|  Vous venez d'apprendre par un de vos clients que votre salarié a eu une altercation violente avec lui à son domicile. Après avoir pris la mesure de la gravité des faits, vous souhaitez le mettre à pied mais hésitez entre les mises à pied disciplinaire et conservatoire. En quoi ces deux formes de mise à pied sont-elles différentes ? À quel moment utiliser l'une ou l'autre ? Essayons de mieux comprendre comment s'utilisent ces deux mesures et quels sont les régimes juridiques qui y sont associés. Etape
1 -
Comprendre les deux formes de mise à pied
Mise à pied disciplinaire Il s'agit d'une sanction disciplinaire comptant parmi les plus lourdes, puisqu'elle a un impact direct sur la rémunération du salarié sanctionné. Elle autorise l'employeur à éloigner le salarié de l'entreprise pour une durée déterminée et à suspendre l'exécution du contrat de travail. Cette mesure disciplinaire ne peut être décidée par l'employeur qu'à l'issue d'une procédure disciplinaire : convocation du salarié à un entretien préalable, respect du délai de prévenance, entretien, délai de réflexion et notification de la sanction. Exemple
Votre salarié (peintre) ne s'est pas rendu à sa visite médicale obligatoire comme vous le lui avez indiqué. Déjà averti pour des faits similaires par le passé, vous décidez d'aller plus loin. Après réflexion, vous lui adressez une notification lui indiquant que la sanction retenue est une mise à pied disciplinaire de 3 jours. Durant cette période, le salarié ne viendra donc pas travailler et ne sera pas rémunéré. Mise à pied conservatoire La mise à pied conservatoire est une mesure d'attente prise par l'employeur avant de décider d'une éventuelle sanction. Elle n'est pas juridiquement considérée comme une sanction, mais comme une mesure provisoire et peut être à durée déterminée ou indéterminée. En général, face à une situation de désordre dans l'entreprise causée par le salarié, l'employeur décide de le renvoyer chez lui en attendant de mettre en place une procédure de licenciement. Le salarié n'est pas encore sanctionné, à ce stade. Pour décider d'une mise à pied conservatoire, les faits fautifs doivent être suffisamment graves pour que le maintien du salarié dans l'entreprise risque d'entraîner des perturbations dans la bonne marche du service. Dans la pratique, la mise à pied conservatoire est décidée le plus souvent lors des faits fautifs, elle est à effet immédiat, le salarié étant prié de quitter l'entreprise par son supérieur hiérarchique. L'employeur précisera alors dans le courrier de convocation à l'entretien préalable que depuis telle date, le salarié a été placé en mise à pied à titre conservatoire par son supérieur. L'employeur n'est toutefois pas tenu de procéder à une mise à pied conservatoire avant d'engager une procédure disciplinaire, même lorsque les faits reprochés au salarié sont constitutifs d'une faute grave. Exemple
Un salarié a eu une altercation violente avec son chef d'équipe sur un chantier. Coutumier du fait, et surtout parce que vous pensez que cela nuit à l'image de votre entreprise, vous décidez de sévir en lui demandant de quitter immédiatement l'entreprise. Dès le lendemain, vous lui adressez une convocation à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement pour faute grave. Vous lui précisez que, dans l'attente de la sanction qui sera décidée, il est placé, depuis la veille, en « mise à pied à titre conservatoire ». Ainsi, lorsque la découverte des faits fautifs intervient bien après la réalisation de ceux-ci, la mise à pied conservatoire n'est pas toujours conseillée. Ceci dépendra de l'éventuel trouble dans l'entreprise. On pourra l'utiliser, par exemple, lorsque l'on découvre le salarié qui était à l'origine de vols ayant eu lieu auparavant. En revanche, dans l'hypothèse d'une bagarre tardivement découverte par l'intermédiaire d'un témoin, le trouble ayant cessé depuis longtemps, on se contentera de mettre en place une procédure disciplinaire classique. Etape
2 -
Apprécier la durée des mises à pied
Qu'elle soit disciplinaire, à titre de simple sanction, ou conservatoire, donc préalable à une procédure de licenciement, la mise à pied ne saurait se prolonger abusivement. Mise à pied disciplinaire Elle a une durée déterminée. Vous êtes libre de votre choix, à moins que le règlement intérieur ne prévoie déjà une durée maximale à ne pas dépasser (reportez-vous à l'onglet « Évitez les erreurs »). L'employeur indiquera, dans la notification de sanction, la durée de la mise à pied et sa date de début et de fin. Dans la pratique, la mise à pied est souvent fixée à 3 jours ouvrables, mais peut aller, dans certains cas, jusqu'à 1 semaine. Attention cependant, cette sanction a des conséquences sur la rémunération du salarié. Il paraît raisonnable de ne pas dépasser les 8 jours ouvrables de mise à pied disciplinaire. Mise à pied à titre conservatoire Elle peut durer le temps de la procédure ou sa durée peut être déterminée à l'avance.
Dans le premier cas, elle commence quand l'employeur la décide et se termine quand le salarié reçoit sa notification de sanction. Dans le second cas, l'employeur en fixe la durée. Toutefois, une durée déterminée ne peut être fixée à l'avance qu'à condition : Opter pour une durée déterminée peut être utile dans certaines circonstances, par exemple lorsque la procédure disciplinaire est susceptible de prendre un certain temps (congés dans l'entreprise, etc.) et que vous ne souhaitez pas priver le salarié trop longtemps de son salaire. Les faits qui justifient la mise à pied à titre conservatoire sont graves et il importe de ne pas perdre de temps. Si vous décidez de placer le salarié en mise à pied conservatoire le jour où il commet une faute, rédigez votre courrier de convocation à l'entretien préalable aussitôt en indiquant son placement en mise à pied conservatoire. Un délai, ne serait-ce que de quelques jours, entre la mise à pied conservatoire et la procédure de licenciement entraine l'irrégularité du licenciement, sauf s'il est nécessaire à une enquête préalable pour établir de façon certaine la faute du salarié. De même, lorsque le délai entre la mise à pied conservatoire et le licenciement résulte de la nécessité de convoquer le salarié à un nouvel entretien préalable après son refus de la rétrogradation proposée à titre de sanction, le licenciement a une cause réelle et sérieuse. En revanche, si la procédure de licenciement est engagée 7 jours après la notification de la mise à pied et qu'aucun motif n'est de nature à justifier ce délai, la mesure présente le caractère d'une sanction disciplinaire et l'employeur ne peut plus ensuite décider d'un licenciement pour les mêmes faits. Etape
3 -
Envisager les conséquences de la mise à pied sur la rémunération du salarié
Mise à pied disciplinaire C'est une sanction qui a des conséquences sur la rémunération du salarié. Les sanctions pécuniaires sont interdites par la loi, mais ici, la perte d'argent n'est pas une sanction, mais la conséquence de la suspension du contrat. Le salarié ne percevra pas de rémunération pour chaque journée durant laquelle il a été en mise à pied disciplinaire. Mise à pied conservatoire Cette mise à pied suspend également le contrat de travail. Elle peut donc entraîner aussi une perte de rémunération pour le salarié, mais tout dépend de l'issue que choisira l'employeur. Si, à la fin de la procédure, vous licenciez votre salarié pour faute grave ou lourde, vous n'aurez pas à lui payer les jours non travaillés. Dans tous les autres cas, vous devrez rémunérer toute la période de mise à pied conservatoire, y compris si le salarié a perçu des indemnités journalières maladie. Toutefois, si, à l'issue de la procédure, vous décidez de convertir cette sanction en « mise à pied disciplinaire », vous n'avez pas à rémunérer les jours sanctionnés (reportez-vous à l'onglet « Notre conseil »). attention
Si l'employeur décide finalement de prononcer une mise à pied disciplinaire comme sanction, alors que le salarié était placé en mise à pied conservatoire, il peut choisir d'imputer la durée de la mise à pied disciplinaire sur la période de mise à pied conservatoire qui a eu lieu. ExempleLe salarié commet un vol le lundi 1er février. L'employeur le place en mise à pied conservatoire. L'entretien préalable a lieu le mardi 9 février et le salarié reçoit sa notification de sanction le vendredi 12. L'employeur a choisi de n'infliger à ce salarié, irréprochable jusque-là, qu'une mise à pied disciplinaire de 5 jours. La mise à pied conservatoire a duré 10 jours. L'employeur précise dans sa notification que la mise à pied disciplinaire s'impute sur la durée de la mise à pied conservatoire. Le salarié perd donc 5 jours de rémunération et l'employeur devra payer 5 jours qui n'ont pas été travaillés (en règle générale, sauf à être limité par le règlement intérieur sur la durée de la mise à pied, on tentera pour éviter cette situation, de prononcer une mise à pied disciplinaire de la même durée que la mise à pied conservatoire qui a eu lieu. Le salarié n'ayant pas été licencié, il est alors rare qu'il choisisse de contester la sanction). | | |
| Ne soyez pas flou sur la mise à pied conservatoire dans la lettre de convocation
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| Les représentants du personnel ne jouent aucun rôle particulier en la matière. Ils n'ont pas à être consultés sur l'opportunité de placer ou non le salarié en mise à pied à titre conservatoire.
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| Le salarié conserve toujours la possibilité de contester une sanction disciplinaire. Il peut donc saisir le conseil de prud'hommes pour contester une mise à pied disciplinaire en arguant que le motif de la sanction n'est pas fondé ou que celle-ci a été d'une durée trop longue et constitue un abus de droit de la part de l'employeur.
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| Choisissez la période de mise à pied disciplinaire pour qu'elle apparaisse bien comme une sanction
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| Que faire si le salarié est en arrêt maladie le jour où il devait effectuer sa mise à pied disciplinaire ?
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C. trav., art. L. 1331-1 (définition de la sanction disciplinaire), L. 1332-1 et L. 1332-2 (procédure disciplinaire), L. 1332-3 (mise à pied conservatoire) 
Cass. soc., 2 mai 2000 (à défaut de faute grave, la mise à pied conservatoire peut être annulée et le salarié peut prétendre à une indemnité correspondant au salaire perdu) 
Cass. soc., 21 octobre 2003 (la date à laquelle doit intervenir une mise à pied disciplinaire ne peut être différée au motif que le salarié est sur la période incriminée en arrêt pour maladie) 
Cass. soc., 30 octobre 2013, n° 12-22.962 (un délai de quelques jours non justifié entre la mise à pied conservatoire et la procédure de licenciement entraine l'irrégularité du licenciement) 
Cass. soc., 18 décembre 2013, n° 12-18.548 (la période de mise à pied conservatoire doit être rémunérée, sauf si elle est suivie d'un licenciement pour faute grave ou lourde) 
Cass. soc., 14 septembre 2016, n° 14-22.225 (quelques jours peuvent s'écouler entre la notification de la mise à pied conservatoire et la convocation à l'entretien préalable de licenciement) 
Cass. 2e civ., 21 septembre 2017, n° 16-17.580 (accident sur le lieu de travail pendant une mise à pied) 
Cass. soc., 15 mai 2019, n° 18-11.669 (si la procédure de licenciement est engagée 7 jours après la notification de la mise à pied et qu'aucun motif ne justifie ce délai, la mesure présente le caractère d'une sanction disciplinaire) 
Cass. soc., 5 janvier 2022, n° 19-25.793 (si le délai entre la mise à pied conservatoire et le licenciement résulte de la nécessité de convoquer le salarié à un nouvel entretien préalable après refus de la rétrogradation proposée à titre de sanction, le licenciement a une cause réelle et sérieuse) 
Cass. soc., 9 février 2022, n° 20-17.140 (l'employeur n'est pas tenu de procéder à une mise à pied conservatoire avant d'engager une procédure disciplinaire) 
Cass. soc., 29 mars 2023, n° 21-25.259 (lorsque la mise à pied conservatoire a été prononcée à tort, les salaires dus doivent être versés même si le salarié a perçu des indemnités journalières) |
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