Licenciement pour inaptitude et obligation de reclassement : au-delà du groupe ?
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Un employeur doit-il rechercher un poste de reclassement au-delà du groupe auquel appartient l’entreprise ? La question s’est posée dans une affaire récente, jusqu’en Cour de cassation ! Zoom sur le périmètre de l’obligation de reclassement du salarié inapte.
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Essayer gratuitement pendant 30 joursJe me connecteObligation de reclassement du salarié inapte
Tout employeur dont l’un des collaborateurs a été déclaré inapte par le médecin du travail est tenu, sauf exonération expresse, d’une obligation de reclassement au bénéfice du salarié. Et ce, que l’inaptitude soit d’origine professionnelle ou non.
Les sanctions peuvent être assez sévères en cas de non-respect de cette obligation de moyens (et non de résultat) par l’employeur. Les contentieux autour de cette question sont donc assez nombreux et il est fréquent de s’interroger sur le périmètre de l’obligation de reclassement de l’employeur au sein du groupe dont relève l’entreprise. En effet, dans sa rédaction antérieure à 2016, cette recherche était imposée dans le cadre du groupe, « parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ».
Mais au-delà du groupe, l’employeur peut-il être tenu de proposer un poste qu’il sait vacant, sauf à ne pas respecter une obligation de loyauté ?
Périmètre de l’obligation de reclassement : au sein du groupe
Dans notre affaire, un ouvrier-machine recruté en 1980 est progressivement devenu monteur et technicien snaps.
Le 19 décembre 2016, le médecin du travail conclut, au terme de la seconde visite de reprise, que ce salarié est inapte au poste et à tous les postes dans l'entreprise et qu'il ne « resterait apte qu'à un poste de même nature dans un autre contexte professionnel ».
Interrogé par la société, le médecin du travail précise par courrier du 27 décembre qu'aucun poste du site ne peut être proposé.
L’employeur, considérant qu’aucun poste n’est susceptible de lui être proposé au sein de l’entreprise, ni même au sein des autres entités du groupe, le licencie en février 2017.
Si aucun poste compatible n’était disponible, quel était donc l’objet du litige ?
En l’occurrence, l'employeur avait pris lui-même l'initiative de rechercher des postes auprès de sociétés extérieures au groupe… sans pour autant proposer au salarié les postes disponibles au sein de celles-ci !
Peut-il être sanctionné dans ce cas précis ?
Selon la cour d’appel, la réponse étant clairement oui : « cette omission caractérisait un défaut de loyauté dans la recherche d'un poste de reclassement ». Et donc ? 53 k€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou encore 6 k€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis… entre autres.
Mais au final, cet employeur était-il vraiment tenu de proposer des postes compatibles relevant d’entités n’appartenant pas au groupe ?
Non, selon la Cour de cassation, pour qui « l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur préalablement à un licenciement pour inaptitude ne s'étend pas à d'autres entreprises qui ne relèvent pas d'un même groupe ».
Le périmètre reste celui du groupe donc…
Pour mémoire, rappelons qu’aujourd’hui, le reclassement doit être recherché au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.
Cour de cassation, chambre sociale, 16 novembre 2022, n° 21-12.809 (l’obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur préalablement à un licenciement pour inaptitude ne s'étend pas à d'autres entreprises qui ne relèvent pas d'un même groupe)
Sabine Guichard, juriste de droit social de formation, a successivement occupé des postes en entreprise et fédération professionnelle, d'abord en conseil puis de manière opérationnelle. Aujourd'hui, …
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