|  Votre entreprise de BTP est dotée d'un important effectif du fait que votre activité est orientée vers la construction de maisons neuves. Seulement, avec la crise, les chantiers sont devenus subitement moins fréquents ; les commandes se raréfient. Ainsi, vous vous retrouvez dans une situation où conserver cette masse salariale importante risquerait de compromettre la compétitivité de votre structure, voire de la mettre en péril. Afin de prévenir cette situation, vous envisagez donc une procédure de licenciement économique collectif de plus de 10 salariés sur 30 jours. Toutefois, vous ne disposez pas d'instances représentatives du personnel, c'est-à-dire d'un CSE. Alors comment allez-vous vous y prendre ? Etape
1 -
S'assurer du respect des conditions préalables impératives au licenciement économique
Est-ce un « vrai » licenciement économique ?
Avant toute chose, assurez-vous qu'il s'agit bien d'un licenciement économique. En effet, pour que le motif ne soit pas contestable il y a impérativement trois conditions cumulatives à remplir : le motif ne doit avoir aucun rapport avec le comportement personnel du salarié ou avec sa personne ; le licenciement doit résulter d'une suppression d'emploi ou d'une transformation d'emploi ou encore d'une modification d'un élément essentiel du contrat de travail. En effet, si le salarié refuse la transformation de son emploi alors qu'il a les capacités pour occuper le poste et si le licenciement est inévitable, le motif est reconnu comme étant économique ; le licenciement doit être consécutif à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques, ou bien à la réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ou encore à la cessation d'activité de l'entreprise.
Dès lors qu'il est certain que le motif est économique, ne perdez pas de vue que vous ne pouvez entamer une procédure de licenciement que lorsqu'il n'y a pas d'autre solution. Il vous reste en effet deux vérifications à faire.
Avez-vous formé et adapté vos salariés ?
Un licenciement pour motif économique d'un ou de plusieurs salariés ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés. Vous êtes en effet tenu d'exécuter de bonne foi le contrat de travail et vous avez ainsi le devoir d'assurer l'adaptation des salariés à leur emploi, sans qu'on puisse toutefois exiger de vous d'assurer la formation initiale du salarié qui lui fait défaut.
Êtes-vous dans l'impossibilité de les reclasser ?
Un licenciement pour motif économique ne peut intervenir que si le reclassement du ou des intéressés ne peut être réalisé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il(s) occupe(nt) ou sur un emploi équivalent ou, à défaut et sous réserve de l'accord exprès du/des salarié(s), sur un emploi de catégorie inférieure. Si votre entreprise (ou le groupe d'entreprises dont vous faites partie) comporte des établissements à l'étranger, le périmètre de reclassement est constitué uniquement des entreprises établies sur le territoire national et ayant en commun une organisation, des activités ou un lieu d'exploitation qui assurent la permutation du personnel. Les offres de reclassement proposées au(x) salarié(s) devront être écrites et précises. Si vous ne disposez pas d'offres de reclassement, vous devez être en mesure de justifier et de prouver l'absence de poste disponible.
Dès lors que vous êtes certain que le motif est économique, que vos salariés sont adaptés à leur emploi et que vous ne pouvez pas tous les reclasser, vous pouvez lancer la procédure de licenciement. Etape
2 -
Fixer l'ordre des licenciements
Vous devez sélectionner, de manière objective, les salariés qui feront l'objet d'un licenciement économique. Pour ce faire, vous devez respecter ce que prévoient les critères légaux.
Les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements prennent notamment en compte :
les charges de famille et en particulier celles des parents isolés ; l'ancienneté dans l'entreprise ; la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile (entre autres les personnes handicapées et les personnes les plus âgées) ; les qualités professionnelles appréciées par catégories professionnelles.
Une fois les critères établis, vous pouvez privilégier l'un ou plusieurs d'entre eux, sans toutefois en ignorer aucun (par exemple en attribuant à chacun un coefficient).
La pondération doit être globale dans la catégorie professionnelle concernée et doit bien entendu tenir compte d'éléments objectifs. En cas de pluralité d'établissements, vous pouvez définir par accord collectif un périmètre d'appréciation de l'ordre des critères plus restreint que l'entreprise. À défaut d'accord, ce périmètre ne pourra pas être inférieur à celui de chaque zone d'emploi dans laquelle sont situés un ou plusieurs établissements de l'entreprise concernée par les suppressions d'emploi. Etape
3 -
Établir et afficher un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE)
Ce PSE est obligatoire, même en l'absence de représentants du personnel, dès lors que vous envisagez d'effectuer un licenciement économique d'au moins 10 salariés dans une même période de 30 jours et que votre entreprise occupe habituellement au moins 50 salariés.
Si votre entreprise compte moins de 50 salariés, le PSE est facultatif. Si, toutefois, vous souhaitez établir volontairement un PSE, vous n'êtes pas soumis aux exigences légales en la matière. Vous devrez néanmoins adresser votre projet de licenciement à la DREETS.
Le PSE ainsi que la notification du projet de licenciement doivent être notifiés au directeur de la DREETS. Ils doivent comprendre des éléments précis.
Le PSE doit être affiché dans l'entreprise pour pouvoir être consulté par les salariés. Il en est de même pour toutes les remarques ou décisions prises par la DREETS relatives au PSE. L'affichage peut toutefois être remplacé par tout autre moyen d'information ayant date certaine (par exemple, un courriel). La DREETS a un délai de 21 jours pour se prononcer sur le PSE. L'employeur ne peut déclencher la procédure de licenciement qu'à condition que le PSE soit validé. À défaut, il devra modifier son contenu conformément aux exigences posées par la DREETS puis recommencer la procédure d'envoi et d'information. Notez-le
Le silence gardé par la DREETS vaut homologation du PSE. Attention, une entreprise qui s'engage dans un licenciement économique de plus de 10 salariés sur 30 jours doit adresser des informations à la DREETS par voie dématérialisée sur le portail RUPCO : ruptures-collectives.emploi.gouv.fr. Il s'agit des informations suivantes : le projet de licenciement économique, les informations et documents communiqués aux RP et, en l'absence de RP, le procès-verbal de carence aux élections. En cas de PSE, il faut ajouter la demande de validation ou d'homologation et les pièces à joindre à cette demande, et le bilan de la mise en oeuvre du PSE. attentionEn cas de PSE, vous ne pouvez proposer d'adhérer au CSP qu'après la notification de validation ou d'homologation par la DREETS. Par conséquent, il convient d'attendre l'homologation, la validation ou l'expiration du délai d'acceptation tacite pour poursuivre la procédure telle que décrite ci-après. Etape
4 -
Convoquer les salariés concernés à un entretien préalable au licenciement
La convocation à l'entretien préalable se fait par lettre remise en main propre contre décharge ou par courrier recommandé. Le délai minimum entre la convocation et l'entretien est de 5 jours ouvrables.
Remettez au salarié lors de cet entretien une proposition de contrat de sécurisation professionnelle. Notez-le
Le salarié qui accepte un CSP doit avoir été informé par écrit du motif économique de la rupture et ce, au plus tard lors de son adhésion au CSP. Cette information peut être donnée par mail.
Dès lors qu'il peut, dans un délai de 21 jours à compter du lendemain de la remise du dossier CSP, notifier à tout moment son acceptation, c'est-à-dire notamment avant l'envoi de la lettre « valant licenciement », il est plus prudent d'énoncer les motifs de la rupture lors de l'entretien préalable, en même temps que la proposition du CSP. À défaut, vous devez procéder à cette énonciation le jour même de la réception de l'acceptation du salarié, sous peine de voir le licenciement considéré comme sans cause réelle et sérieuse. Etape
5 -
Laisser passer un délai de 21 jours calendaires après l'entretien
Le délai de 21 jours après l'entretien correspond à la fin du délai de réflexion des salariés pour accepter le CSP.
L'acceptation d'un CSP entraîne non pas un licenciement, mais une rupture immédiate d'un commun accord des parties. L'intéressé acquiert alors le statut de stagiaire de la formation professionnelle. L'absence de réponse à l'expiration du délai équivaut à un refus. Si le salarié accepte le CSP, son contrat sera rompu au lendemain du dernier jour de réflexion. Vous pourrez lui adresser dès réception de sa réponse favorable un courrier actant la rupture et respectant les obligations formelles présentées. Pensez à vérifier que vos salariés ont bien été informés des motifs économiques et de la priorité de réembauche au plus tard au moment de l'acceptation du CSP : soit dans le document écrit d'information sur le dispositif du CSP remis obligatoirement aux salariés concernés par le projet de licenciement ; soit dans la lettre que vous êtes tenu d'adresser aux salariés lorsque le délai de réponse de 21 jours expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement ; soit lorsqu'il ne vous est pas possible d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par les salariés du contrat de sécurisation professionnelle, dans tout autre document écrit, porté à leur connaissance au plus tard au moment de leur acceptation.
Etape
6 -
Notification du licenciement pour les entreprises de moins de 50 salariés
Vous ne pourrez notifier les licenciements, pour les salariés ayant refusé le CSP, qu'après l'expiration d'un délai de 30 jours à compter de la notification du projet de licenciement au directeur de la DREETS. Vous notifierez le licenciement aux salariés par lettre recommandée avec accusé de réception, en faisant figurer la motivation du licenciement, la priorité de réembauche dont bénéficie le salarié, et le nombre d'heures qu'il peut utiliser durant le préavis pour la recherche d'emploi. Vous disposez de 15 jours après la notification pour apporter des précisions au salarié sur les motifs du licenciement, par lettre recommandée avec AR ou remise contre récépissé. Cette faculté peut être utilisée soit à votre initiative, soit à la demande du salarié selon le même formalisme. Dans ce dernier cas, vous disposez également de 15 jours pour lui répondre, par lettre recommandée avec AR ou remise contre récépissé. Notez-le
Si le salarié ne vous demande pas de précision sur les motifs du licenciement, l'insuffisance de motivation éventuellement caractérisée par les juges ne privera plus à elle seule le licenciement de cause réelle et sérieuse. L'irrégularité sera réparée par le versement d'une indemnité qui ne pourra excéder un mois de salaire. Etape
7 -
Notification du licenciement pour les entreprises d'au moins 50 salariés
Vous ne pourrez notifier les licenciements, qu'après homologation, validation ou expiration du délai d'acceptation tacite, par la DREETS du PSE. Or, la proposition du CSP est faite après la notification par l'autorité administrative de sa décision de validation ou d'homologation du PSE. Ainsi, il est fort probable que vous ne connaissiez pas la décision du salarié relative au CSP au moment de la notification du licenciement. Aussi, vous avez deux possibilités : soit vous n'attendez pas l'expiration du délai de réflexion de 21 jours dont dispose le salarié pour répondre à la proposition de CSP. Dans ce cas, la lettre de licenciement doit comporter, outre les mentions obligatoires (la motivation du licenciement, la priorité de réembauche dont bénéficie le salarié et le nombre d'heures qu'il peut utiliser durant le préavis pour la recherche d'emploi) :
le rappel de la date d'expiration du délai de réponse à la proposition de CSP, la précision qu'en cas de refus cette lettre vaudra lettre de licenciement ;
soit vous attendez le terme du délai de réflexion du CSP avant d'envoyer, selon le cas :
une lettre de licenciement si le salarié n'a pas accepté le CSP, une lettre confirmant la rupture d'un commun accord du contrat de travail si le salarié a accepté le CSP.
Les notifications des licenciements devront être faites par lettre recommandée avec accusé de réception. La possibilité de préciser les motifs du licenciement décrite à l'étape 6 s'applique à l'identique. | | |
| Ne faites pas l'entretien préalable en dehors du temps de travail
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| C'est entendu, votre entreprise n'a pas de CSE. Mais avez-vous établi un procès-verbal de carence ?
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| En l'absence de proposition de CSP au salarié éligible à ce dispositif, vous êtes redevable envers Pôle emploi d'une contribution égale à 2 mois de salaire brut moyen (3 mois si le salarié adhère ensuite au CSP sur proposition de Pôle emploi). Cette sanction est automatique dès lors que le salarié s'inscrit au chômage.
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| Vérifiez qu'il n'y a pas de salarié protégé dans votre entreprise
A priori non, puisque vous n'avez pas de RP. Néanmoins une vérification s'impose.
Vous pourriez en effet avoir :
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| Le salarié licencié peut-il bénéficier de la priorité de réembauche ?
Quels que soient l'ampleur du licenciement ou l'effectif de l'entreprise, le salarié licencié bénéficie d'une priorité de réembauche pendant un an à compter de la date de rupture de son contrat (fin du préavis, exécuté ou non) s'il en fait la demande durant ce délai. Vous êtes tenu de mentionner l'existence de cette priorité dans la lettre de licenciement et au plus tard au moment de l'acceptation du CSP (et non postérieurement à celle-ci).
Lorsque le salarié licencié demande à bénéficier de la priorité, vous devez tout d'abord accuser réception de cette demande par un courrier. Dès lors, tout emploi disponible et compatible avec les qualifications du salarié doit lui être proposé, même s'il s'agit d'un poste qu'il avait déjà refusé. Cette obligation vise les CDI comme les CDD.
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C. trav., art. L. 1233-3 (définition du motif économique), L. 1233-4 et L. 1233-4-1 (obligation d'adaptation et de reclassement), L. 1233-5 (ordre des licenciements et fixation du périmètre d'application des critères), L. 1233-39 (notification des licenciements), L. 1233-46 et L. 1233-49 (notification du projet à la DIRECCTE), L. 1233-61 et suiv. (PSE), L. 1233-65 à L. 1233-70 (CSP), L. 1235-15 (PV de carence), R. 1233-2-2 (précision des motifs de licenciement) 
Cass. soc., 2 février 2006 (refus de réponse de l'employeur aux critères de l'ordre des licenciements) 
Cass. soc., 23 septembre 2008, n° 06-45.528 (nécessité d'un procès-verbal de carence même s'il existe un représentant des salariés en cas de licenciements économique dans le cadre d'un redressement judiciaire) 
Cass. soc., 27 mai 2009, n° 08-43.137 (obligation de motiver la lettre de licenciement même en cas d'adhésion du salarié à la CRP) 
Cass. soc., 8 avril 2009, n° 08-40.125 (application de la priorité de réembauchage aux emplois CDD) 
Cass. soc., 2 juillet 2014, n° 13-12.048 et n° 13-13.876 (recherche de reclassement) 
Cass. soc., 10 juin 2015, n° 14-10.031 (un PSE volontaire n'est pas soumis aux exigences légales) 
Cass. soc., 22 septembre 2015, n° 14-16.218 (si le salarié est informé des motifs économiques et de la priorité de réembauche postérieurement à son acceptation du CSP, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse) 
Cass. soc., 13 juin 2018, n° 16-17.865 (information des motifs de licenciement par mail) 
Cass. soc., 11 septembre 2019, n° 18-18.414 (le point de départ du délai pour contester le licenciement devant les prud'hommes n'est pas repoussé en cas de recours contre le PSE) 
Arrêté du 21 octobre 2019 (dématérialisation des procédures de licenciement économique collectif et de rupture conventionnelle collective) |
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