La notion de réussite doit-elle subir une révision textuelle ?
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Qu’arrive-t-il à ces ambitieux, ces fantastiques leaders pleins d’idées, d’ambitions, engagés pour le bien collectif, avec ce feu ardent animé par la passion du mieux-faire ? Qu’advient-il de ces compétents dédiés à l’essor de leur organisation et dotés d’une humilité remarquable puisqu’ils travaillent dans l’ombre du désir de réussir ? Sale temps pour ces types de profils… Le désir de « réussir ensemble » semble devenu inintéressant, désuet, à moins qu’il puisse se savourer uniquement et bien égoïstement que si son nom apparaît seul en bas d’une feuille ?
Maxime, Jocelyne, Alain, Suzanne, Stéphanie ou Pierre, sont des prénoms évocateurs parce qu’ils ont fait partie de ces esprits forts, porteurs d’idées, avec une volonté inébranlable à vouloir une simple chose, faire réussir l’organisation. Connus et reconnus comme de vraies forces de propulsion, habités par un sens de l’engagement hors du commun, ces « inoubliables » y laissent finalement toujours beaucoup d’eux-mêmes. Certains y perdent même tout, confrontés à des dirigeants dont la première ambition est de réussir un lissage de carrière plutôt que de travailler à la réussite de tous.
Survivre aux « dé-penseurs »
Ces dirigeants ont le culte du privilège, de l’exclusif et de l’exclusion. Ils institutionnalisent le modèle de gestion monarchique et deviennent des massacreurs de talents et de développement du potentiel humain. Ibrahima Fall, Docteur de l’Ecole des Mines de Paris en sciences de gestion fait une description tout aussi révélatrice lorsqu’il dit : Ces « dé-penseurs s’incrustent dans de nombreuses organisations par un management paresseux porté à bout de bras par des marchands de sommeil conceptuel ». Ce dernier décrit ce qu’il considère comme une barrière inéluctable à la réussite, consumant les meilleurs éléments à petit feu, jusqu’à ce qu’ils quittent ou s’épuisent. Il parle en ces termes de « l’humain sacrifié ».
Sans motivation, impossible de réussir
La France porte le taux de motivation au travail le plus faible des pays occidentaux. « Le taux d’engagement au travail des Français s’élève à 6 % en 2021 selon le rapport State of the Global Workplace de Gallup. Les moins investis d'Europe. Pire, 54 % des personnes interrogées pour l’enquête réalisée par Les Makers-IFOP sur la relation des Français au travail, perçoivent leur travail comme une contrainte » relate le magazine Maddyness.
Qu’advient-il de ces personnes, recrutées pour leurs réalisations, leur expérience, leur finesse intellectuelle, leur vision, leur leadership, mais aussi leur motivation à s’investir dans la réussite collective, qui ont été considérées à leur embauche comme un petit magot que l’organisation venait de s’offrir ? Cette savoureuse appréciation ne durera jamais plus de six mois. Dans l’intervalle d’un an, ils vont apprendre à se taire pour survivre ou à se faire transparents pour éviter le surnom de « fauteur de troubles ».
Votre organisation incarne-t-elle le désir de réussir ?
Si la question semble plutôt burlesque, prenez le temps de la réflexion avant de répondre, car l’enjeu central est juste là. Petit test pour ceux qui doutent, avec seulement 2 questions :
1. En matière de recrutement/attractivité
Est-ce que votre employeur, vos managers, vous-même en tant que manager, ou quiconque dans l’entreprise ayant pour mandat la gestion des ressources humaines :
- a fait un sérieux travail d’introspection avec une vraie démarche RH qui sonde les départs définitifs afin de définir pourquoi les salariés partent, tombent malades, s’épuisent ?
- a mis en place une vraie politique de reconnaissance des talents et de ces passionnés du désir de réussir ensemble qui ouvrent sur des opportunités de projets collectifs avant de déclencher de belles campagnes d’attractivité, belles affiches, beaux noms, beau marketing ?
2. En matière d’évaluation continue
Est-ce que votre employeur, vos managers, vous-même en tant que manager, utilisez de manière systémique les retours d’expériences avant d’engager de nouveaux changements ou poursuivre un projet pour éviter qu’il ne finisse bancal ?
Si la réponse à ces 2 questions est « non » alors ce n’est pas de chance. Toutefois, il reste possible de trouver un réconfort à cette réalité : Vous faites partie de la très grande majorité.
Selon l’Institut Gallup, 60 % de toutes les réorganisations n’apportent aucun changement et l’incompétence managériale coûte 7000 milliards d’euros par année dans le monde. Divisé par le nombre de dirigeants d’entreprise et de la fonction publique, vous êtes sans doute statistiquement concerné. Ce n’est peut-être pas la notion de réussite qui nécessite révision, mais bien le choix des dirigeants.
Ronan Guilleroy, représentant de la CFDT Cadres Bretagne a récemment déclaré que la santé des organisations était pour lui l’approche innovante la plus adaptée qui peut nous sortir de ce fatalisme qui ne finit pas d’alimenter des statistiques de plus en plus sombres.
Québécoise au parcours atypique, d’abord psychologue clinicienne dans une large institution de santé, j’ai été rapidement saisie par l’impact du climat de travail sur les comportements, et, au même …
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