Risques réels, risques perçus : prendre en compte le facteur humain pour améliorer la sécurité au travail

Publié le 23/06/2021 à 09:17 dans Risques professionnels.

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L’analyse des risques professionnels se doit d’être la plus objective et rigoureuse possible pour diminuer le niveau de risque et l’exposition des salariés. Mais la dimension perceptive, subjective du risque, est parfois oubliée ou négligée. Les travaux dans le domaine de la psychologie du risque nous rappellent le rôle majeur du facteur humain dans l’amélioration de la sécurité.

Au travail comme dans la vie de tous les jours, nous sommes confrontés en permanence à une quantité astronomique de données qui nous conduisent à utiliser un certain nombre de « raccourcis » dans le traitement de l’information. Ces raccourcis, aussi appelés « biais cognitifs » sont très utiles pour pouvoir réagir vite et prendre des décisions au quotidien, mais peuvent aussi nuire à notre analyse de certaines situations.

L’étude des biais de perception en psychologie a de nombreuses applications dans la sphère professionnelle pour mieux comprendre mais aussi anticiper certains comportements, notamment dans le domaine de la sécurité.

Ainsi, pour D.R. Kouabenan, professeur de psychologie du travail et des organisations, « l’évaluation du risque, de par l’incertitude qu’il renferme et la diversité des facteurs en jeu, fait toujours intervenir des croyances et des représentations ».

Parmi les erreurs les plus fréquentes, qui vont modifier notre perception de la probabilité de l’accident mais aussi de notre propre vulnérabilité, nous pouvons citer par exemple le bénéfice ou encore la familiarité du risque.

Le bénéfice du risque

Il s’agit de la tendance, sans s’en rendre compte, et notamment dans des situations de stress ou d’urgence, à se focaliser sur les gains à retirer d’une prise de risque au détriment des aspects négatifs et potentielles pertes. Au volant par exemple, lorsque j’appuie sur la pédale d’accélérateur, je focalise mon attention sur mon objectif d’arriver à l’heure à un rendez-vous important et non pas, sur l’augmentation du risque d’accident lié à l’augmentation de la vitesse, l’impact sur la distance de freinage, etc.

La familiarité du risque

Je vais aussi avoir tendance à minimiser le risque quand j’ai l’habitude de le prendre ou d’y être confronté, être moins vigilant quand je fais des choses habituelles. A force d’évoluer dans un environnement dangereux et d’autant plus s’il ne m’est rien arrivé jusque-là, je ne perçois plus vraiment le risque. Ou, comme dans certaines catégories ou cultures professionnelles, je considère que la prise de risque « fait partie du métier ».

Cette erreur va être particulièrement fréquente chez les populations les plus exposées : métiers du BTP, sidérurgie, chimie, etc. Les professionnels de ces métiers vont avoir tendance à sous-évaluer les risques auxquels ils sont confrontés quotidiennement. Leur seuil de perception ou d’acceptation du risque est en quelque sorte plus élevé que pour d’autres salariés. Ce qui explique notamment la persistance de certains comportements à risques dans ces milieux.

Là où les améliorations en matière de technique et d’équipements de protection atteignent leurs limites, le champ de la psychologie du risque peut nous aider, tant à mieux analyser la survenue d’accidents qu’à développer des attitudes et comportements positifs face au risque et notamment à accroitre l’engagement et l’implication des salariés dans la sécurité.

Ces comportements sont à développer à toutes les strates de la hiérarchie : Kouabenan précise en effet que « les représentations et croyances des employeurs sur la sécurité et le bien-être des salariés constituent également des déterminants importants de leur investissement et engagement dans les actions de sécurité ».

Cette logique s’applique d’ailleurs parfaitement au champ du risque psychosocial : pour pouvoir progresser en matière de prévention, il s’agit souvent de travailler à faire évoluer certaines perceptions ou idées reçues sur les risques pour la santé physique, mais aussi mentale des salariés.

Les risques psychosociaux sont intrinsèquement liés aux conditions de travail et aux facteurs organisationnels. C’est pourquoi notre guide « RPS et QVT : le pas à pas d’une démarche à succès » fait le point sur les évolutions du monde du travail et leurs possibles conséquences en termes de risques psychosociaux en vue de vous proposer une méthodologie pour les traiter étape par étape et promouvoir une meilleure qualité de vie au travail.

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Chloé Remmer

Psychologue du travail – Consultante / formatrice

Diplômée d’un Master professionnel de psychologie du travail, Chloé est également formée à l’ergonomie et intervient depuis 12 ans dans le domaine de la santé et la sécurité au travail.

Elle …