L’exercice d’une grève peut générer un risque grave pour les salariés non-grévistes !
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Expertise CHSCT/CSE pour risque grave : rappel
Le comité d’hygiène de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), qui a disparu le 31 décembre 2019, disposait de prérogatives spécifiques dont celle de pouvoir demander une expertise, dans deux cas précis :
- soit au titre d’un risque grave constaté dans l’établissement, lequel est révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ;
- soit au titre d’un projet important modifiant les conditions de santé, de sécurité ou les conditions de travail est mis en place dans l’entreprise/établissement.
Les Editions Tissot proposent aux membres du CSE de télécharger un modèle de délibération relative au recours à un expert agréé/habilité en présence d’un risque grave.

Le coût de cette expertise étant à la charge de l’employeur, ce dernier a la possibilité de la contester, et ce à plusieurs égards :
- sur la nécessité même de l'expertise ;
- sur la désignation de l'expert ;
- sur le coût prévisionnel de l'expertise.
En ce cas l’employeur saisit le président du tribunal judiciaire, statuant en urgence, sous 10 jours à compter, sauf cas particulier, de la date de la délibération du CHSCT/CSE (Code du travail, art. R. 2315-49).
En ce qui concerne spécifiquement l’expertise pour « risque grave », la jurisprudence a été abondante et a permis de délimiter les contours de cette notion. Ainsi, il est généralement présent dès que se révèlent dans l'entreprise des possibilités sérieuses de préjudices. Il doit être identifié, actuel, et ce préalablement à l’expertise commandée.
La Cour de cassation s’est prononcée à plusieurs reprises sur les cas de recours à l’expertise par le CHSCT.
Dernièrement, elle a statué sur la question de savoir si une expertise pour risque grave était justifiée lorsque le risque en question résultait de l’impact de l’exercice d’une grève sur les salariés non-grévistes.
Risque grave résultant d’une grève : expertise CHSCT justifiée
En l’espèce, un hôpital universitaire de Toulouse est confronté à un mouvement de grève d’une partie du personnel. Constatant un impact de cette grève sur le personnel non-gréviste, le CHSCT de l’hôpital a, par délibération du 28 février 2018, décidé de désigner un expert dans le cadre de l'article L. 4614-12,1 du Code du travail. L’objet de l’expertise était de « l'éclairer sur les causes à l'origine du processus de dégradation relevé au sein du service transport logistique, évaluer le risque toxicologique, de contamination, d'explosion, psychosocial ou routier des agents de service, l'aider à formuler des propositions de prévention des risques professionnels et d'amélioration des conditions de travail des agents de service ».
L’employeur (le centre hospitalier) a contesté cette délibération et a demandé son annulation devant le TGI. Cette demande a été refusée et l’employeur s’est pourvu en cassation.
Les Hauts magistrats vont rejeter le pourvoi. Il a été constaté que le président du TGI a relevé, d’une part qu’il était fait état par le CHSCT, depuis octobre 2017, d’une surcharge de travail des agents non-grévistes et encadrants, de stress, d'anxiété, de fatigue physique et morale, de pression psychologique, et de harcèlement sur leur personne, d’arrêts maladie et d’un risque psychosocial très élevé. D’autre part, il était fait état d’une souffrance éthique due à une impossibilité de respecter les délais d’acheminements des produits sanguin en période de sous-effectif ou en périodes récurrentes de trafic important sur les trajets, éléments confortés par une pétition. Enfin les actions entreprises par le centre hospitalier pour améliorer ces conditions de travail se heurtaient à une tension existante entre grévistes et non-grévistes.
Tous ces éléments confirment l’existence d’un risque grave, identifié et actuel, au sens de l’article L. 4614-12 du Code du travail et justifie donc l’expertise demandée.
Vous vous questionnez encore sur les expertises pour risque grave ? Les Editions Tissot vous proposent leur fiche « Faire appel à un expert en santé-sécurité et conditions de travail » qui figure dans leur documentation « Comité social et économique : agir en instance unique ».
Cass. soc., 8 janv. 2020, n° 18-19.279 (la surcharge de travail des salariés non-grévistes et la pression psychologique qu'ils subissent peuvent se transformer en risque grave et ainsi justifier une expertise du CHSCT et désormais du CSE)
Juriste droit social
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