Malaise au temps et au lieu de travail : toujours un accident du travail ?
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Malaise au travail : l’instruction par la caisse primaire
La présomption d’imputabilité permet aux caisses primaires de prendre en charge d’emblée un accident sur la seule base du certificat médical initial et de la déclaration d’accident du travail, et ce, sans nécessité de diligenter une enquête. Toutefois, lorsque la caisse considère que la présomption d’imputabilité ne s’applique pas, elle mène une instruction afin de récolter des éléments objectifs qui vont lui permettre de statuer sur le caractère professionnel ou non de l’accident déclaré.
Si la caisse primaire a la possibilité d’interroger son médecin-conseil lors de son instruction, il est dommageable qu’elle ne le fasse pas de manière automatique en cas de malaise. Aussi, il convient de remarquer que lorsque ce dernier est saisi, il a pour mission de répondre à la question suivante : « les lésions sont-elles imputables à l’AT ? ». Cette question plutôt mal posée interpelle les avocats et médecins des employeurs. En effet, pour une réponse claire et sans équivoque, la question ne devrait-elle pas se poser en ces termes : « le malaise est-il imputable au travail ? »
Cette maladresse n’a finalement que peu d’importance au regard de l’application de la présomption d’imputabilité du malaise au travail, peu important les circonstances et l’origine non professionnelle de ce dernier.
Malaise au travail : quelques données statistiques
Le terme « malaise » est, selon la Haute Autorité de Santé (HAS), un terme imprécis qui ne devrait pas être utilisé par les médecins car il regroupe des situations cliniques bien trop différentes. Il n’en demeure pas moins que les médecins sont avides de ce vocable puisqu’il se retrouve régulièrement inscrit sur des certificats médicaux prescrits au titre d’accident du travail.
Selon les statistiques de la CNAMTS, 25 % des malaises sont d’origine cardiaque, 25 % d’origine pathologique non cardiaque (diabète, hypoglycémie, accident vasculaire cérébral, etc.) et 50 % demeurent d’origine inconnue (malaise vagal, choc psychologique, etc.). En conséquence, 50 % des malaises résultent de l’état de santé préexistant du salarié, autrement dit d’une cause totalement étrangère au travail…
Malaise au travail : position stricte de la Cour de cassation
La Cour de cassation a très récemment illustré sa position extrêmement rigide en matière de présomption d’imputabilité applicable au malaise survenu aux temps et lieu de travail.
Dans cette espèce, la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, qui avait pourtant rendu un arrêt cohérent en écartant la présomption d’imputabilité d’un malaise survenu au cours d’un entretien avec un responsable hiérarchique, s’est vu donnée tort par la Haute Cour.
La cour d’appel avait en effet considéré que la salariée ne démontrait pas en quoi l’entretien s’était déroulé dans des conditions susceptibles d’être à l’origine d’un choc psychologique, que le ton de la supérieure hiérarchique, tout culpabilisant et directif qu’il ait pu être, ne permettait pas d’expliquer un tel choc.
Sans tergiverser, la Cour de cassation a estimé que dès lors que le malaise était survenu aux temps et lieu de travail, il devait être reconnu comme accident du travail.
Une telle position est sévère pour l’employeur, d’autant plus en matière de choc psychologique résultant d’un simple entretien avec un supérieur. L’employeur est ainsi prévenu, l’utilisation d’un ton directif est à proscrire sous peine de reconnaissance éventuelle d’un accident du travail…
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Aurore Joly-Aulon
Responsable juridique
Cour de cassation, chambre civile 2e, 4 mai 2017, n° 15–29.411 (dès lors que le malaise survient aux temps et lieu de travail, il doit être reconnu comme accident du travail)
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