Salariés intérimaires : quel suivi en santé au travail ?

Publié le 11/11/2020 à 08:38 dans Obligations de l’employeur.

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Il se peut que les informations contenues dans cet article et les liens ne soient plus à jour.

Selon l’INSEE, fin 2016, le secteur intérimaire employait 645 000 intérimaires soit autant de salariés également exposés aux risques professionnels. Pour autant, quelles sont les modalités de suivi en santé au travail de ces salariés particuliers ? Retour sur la législation qui leur est applicable.

Intérimaires : un suivi individuel de leur santé identique aux autres salariés

L’article R. 4625-2 du Code du travail prévoit que « Les dispositions des chapitres Ier à IV (du titre II spécifique aux services de santé au travail) sont applicables aux travailleurs temporaires, sous réserve des modalités particulières prévues par la présente section. »

Ces chapitres concernent notamment les conditions et moyens de l’équipe pluridisciplinaire au sein desquels sont détaillées les mesures législatives du suivi médical des salariés.

Ainsi, le salarié intérimaire bénéficie, comme tout autre salarié de droit commun :

  • soit d’un suivi individuel « classique » (ou « adapté » si le salarié est travailleur handicapé, travailleur de nuit, etc.) comprenant :
    • une visite d’information et de prévention initiale réalisée dans les 3 mois au plus suivant la prise de poste,
    • puis, en théorie, tous les 5 ou 3 ans, d’une visite périodique. En théorie car il est rare qu’un salarié intérimaire reste plus de quelques mois au sein du même poste rendant impossible la tenue d’une visite périodique.

Ces visites sont réalisées soit par le médecin du travail soit par l’infirmier en santé au travail. Il bénéficie, à l’issue, d’une attestation de visite :

Attestation de suivi individuel de l'état de santé

  • soit d’un suivi individuel renforcé si le poste qu’il est amené à occuper au cours de sa mission figure parmi la liste des postes dits « à risque » dressée à l’article R. 4624-23 du Code du travail (poste exposant le salarié à l’amiante, au plomb, aux rayonnements ionisants, etc.). Auquel cas il bénéficie :
    • d’un examen médical d’aptitude d’embauche en amont de son affectation au poste, ainsi que d’examens médicaux périodiques tous les 4 ans suivant le dernier examen médical d’aptitude. Ces examens médicaux sont réalisés par le médecin du travail,
    • d’une visite intermédiaire à 2 ans, qui peut être réalisée par le médecin ou l’infirmier du travail.

Si l’examen médical a pour but de statuer sur l’inaptitude ou l’aptitude du salarié, la visite intermédiaire ne le permet pas.

Les salariés temporaires sont également concernés par la demande de visite occasionnelle à l’initiative du médecin, de l’employeur (l’agence intérim) ou du salarié lui-même et bénéficient, aussi en théorie, d’une visite de reprise dès lors que :

  • le salarié a été absent au titre d’un congé maternité, d’une absence pour maladie professionnelle ou encore d’une absence d’au moins 30 jours pour cause d’accident du travail, de maladie ou d’accident non professionnel ;
  • et que le salarié est toujours en contrat au jour de la reprise… ce qui n’est pas assuré compte tenu de la nature spécifique du contrat intérimaire qui, par principe, est temporaire.
Notez-le
Un accord de branche du 3 mars 2017 est venu organiser un suivi médical de retour à l’emploi spécifique au travail temporaire afin d’éviter que les salariés temporaires ne se retrouvent sans visite de reprise, notamment.

Intérimaires : des spécificités dans leur suivi médical

Identification du service de santé au travail compétent

Le recours à un salarié temporaire inclut, à la différence d’une relation de salariat classique, trois intervenants :

  • l’entreprise de travail temporaire (agence intérim) ;
  • le salarié intérimaire, employé par l’agence intérim ;
  • l’entreprise utilisatrice, auprès de laquelle le salarié temporaire est mis à disposition pour réaliser son contrat de travail. L’entreprise utilisatrice n’est pas, ici, l’employeur du salarié.

Dans une telle configuration, se pose la question de l’identification du service de santé au travail compétent.

Et c’est le service de santé au travail de l’employeur, donc de l’agence intérim, qui est légitime à suivre la santé au travail des intérimaires. Pour se faire, le service de santé doit disposer d’un agrément spécifique, délivré par la DIRECCTE.

Pour autant, dans certains cas dérogatoires et si le service de santé initial donne son accord, le suivi médical des intérimaires peut être réalisé par :

  • un service de santé inter entreprise proche du lieu de travail de l’intérimaire ;
  • un service de santé autonome, c’est-à-dire un service de santé propre à l’entreprise utilisatrice au sein de laquelle le salarié temporaire réalise sa mission.

Toutefois, il peut arriver que le salarié soit affecté, en cours de mission, à un poste à risque (alors que cela n’était pas le cas au départ de la mission) nécessitant un suivi individuel renforcé. Dans un tel cas, c’est au service de santé de l’entreprise utilisatrice d’organiser l’examen médical d’aptitude, qui déterminera l’aptitude ou non du salarié, et transmettra ces informations au médecin du travail du service de santé principal.

Les dispenses de visites

Les salariés intérimaires, tout comme les salariés classiques, peuvent être dispensés de réaliser une visite d’information et de prévention (ou un examen médical d’aptitude). Toutefois quelques différences subsistent. Ainsi, le salarié intérimaire sera dispensé de réaliser :

  • une visite d’information et de prévention initiale si :
    • le salarié est appelé à occuper un emploi identique présentant des risques d'exposition équivalents,
    • et que le personnel de santé (par exemple, le médecin du travail, l'interne en médecine ou l'infirmier) a pris connaissance d'une attestation de suivi délivrée pour un même emploi dans les 2 années précédant l'embauche,
    • et qu’au cours des 2 dernières années, le médecin du travail n'a émis aucun avis concernant l'inaptitude ni de mesure individuelle d'aménagement, d'adaptation, de transformation du poste ou du temps de travail.
  • un examen médical d’aptitude d’embauche si :
    • le personnel de santé a pris connaissance d'une attestation de suivi délivrée pour un même emploi dans les deux années précédant l'embauche,
    • le travailleur est appelé à occuper un emploi identique présentant des risques d'exposition équivalents,
    • aucun avis médical ou avis d'inaptitude n'a été émis au cours des deux dernières années.
Important
Face à la crise du Covid-19 des possibilités de report des visites médicales avaient été mises en place. Elles pourraient prochainement être réactivées.

Audrey Gillard

Juriste droit social