Planqués, tire-au-flanc, râleurs et on en passe : comment prévenir les comportements apathiques en entreprise ?
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Que ce soit en entreprise ou dans les médias, vous en avez sûrement entendu parler : on les surnomme allègrement les planqués, les râleurs, les tire-au-flanc, les champions de la défausse, les flemmards patentés, les passagers clandestins, les salariés sous-marin, les maîtres dans l’art de l’enfumage, voire même les personnalités difficiles. Epine dans le pied des entreprises, ces salariés sont connus pour freiner la productivité et provoquer l’agacement de leurs collègues. Mais qu’en est-il du ressenti des salariés concernés par ces critiques ?
Un constat : des salariés désengagés et désabusés qui restent néanmoins dans l’entreprise
Une plaie pour les entreprises
Ces « brasseurs d’air » parlent fort, râlent beaucoup et s’approprient parfois le travail des autres. Il n’est d’ailleurs pas étonnant d’avoir vu surgir, en temps de pandémie, des managers doutant de l’implication de certains membres de leurs équipes confinées. « Caméra éteinte en réunion, il n’intervient que très peu ; il apparaît de manière suspecte toujours en ligne sur Teams, et il n’a pas voulu revenir au bureau au moment de l'assouplissement des règles » témoigne un manager d’une grande entreprise.
Parmi les profils typiques les plus décrits on retrouve ceux qui partent systématiquement du bureau à une heure précise, ceux qui ont de bonnes excuses pour ne pas venir en séminaire d’équipe, ceux qui voguent de réunion en réunion sans jamais rien produire de concret, ceux qui passent beaucoup de temps à la machine à café, ceux qui, à l’approche des entretiens annuels, clament que tout va bien puis se plaignent à longueur de temps une fois ce rendez-vous fatidique passé, ceux qui invoquent constamment une surcharge de travail et refusent toute nouvelle mission et pire, ceux qui se font élire représentants du personnel uniquement pour devenir intouchables !
Nul besoin d’être devin pour comprendre que leurs comportements sont contre-productifs et minent véritablement le moral de leurs collègues. Qu’ils soient jeunes ou plus âgés, hommes ou femmes, les entreprises cherchent à s’en défaire. Malgré tout, certains s’accrochent tant bien que mal depuis parfois une dizaine d’années !
Une plaie pour les salariés
Lorsque l’on vient interroger les premiers concernés c’est néanmoins un tout autre regard qu’ils nous apportent. Non, la paresse ne fait pas partie de leur ADN et leur souffrance est bien réelle. Il y a ceux qui s’ennuient, ceux pour qui les tâches réalisées n’ont aucun sens, ceux qui sont désabusés, ceux qui sont frustrés, ceux qui se disent exploités, ceux qui se sentent infantilisés voire même peu respectés. Leur point commun : ils sont toujours salariés par l’entreprise mais depuis longtemps désengagés.
« Le directeur de ma boîte a fait un discours pour nous mettre la pression pendant le confinement, il a parlé d’un effort de guerre collectif, qu’on devait mettre les bouchées doubles. J’ai carburé pendant 6 mois, j’étais au bord de l’épuisement, je n’ai jamais eu un merci. Un matin, de retour au bureau, il est arrivé un grand sourire aux lèvres, en nous disant que la pandémie avait eu du bon pour notre cabinet, ça m’a complètement écœuré », témoigne un jeune employé. « Evidemment que ça m’a démotivé, je n’ai plus eu envie de bosser pour cette boîte, mais comme j’avais peur de ne pas retrouver du boulot, je suis resté en en faisant le moins possible ».
« J’ai demandé un changement de poste qui n’a pas abouti, mes tâches m’ennuient et j’ai peu de possibilités pour prendre des initiatives. Alors évidemment qu’en télétravail, je bâcle mon boulot pour faire autre chose… mais qui ne ferait pas ça ? » nous témoigne une jeune informaticienne.
Parmi les profils les plus en souffrance, on peut retrouver certains élus de longue date : “Ne me parlez pas de qualité de vie au travail, c’est une mascarade”. Certains ne se cachent plus de ne pas assurer le mandat pour lequel ils ont été plusieurs fois élus : « Les problèmes des gens ça ne m'intéressent pas, chacun ses problèmes ». A l’origine de ces sarcasmes, la lente mise en place d’un cynisme devenu profond, généré par des années de désillusions. « J’étais vraiment motivé pour travailler main dans la main avec la Direction sur l’amélioration des conditions de travail, mais nous ne sommes pas écoutés, parfois même dénigrés, rien ne change et c’est parfois pire. Mais où irais-je si je quittais l’entreprise ? Je ne sais faire rien d'autre ».
Un bilan perdant-perdant
Ancrées implicitement dans des postulats déterministes, les représentations liées aux travailleurs forment deux stéréotypes bien distincts : les motivés et les tire-au-flanc. S’il est vrai qu’il existe des individus ayant une habileté toute particulière à en faire le moins possible, il est encore plus vrai qu’on ne naît pas démotivé mais qu’on le devient. Alors que des salariés désengagés nuisent au bon fonctionnement de l’entreprise et que les salariés eux-mêmes souffrent de ces situations, comment expliquer ce regrettable statu quo ?
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Consultante, Dr Sciences de Gestion
Diplômée d’un Master 2 de Psychologie Sociale des Organisations de l’Université Paris X Nanterre-La Défense et d’un doctorat en Sciences de Gestion du laboratoire pluridisciplinaire LIPHA, Mathilde …
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