Santé au travail et santé sans travail
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Le travail, un facteur de protection
Si le travail présente bien des risques pour notre santé et notre bien-être, il nous confère aussi un statut économique et social et peut, à ce titre, être considéré comme une source d’épanouissement, voire d’équilibre psychologique.
Cet équilibre est dès lors mis à mal pour les personnes privées d’emploi dont l’estime de soi a tendance à diminuer et qui, peu à peu, peuvent éprouver un sentiment d’inutilité, voire d’invisibilité aux yeux du système économique ou même de leur entourage.
C’est une véritable crise d’identité sociale et professionnelle qui peut en découler.
L’impact du chômage sur la santé
D’après certaines études, les personnes au chômage courent ainsi « deux fois plus de risques que celles qui travaillent de souffrir de problèmes psychologiques comme la dépression, l’anxiété, des symptômes psychosomatiques, un bien-être faible et une confiance en soi basse » (Paul & Moser, 2009).
Ce qui explique certainement en partie que les chômeurs figurent parmi les plus grands consommateurs d’antidépresseurs et d’anxiolytiques en France.
Accompagner les salariés concernés par des plans sociaux ou à l’approche de la retraite
Cet enjeu de santé doit être pris en compte, notamment par les entreprises qui connaissent des plans de sauvegarde de l’emploi : comment soutenir et accompagner au mieux les salariés dans ce processus ? L’insécurité d’emploi constituant alors souvent un véritable facteur de risque psychosocial, majorant tous les autres dans l’entreprise.
Si la prévention des risques psychosociaux dans un tel contexte n’est pas toujours la priorité de l’entreprise, il s’agit pourtant d’anticiper des situations de tension forte, voire de mal-être et d’épuisement pour les salariés dont l’emploi est menacé mais aussi pour les salariés et collectifs de travail « rescapés ».
Par ailleurs, l’entreprise peut également réfléchir à mettre en place un dispositif de préparation à la retraite permettant de faciliter cette étape de vie, qui au-delà des apparences, n’est pas toujours bien vécue par les salariés. Il s’agit de les aider (par le biais de rencontres individuelles ou collectives) à envisager la transition entre la vie active et la retraite, et le changement profond que cela peut représenter sur le plan financier, social et identitaire.
Et le manque d’activité au travail ?
L’identité professionnelle peut également être mise à mal sans pour autant qu’il soit question de perdre son emploi. L’épuisement professionnel par l’ennui, connu sous le nom de « bore-out » découle d’un manque de sollicitation et de stimulation au travail. Celui-ci peut être lié directement à un manque ou une baisse d’activité mais aussi à une absence de missions bien définies ou encore à de tâches peu valorisantes ou en inadéquation avec les compétences du salarié.
Outre le sentiment d’inutilité et les craintes de perdre leur emploi, les salariés concernés ont souvent un sentiment de honte, voire de culpabilité, les empêchant même parfois d’exprimer leur mal-être, y compris à leurs proches.
« Avoir beaucoup de travail est dans le vent ! Nous sommes dans une société qui valorise la suractivité. Celui qui au contraire n’est pas actif est honteux, il a la sensation de voler son salaire. Il devient même coupable. » (E. Rogier)
Sortons des clichés !
Ces éléments nous amènent donc à réfléchir, tant au sujet du vécu des professionnels en activité que de ceux éloignés de l’emploi, envers lesquels beaucoup de stéréotypes sont entretenus.
Au sein de l’entreprise, l’impact de la vie privée sur le travail est souvent questionné, notamment pour tenter de mieux cerner l’origine du mal-être d’un salarié. A l’inverse, les effets négatifs du travail sur la vie privée sont de plus en plus mis en avant.
Alors, quid de l’influence réciproque des sphères professionnelles et personnelles et des effets sur les salariés et sur l‘entreprise ?
Pour enrichir ce débat souvent empreint de clichés de part et d’autre, il est utile de se rappeler que lorsque le travail est réalisé dans de bonnes conditions, il peut aussi être vecteur d’une certaine santé psychologique, voire constituer un facteur de protection. Pour un salarié traversant une épreuve difficile sur le plan personnel par exemple, l’engagement dans l’activité professionnelle, la satisfaction du travail bien fait, mais aussi les relations sociales nouées au travail, peuvent lui permettre de se ressourcer au moins à l’échelle de sa journée de travail, et l’aider dans certains cas à ne pas sombrer dans un mal-être plus profond.
Le dicton « Le travail, c’est la santé » peut donc encore avoir du sens aujourd’hui… à condition bien sûr, de prendre soin de ce travail !
Psychologue du travail – Consultante / formatrice
Diplômée d’un Master professionnel de psychologie du travail, Chloé est également formée à l’ergonomie et intervient depuis 12 ans dans le domaine de la santé et la sécurité au travail.
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