Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mercredi 18 mars 2009
N° de pourvoi: 07-43324
Non publié au bulletin Cassation
M. Chauviré (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président
SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 132-8, alinéa 6, du code du travail devenu L. 2261-13, alinéa 1 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le Centre hospitalier du pays d'Eygurande a dénoncé le 15 mars 2002 un accord "inter-établissement" du 23 janvier 1969 dont l'article 10 prévoyait, en cas de congés de maladie, le maintien du salaire, sous déduction des indemnités journalières versées par la sécurité sociale et le régime de prévoyance ; qu'aucun accord ne lui a ultérieurement été substitué ; que M. X... qui n'avait pu obtenir du Centre hospitalier du pays d'Eygurande qui l'employait le paiement des trois jours de carence précédant le versement des indemnités journalières accordées au titre d'un congé de maladie pris en septembre 2003, a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande en paiement de ce salaire ainsi que d'une demande en paiement de dommages-intérêts en faisant valoir que le maintien du salaire en cas de congé de maladie constituait un avantage individuel acquis ; que le syndicat CFDT des services de santé et sociaux de la Corrèze et de la Creuse a aussi formé une demande de dommages-intérêts ;
Attendu que pour faire droit aux prétentions du salarié et de l'organisation syndicale, l'arrêt retient que constitue un avantage individuel acquis un avantage individuel ayant effectivement bénéficié dans le passé au salarié et que tel est le cas du maintien de la rémunération en cas d'arrêt de travail provoqué par la maladie, dont M. X... avait bénéficié lors d'arrêts de travail pour maladie antérieurs à la dénonciation de l'accord ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'accord dénoncé le 15 mars 2002 qui n'avait pas été remplacé par un nouvel accord dans les délais prévus par l'alinéa 3 de l'article L. 132-8, devenu l'alinéa 1 de l'article L. 2261-11, ne continuait à produire effet que jusqu'à leur expiration, la cour d'appel qui a constaté que le congé de maladie de septembre 2003 avait commencé postérieurement à ces délais, ce dont il résulte que le maintien du salaire pour ce congé de maladie ne correspondait pas à un droit déjà ouvert et ne constituait pas un avantage individuel que l'intéressé avait acquis, en application de l'accord, à l'expiration desdits délais, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 mai 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne M. X... et le syndicat CFDT des services de santé et sociaux de la Corrèze et de la Creuse aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt.
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour l'association Centre hospitalier du pays d'Eygurande.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le maintien du salaire en cas de maladie constitue un avantage individuel acquis au sens de l'article L. 132-8 du Code du travail incorporé au contrat de travail de Jean-François X... et d'AVOIR en conséquence condamné l'Association CENTRE HOSPITALIER du PAYS d'EYGURANDE à verser à Monsieur X... la somme de 194,66 au titre de rappels de salaire et celle de 300 au titre de dommages et intérêts, ainsi que la somme d'un euro symbolique au Syndicat CFDT des Services de Santé et Sociaux de la CORREZE et de la CREUSE ;
AUX MOTIFS QU' « il est constant entre les parties que l'accord d'entreprise qui prévoyait le maintien du salaire pendant les arrêts de maladie a été dénoncé par l'employeur le 15 mars 2002 et qu'aucun autre accord ne lui a été substitué ; qu'aux termes de l'alinéa 6 de l'article L. 132-8 du Code du travail les salariés conservent les avantages individuels qu'ils ont acquis en application de cet accord à l'expiration des délais pendant lesquels il continue à produire effet ; que les avantages acquis s'entendent des avantages ayant effectivement bénéficié dans le passé au salarié (en ce sens, Soc. 31 mars 1998, D. 1998, IR 123) ; que tel est le cas en l'espèce, Jean-François X... ayant bénéficié du maintien de son salaire en cas d'arrêt maladie avant la dénonciation de l'accord ; qu'en conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement » ;
ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE « l'accord d'établissement du 23 janvier 1969 dans son article 10 prévoyait le maintien du salaire en cas de maladie ; que cet accord a été dénoncé le 15 mars 2002 par l'employeur sans qu'aucun accord de substitution ne soit trouvé ; que le maintien de salaire contenu dans l'accord dénoncé procurait indiscutablement au salarié une rémunération, un droit dont il ne peut bénéficier en vertu de la seule Convention collective nationale ; qu'il s'agit donc d'un avantage pour le salarié ; que Monsieur X... produit aux débats plusieurs bulletins de salaire antérieurs à la dénonciation de l'accord collectif concernant des périodes durant lesquelles il a été arrêté pour maladie ; que de ce fait, il s'agit bien d'un avantage individuel acquis ; qu'il sera donc fait droit dans ces conditions à la demande de Monsieur X... concernant le paiement des trois jours de carence » ;
ALORS D'UNE PART QU'un avantage individuel acquis au sens de l'article L.132-8 du Code du travail est celui qui, au jour de la dénonciation de la convention ou de l'accord collectif, procurait au salarié une rémunération ou un droit dont il bénéficiait à titre personnel et qui correspondait à un droit déjà ouvert et non simplement éventuel ; que pour dire que l'avantage dont l'application était revendiquée par Monsieur X... était un avantage individuel acquis, la Cour d'appel s'est contentée d'énoncer que les avantages acquis s'entendent des avantages ayant effectivement bénéficié dans le passé au salarié et que tel était le cas en l'espèce, Jean-François X... ayant bénéficié du maintien de son salaire en cas d'arrêt maladie avant la dénonciation de l'accord ; qu'en condamnant dès lors l'Association exposante à payer à Monsieur X... une somme de 194,66 à titre de rappel de salaire correspondant au délai de carence des trois premiers jours du congé maladie du salarié et celle de 300 au titre de dommages et intérêts, sans constater que l'avantage en question consistait en un droit ouvert et non éventuel, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 132-8 du Code du travail ;
ALORS D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE QU' un avantage individuel acquis au sens de l'article L. 132-8 du Code du travail est celui qui procure au salarié une rémunération ou un droit déjà ouvert et non simplement éventuel ; que le bénéfice du droit au maintien du salaire en cas de maladie est subordonné à un événement dont la survenance est éventuelle et accidentelle, ce dont il résulte que ledit droit constitue un droit seulement éventuel ; qu'il ne peut donc constituer un avantage acquis au sens de l'article L. 132-8 du Code du travail, peu important que le salarié en ait bénéficié au jour de la dénonciation ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article L. 132-8 du Code du travail.