux à distance : désavantage ou opportunité ?

Publié le 17/02/2021 à 07:48 dans Risques psychosociaux.

Temps de lecture : 4 min

Contenu ancien

Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.

Les conditions sanitaires et les mesures gouvernementales associées visant à endiguer la propagation du virus Covid-19 ont fortement impacté la réalisation des formations dans les entreprises. Confinement, distanciation sociale et accueil du public interdit dans les organismes de formations, sont autant de dispositions qui freinent la possibilité d’agir sur le second niveau de la prévention des risques psychosociaux visant au développement des compétences et des ressources des individus. Pour faire face à l’impossibilité de réaliser les temps d’apprentissages en présentiel, les formations se sont digitalisées, soit en proposant des contenus virtuels, soit en proposant des temps d’animation à distance, notamment grâce aux nombreux outils de visio-conférence.

Ces temps à distance peuvent apparaitre comme des moments d’échanges et de transmission appauvris, car la médiation via des logiciels nous prive d’une partie essentielle de la communication non-verbale (l’environnement, les expressions et mimiques, gestuelles, etc.) qui peut se révéler un vrai frein à la fluidification des échanges. L’impact est d’autant plus important que la majorité des formations visant à outiller les salariés à prévenir les risques psychosociaux viennent développer les soft skills c’est-à-dire des compétences comportementales, relationnelles et émotionnelles.

Souvent mises en antagonismes des hard skills, ces compétences « douces » ont la particularité d’être des savoirs qui s’acquièrent davantage par l’expérimentation que par la transmission d’un savoir intellectualisé. En ce sens, la distance et les freins qu’elle impose en termes de possibilité d’animation et de modalités d’échanges peuvent être perçus comme des obstacles au bon déroulé de l’apprentissage. Néanmoins, les contraintes imposées par le distanciel ont permis de repenser les modalités d’animation, notamment en proposant des parcours de formations plus séquencés dans le temps. Alors faut-il repousser ses plans de formation en matière de prévention des risques psychosociaux ou bien faut-il se saisir de l’opportunité de les réaliser différemment ?

Formation à distance : un frein au développement des softs skills

Au-delà des impacts et des freins communicationnels évoqués plus haut, les principaux pièges vont résider dans l’application des caractéristiques majeures du présentiel mais calquées pour des modalités en distanciel. Ainsi, la durée, le format et même l’animation se doivent d’évoluer afin d’échapper à un ennui certain !

A titre d’exemple, une journée de sensibilisation aux risques psychosociaux ne peut pas se penser « classiquement », c’est-à-dire sur une journée avec un groupe excédant la dizaine de participant, au risque de se heurter à des difficultés de concentration, des distraction multiples (mails, téléphones), couplées à une posture passive induite par la distance technologique.

Les principaux écueils vont résider dans les temps trop longs (au-delà de 3 heures). A l’inverse le format webinaire, caractérisé par des formats thématiques spécifiques et des temps d’animation courts, très plébiscité depuis le premier confinement, semble atteindre ses limites. Quelle serait alors la recette gagnante pour un développement des softs skills avec des modalités d’animation en distanciel ?

Formation à distance : l’opportunité de séquencer les apprentissages

Malgré les freins, la formation distancielle va comporter quelques avantages. Elle va permettre notamment de se dégager de la contrainte de temps et de lieu, assignée lors des formations présentielles.

La nécessité de faire venir participants et formateurs a induit la contrainte de rentabiliser le déplacement en capitalisant sur le temps de présence passé ensemble. Ainsi , il n’est pas rare de voir des formations « prévention du risque psychosocial » ou de « gestion du stress » condensées sur une ou deux journées. Dégagé de la contrainte de lieu, l’impératif de rentabilité du temps s’assouplit et offre alors la possibilité de penser l’apprentissage de manière plus séquencée, mode d’apprentissage plus adapté lorsqu’il s’agit des soft skills. Le séquençage permet un mode d’apprentissage plus itératif qui ancre durablement les apprentissages car il permet de s’appuyer sur les temps d’inter-session en proposant notamment d’implémenter des apprentissages ou de réaliser des exercices dans le quotidien.

Ainsi, le distanciel va permettre l’émergence de parcours de formation, c’est-à-dire de plusieurs séquences d’apprentissages différées dans le temps. C’est également l’opportunité de créer des petits collectifs d’apprenants (8 personnes par groupe maximum), amenés à se réunir régulièrement. Cet espace réservé à l’apprentissage et aux échanges permet de créer une forte solidarité et d’apporter un soutien social sécurisant, une manière intéressante de répondre au sentiment d’isolement accru généré par une année de recourt massif au télétravail ! Par ailleurs, le séquençage permet des modalités d’animation évolutives, du plus théorique au plus pratique, et permet d’aller chercher des expériences in vivo en capitalisant entre chaque session. Webinaire introductif, e-learning, web ateliers, ateliers de co-développement… autant de choix qui peuvent moduler l’expérience formation !

En cette période chahutée et incertaine, à l’heure où les pratiques et les conditions de réalisation du travail évoluent sans cesse, la question de la prévention des risques psychosociaux et du développement des ressources pour faire face est aujourd’hui fondamentale. Alors ne repoussez pas vos plans de formations et autres formes d’accompagnement, pensez-les différemment afin qu’ils répondent au mieux aux besoins de toutes et tous !

5083

Alexandra Corvisier

Psychologue et consultante au sein du cabinet de conseil Stimulus

Alexandra Corvisier est psychologue et consultante au sein du cabinet de conseil Stimulus, spécialisé sur la santé psychologique au travail.

Elle intervient au sein des entreprises, aussi bien sur …