Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mercredi 13 janvier 2010
N° de pourvoi: 08-42562
Non publié au bulletin Cassation partielle
Mme Collomp (président), président
SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité de chauffeur ambulancier VSL le 2 mai 2002 par la société Alma ambulances ; qu'il a été déclaré le 23 mars 2005 inapte au groupe II par la médecine du Travail et licencié pour inaptitude le 7 juin 2005 ; que s'estimant notamment non rempli de ses droits en matière de rémunération, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de diverses sommes ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 3171-4 du code du travail et 3 du décret n° 2001-679 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport sanitaire, ensemble l'article 3.1 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 sur l'aménagement et la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié, l'arrêt retient que faute pour les parties de produire des éléments permettant à la Cour de déterminer le nombre d'heures de travail effectif réalisé par le salarié, il convient de s'en tenir aux dispositions de la loi qui fixe la durée hebdomadaire maximale d'heures de travail à 48 heures, soit 192 heures par mois, que l'employeur ayant réglé 168 heures, il reste dû au salarié chaque mois un complément de salaire majoré de 25 % correspondant à 24 heures supplémentaires, soit la somme de 4 891,60 euros correspondant pour la période concernée à 528 heures majorées" ;
Qu'en statuant ainsi, sans déterminer le nombre d'heures travaillées par le salarié, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur les deuxième et troisième moyen :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation des chefs du dispositif critiqués par le premier moyen entraîne par voie de conséquence celle des dispositions de l'arrêt relatives à la demande en paiement de repos compensateurs et aux indemnités liées à la rupture du contrat de travail ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a fixé le montant du salaire moyen mensuel du salarié,l'arrêt rendu le 1er avril 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la société Alma ambulances aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Alma ambulances à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé et signé par Mme Collomp, président, et Mme Ferré, greffier de chambre présente lors de la mise à disposition de l'arrêt, en l'audience publique du treize janvier deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité à 4.891,60 euros la somme devant être allouée à Monsieur Michel X... au titre des heures supplémentaires.
AUX MOTIFS QU'il résulte des dispositions de l'article L.212-1-1 du Code du travail et de la jurisprudence de la Cour de cassation, qu'en cas de litige pour déterminer l'existence et le nombre d'heures de travail effectuées dans l'entreprise, il appartient à l'employeur et au salarié qui revendique le paiement d'heures complémentaires ou supplémentaires, de fournir au juge les éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés dans l'entreprise ; que compte tenu de l'activité de l'entreprise, le transport de personnes en ambulance ou en véhicule sanitaire, les horaires de travail de Monsieur X..., salarié responsable de l'antenne de SAINT-MALO étaient fluctuants en fonction des réquisitions des services de police et de gendarmerie, des services d'urgence et de l'hôpital local, ce qui veut dire qu'il revient à l'employeur de décompter la durée du travail de chaque salarié : - soit quotidiennement, par enregistrement, selon tous moyens, des heures de début et de fin de chaque période de travail ou par le relevé du nombre d'heures de travail effectuées, - soit chaque semaine, par récapitulation, selon tous moyens, du nombre d'heures effectuées par chaque salarié, - soit imposer au salarié la tenue d'un cahier journalier ou d'une feuille de route comportant les heures des trajets effectués et les itinéraires ; que le fait que les services de cette agence, comme les autres entreprises locales de la même spécialité, puissent être l'objet de réquisitions de la part des services d'urgence à toute heure du jour ou de la nuit, ne permet pas d'en déduire que Monsieur X... était en permanence 24 heures sur 24 et pendant toute la semaine à la disposition de son employeur au sens de l'article L.212-4 du Code du travail et dans l'impossibilité de vaquer à ses occupations personnelles, alors que dans l'agglomération de SAINT4 MALO sont implantées au moins sept entreprises de transports sanitaires qui assuraient à tour de rôle ces permanences et que le salarié selon les attestations versées aux débats passait régulièrement une partie des fins de semaine à RENNES ; que les tableaux récapitulatifs édités par Monsieur X..., qui ne sont accompagnés d'aucun document objectif (feuilles de route, réquisitions, cahier journalier…) permettant de vérifier la réalité des heures de travail dont il demandé le paiement, ne peuvent qu'être rejetés puisque le salarié prétend avoir travaillé effectivement chaque mois sans interruption et sans prendre ni congés ni vacances pendant la période litigieuse d'août 2002 à mai 2004, le même nombre d'heures soit 498 heures, soit 20,75 heures de travail par semaine, ce qui est invraisemblable ; que faute pour les parties de produire des éléments permettant à la Cour de déterminer le nombre d'heures de travail effectif réalisé par Monsieur X..., il convient de s'en tenir aux dispositions de la loi qui fixe la durée hebdomadaire maxima d'heures de travail à 48 heures, soit 192 heures par mois, l'employeur ayant réglé 168 heures, il reste dû au salarié chaque mois un complément de salaire majoré de 25 % correspondant à 24 heures supplémentaires, soit la somme de 4.891,60 euros correspondant pour la période concernée à 528 heures majorées.
ALORS QUE le juge saisi d'un litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées doit former sa conviction tant sur l'existence que sur le nombre de ces heures, au besoin en recourant à une ou plusieurs mesures d'instruction ; qu'en retenant que les parties ne produisaient pas les éléments permettant de déterminer le nombre d'heures de travail réalisées pour limiter arbitrairement le rappel de salaires du au salarié à une somme correspondant à ce qui aurait été du si l'employeur s'était conformé aux dispositions légales relatives à la durée hebdomadaire maximale de travail, la Cour d'appel a violé l'article L.212-1-1 du Code du travail alors en vigueur, actuellement article L. 3171-4 du Code du travail.
ET ALORS QU'en refusant de déterminer le nombre d'heures travaillées, indispensable à la détermination des droits du salarié, la Cour d'appel s'est rendue coupable du déni de justice prévu à l'article 4 du Code civil.
ALORS en outre QU'en retenant que le salarié passait régulièrement une partie des fins de semaine à RENNES pour le débouter de ses demandes, quand cette circonstance, fut-elle avérée, ne contredisait en rien l'affirmation du salarié selon laquelle il était de garde un week-end sur quatre, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.
ALORS enfin QU'en retenant que la demande du salarié aurait été invraisemblable, pour l'en débouter, la Cour d'appel a statué par un motif dubitatif, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Michel X... de sa demande en paiement de repos compensateurs et congés payés y afférents.
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... qui, lors de son recrutement par ALMA AMBULANCES, a déclaré avoir été dirigeant d'une entreprise privée de transport sanitaire, n'ignorait donc pas la législation sur le temps de travail et le régime des repos compensateurs dans ce genre d'entreprise ; qu'or pendant l'exercice de son contrat de travail et jusqu'à la date de son licenciement, il n'a jamais réclamé le paiement d'heures supplémentaires ni le bénéfice de repos compensateur, le seul reproche que l'on peut faire à l'employeur qui reconnaît que son salarié a effectué des heures supplémentaires qui ont été en partie payées, c'est de n'avoir pas indiqué chaque mois à Monsieur X... le quantum des jours de repos compensateur qu'il pouvait réclamer ; qu'il lui sera accordé en réparation de ce préjudice la somme de 2.000 euros ; que les autres demandes non justifiées seront rejetées.
ALORS QUE l'absence de demande de prise du repos par le salarié ne peut entrainer la perte de son droit au repos ; qu'en retenant que Monsieur Michel X... n'avait jamais réclamé le bénéfice de repos compensateur pour le débouter de sa demande en paiement des repos compensateurs non pris et des congés payés y afférents, la Cour d'appel a violé l'article L.212-5-1 du Code du travail alors en vigueur, actuellement articles L. 3121-26 à L. 3121-29 du Code du travail.
ALORS en outre QUE la renonciation à un droit ne se présume pas ; qu'en retenant que Monsieur Michel X... n'avait jamais réclamé le bénéfice de repos compensateur pour le débouter de sa demande en paiement des repos compensateurs non pris et des congés payés y afférents, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité aux sommes de 3.547,50 euros, 354,75 euros, 2.635 euros et 11.000 euros les créances du salarié au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents, de l'indemnité de licenciement et des dommagesintérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
AUX MOTIFS QUE compte tenu de son salaire mensuel de base brut, calculé compte tenu des heures supplémentaires (1.186 euros) la société ALMA AMBULANCES doit lui verser les sommes suivantes : - indemnité compensatrice de préavis et congés payés : 3.547,50 euros et 354,75 euros, - indemnité de licenciement : 2.365 euros, - dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 11.000 euros.
ALORS QUE la cassation à intervenir sur les deux premiers moyens de cassation, ou même sur l'un des deux, emportera cassation par voie de conséquence du chef du dispositif critiqué au présent moyen, en application des dispositions de l'article 624 du Code de procédure civile.