Jurisprudence sociale
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Cassation sociale, 26 septembre 2012, n° 11-18.783
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 26 septembre 2012 N° de pourvoi: 11-18783 Publié au bulletin Rejet
M. Lacabarats (président), président SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Vincent et Ohl, avocat(s)
Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 1er avril 2011), que M. X... a été engagé par la société Toulouse football club en qualité d'entraîneur formateur selon un contrat de travail à durée déterminée du 12 juillet 2002 au 30 juin 2004 ; que ce contrat a fait l'objet d'avenants et de renouvellement en dernier lieu pour la période du 1er juillet 2007 au 30 juin 2010 ; qu'à la suite d'une altercation avec un autre salarié, l'employeur a procédé à son " licenciement " pour faute grave ; que contestant cette rupture, M. X... a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la rupture du contrat de travail ne reposait sur aucune faute grave et de le condamner au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges ne peuvent faire application d'un texte conventionnel illégal ; qu'une convention ou un accord collectif ne peut avoir pour effet d'empêcher la rupture du contrat de travail pour faute grave du salarié, et encore moins imposer à l'employeur de recourir à la résiliation judiciaire du contrat, laquelle est interdite par la loi ; que l'article 681 de la Charte du football professionnel qui dispose que : « le contrat de l'éducateur (…) n'est pas résolu de plein droit si l'une des parties ne satisfait pas à son engagement ; conformément aux dispositions de l'article 1184 du code civil, la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté a le choix soit ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible ou de demander la résolution avec dommages-intérêts ; que toutefois et indépendamment des droits des parties de poursuivre en justice la résolution, le litige doit être porté devant la commission juridique » imposait comme seul mode de rupture du contrat de travail sa résiliation judiciaire et obligeait les parties à saisir, à l'occasion de ce mode de rupture obligatoire, une commission juridique de conciliation ; qu'en considérant que ces dispositions faisaient obligation à l'employeur de saisir la commission juridique préalablement à la rupture anticipée du contrat pour faute grave, ce que ne prévoyait nullement le texte qui se bornait à imposer le respect d'obligations illégales, la cour d'appel a violé les articles 681 et 51 de la Charte du football professionnel, ensemble l'article L. 1243-1 du code du travail ;
2°/ que l'article 681 de la Charte du football professionnel qui impose, en cas de litige sur l'exécution du contrat, à porter ce dernier devant une commission « indépendamment » de la « poursuite en justice de la résolution du contrat », n'oblige à saisir ladite commission qu'en cas d'action en résiliation judiciaire d'une part, ne prévoit pas une saisine antérieure à cette action d'autre part, ni à aucun autre mode de rupture qui n'est pas même envisagé ; qu'en considérant que ces dispositions faisaient obligation à l'employeur de saisir la commission juridique préalablement à une rupture anticipée du contrat du contrat pour faute grave, la cour d'appel a violé les articles 681 et 51 de la charte du football professionnel ;
3°/ qu'il résultait des courriers du conseil de M. X... saisissant la commission juridique, qu'il ne réclamait pas seulement l'autorisation de signer avec un autre club, mais aussi de « prendre acte de la rupture intervenue » (courrier du 10 juillet 2008), ainsi que « d'obtenir l'ensemble des indemnités auxquelles il a contractuellement et conventionnellement droit » (courrier du 27 juin 2008) ; qu'en conséquence de cette saisine, la Commission avait, par décision du 15 juillet 2008, « enregistré la résiliation en date du 14 mai 2008 » ; qu'en considérant que la saisine de la commission se limitait à la possibilité de signer avec un autre club, la cour d'appel a dénaturé les courriers suscités ensemble la décision de la commission, et a méconnu l'interdiction faite aux juges de dénaturer les documents de la cause ;
4°/ que constitue une faute grave le fait, pour un salarié, de se rendre responsable, au temps et lieu du travail, de violences physiques envers un subordonné entraînant un arrêt de travail de ce dernier ; que la qualification de faute grave s'impose a fortiori lorsque l'auteur de tels agissements a pour mission d'encadrer et de former des enfants et des adolescents ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont constaté que M. X... qui occupait un poste d'« entraineur formateur » dans un centre de formation de jeunes footballeurs (enfants et adolescents), « plus particulièrement chargé de la direction » dudit centre, avait, à l'occasion d'une réunion professionnelle, frappé l'un de ses subordonnés ; que ces violences qui relevaient d'une contravention de quatrième classe, avaient donné lieu à une condamnation pénale ; qu'il était constant que la victime de M. X..., qui avait souffert de lésions physiques à la suite de cette agression, avait fait l'objet d'un arrêt de travail durant dix jours ; que pour décider que le comportement de M. X..., qu'elle a qualifié de « manifestement fautif » n'était pas constitutif d'une faute grave, la cour d'appel a retenu que l'employeur, qui n'avait pas mis à pied immédiatement M. X..., avait établi un communiqué à la presse où il n'incriminait pas ce dernier ; que de plus les incidents n'auraient pas été rares au sein du club ; qu'enfin il n'était pas prouvé que les violences de M. X... avaient perturbé le fonctionnement dudit club qui, « par ailleurs », voulait se réorganiser ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants au regard des faits constatés dont il résultait une faute grave, la cour d'appel a violé l'article L. 1243-1 du code du travail ;
5°/ qu'en affirmant que « ce genre d'incident n'avait manifestement pas été rare au sein du TFC sans que des sanctions allant jusqu'au licenciement pour faute grave soient nécessairement prises » et qu'il « existait au sein du club une volonté manifeste de réorganisation », sans préciser ni la consistance et les auteurs desdits incidents, ni la nature et l'ampleur de la réorganisation visée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il résulte des dispositions combinées des articles 51 et 681 de la charte du football professionnel, qui a valeur de convention collective, que lorsque l'employeur envisage la rupture du contrat de travail d'un éducateur professionnel en raison d'un manquement de ce dernier à ses obligations, le litige doit être porté devant la commission juridique qui convoque immédiatement les parties et tente de les concilier ; que l'intervention de cette commission constitue une garantie de fond pour le salarié ;
Et attendu qu'ayant constaté que l'employeur n'avait pas porté le litige devant la commission juridique aux fins de conciliation, la cour d'appel en a exactement déduit que le salarié ayant été privé d'une garantie de fond, la rupture du contrat de travail à durée déterminée n'était pas justifiée ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en ses quatrième et cinquième branches, n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Toulouse football club aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Toulouse football club à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Toulouse football club.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la rupture du contrat de M. X... ne reposait pas sur une faute grave, d'AVOIR condamné l'exposante à payer à M. X... les sommes de 3593, 86 euros au titre du salaire du 28 avril au 13 mai 2008, de 165 000 euros au titre de l'indemnité équivalente au salaire jusqu'au terme du contrat, de 29000 euros au titre des primes d'objectifs sur la durée du contrat restant à courir, de 6324 euros au titre de la voiture de fonction, de 2550 euros au titre du téléphone portable, de l'AVOIR condamnée aux dépens ainsi qu'au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « M. Jean Marc X... a été embauché, en qualité d'entraîneur formateur, par le SASP TOULOUSE FOOTBALL CLUB, suivant contrat de travail à durée déterminée du 12 juillet 2002 au 20 juin 2004. Ce contrat été suivi d'un autre contrat à durée déterminée, toujours en cette même qualité d'entraîneur formateur, prenant date au 10 juillet 2004, pour se terminer le 30 juin 2007 puis de divers avenants, le dernier avenant de renouvellement ayant été conclu pour la période du 10 juillet 2007 au 30 juin 2010. Suivant courrier recommandé en date du 8 avril 2008, l'employeur l'a convoqué à un entretien préalable fixé au 15 avril 2008. Le 8 avril 2008, M. X... a fait l'objet d'un arrêt de travail pour maladie jusqu'au 15 avril 2008. A compter du 17 avril 2008 et jusqu'au 27 avril 2008, il a, à nouveau, été en situation d'arrêt de travail pour maladie. Par lettre remise en main propre contre décharge le 28 avril 2008, il a été convoqué à un nouvel entretien préalable fixé au 7 mai 2008 et ce, avec mise à pied conservatoire à effet immédiat ; le 13 mai 2008, la SASP TOULOUSE FOOTBALL CLUB a adressé à M. X... un courrier ainsi rédigé : " Nous avons eu à déplorer de votre part un agissement constitutif d'une faute grave, ce dont nous vous avons fait part lors notre entretien du 7 mai 2008. Le 7 avril 2008, à l'occasion d'un entretien dans votre bureau, une rixe a éclaté entre vous et Monsieur Y..., un autre salarié de la SASP Toulouse Football Club (ci-après « le Club »)), Il en est résulté un arrêt de travail temporaire d'une durée de 10 jours pour Monsieur Y.... Ces faits ont été établis en se fondent sur les pièces et éléments tournis par Monsieur Y..., le témoignage de Monsieur C... qui s'est interposé entre vous et vos propres déclarations, notamment votre compte-rendu écrit en date du 21 avril 2008 ; Vous assurez la direction du centre de formation du Club. Vous êtes par conséquent le supérieur direct de Monsieur Y..., qui est l'entraîneur en charge de l'équipe des moins de 16 ans. Votre grave altercation avec lui a perturbé le bon fonctionnement du centre de formation à une période cruciale de son fonctionnement, en pleine phase de recrutement en vue de la saison prochaine. L'attitude menaçante et violente dont vous avez fait preuve le 7 avril 2008 contrevient en outre aux dispositions de l'article 2 du Règlement Intérieur du Club applicable pour la saison 2007-2008, règlement intérieur lui-même édicté en tenant compte des finalités rappelées à l'article 150 de la Charte du Football Professionnel :- : faire prendre conscience à tous que la vie en communauté implique une discipline collective qui doit être librement consentie, car le respect de certaines règles permet à chacun de voir sauvegarder ses droits et sa personnalité, donner aux joueurs la possibilité de travailler dans les meilleures conditions possibles et développer chez eux le sens de la responsabilité ; assurer la sécurité physique et morale de tous. Vous avez par ailleurs contrevenu aux dispositions de l'article 650 de la Charte du Football Professionnel qui précise notamment que l'éducateur de football doit également, en servant d'exemple, veiller à la bonne tenue des joueurs sur le terrain et hors du terrain » Enfin, le retentissement médiatique de cette altercation a porté atteinte à l'image du Club, en témoigne les articles parus dans la presse locale et nationale. Votre conduite met ainsi en cause la bonne marche du Club et celle de son centre de formation. Les explications recueillies auprès de vous au cours notre entretien du 7 mai 2008 ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet, nous vous informons que nous avons, par conséquent, décidé de vous licencier pour faute grave. Compte tenu de la gravité des éléments susvisés, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible. Pour les mêmes raisons, nous vous confirmons la mise à pied conservatoire dont vous faites l'objet depuis le 28 avril 2008. Votre licenciement prend donc effet immédiatement dès réception de cette lettre » ; Contestant cette rupture, M. X... a saisi, le 15 juillet 2008, le Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE. Suivant jugement en date du 10 novembre 2009, cette juridiction a dit que la rupture ou contrat à durée déterminée ne repose pas sur une faute grave, a condamné la SASP TOULOUSE FOOTBALL CLUB à payer à M. X... les sommes de 4 • 267 euros au titre du salaire du 28 avril au 13 mai 2008, de 165. 000 euros au titre de l'indemnité équivalente au salaire jusqu'au terme du contrat, de 69. 600 euros au titre des primes sur objectifs sur la durée du contrat restant à courir, de 6. 324 euros au titre de la voiture de fonction, de 2. 550 euros au titre du téléphone portable, de 39. 000 euros au titre de la prime d'ancienneté et de Î. 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, a dit n'y avoir lieu à exécution provisoire autre que de droit et a fixé la moyenne des trois derniers mois à 6. 748, 60 euros. La SASP TOULOUSE FOOTBALL CLUB a relevé appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui n'apparaissent pas critiquables ; Reprenant oralement ses conclusions déposées au greffe le 9 février 2011 auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de ses moyens, la SASP TOULOUSE FOOTBALL CLUB demande à la Cour de réformer " en toutes ses dispositions le jugement déféré et à titre principal de constater le bien fondé de la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée de M. X... et par conséquent, de le débouter de l'intégralité de ses demandes. A titre subsidiaire, il demande à la Cour de constater le caractère erroné et excessif des demandes indemnitaires formulées par M. X... et par conséquent, de fixer le montant des rappels de salaires dus à ce dernier à la somme de 3. 593, 86 euros et de débouter M. X... de ses demandes concernant le paiement de prétendues primes d'objectifs et d'ancienneté. En tout état de cause, il sollicite, la condamnation de M. X... au paiement de la somme de 5. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Dans ses écritures du 9 février 2011 réitérées oralement, auxquelles il y a lieu, également, de se reporter pour l'exposé de ses moyens. M. X... demande, au contraire à la Cour, de dire l'appel mal fondé, en conséquence de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré et y ajoutant, de condamner " la SASP TOULOUSE FOOTBALL CLUB au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile :- sur la saisine de la Commission Juridique : selon l'article 51 de la Charte du Football Professionnel qui a valeur de convention collective, la Commission Juridique de la Ligue Nationale de Football a compétence notamment " pour tenter de concilier les parties en cas de manquements aux obligations découlant d'un contrat passé par un club avec un joueur, un éducateur. Il y a lieu d'entendre par manquements tous ceux de nature à empêcher la poursuite normale des relations entre les parties en cause, étant entendu toutefois que le contrat du joueur, de l'éducateur s'exécutant conformément à l'article 1780 du code civil et au titre 1 du code du travail n'est pas résilié de plein droit si l'une des parties ne satisfait pas à son engagement " et " pour prendre à titre conservatoire, en cas de non conciliation dûment constatée et indépendamment des recours judiciaires qui peuvent être entreprise, la décision d'autoriser ou non la signature du joueur, de l'éducateur dans un autre club et en règle générale toute décision de caractère sportif qu'imposerait la situation ainsi créée " ; L'article 681 de la Charte précise : " 1- le contrat de l'éducateur s'exécute conformément à l'article 1780 du code civil et au titre 1 du code du travail. Il n'est pas résolu de plein droit si l'une des parties ne satisfait pas à son engagement. Conformément aux dispositions de l'article 1184 du code civil ; la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté a le choix soit ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible ou de demander la résolution avec dommages intérêts. Toutefois et indépendamment des droits des parties de poursuivre en justice la résolution, le litige doit être porté devant la commission juridique. 2- le litige peut être porté en appel devant la commission nationale paritaire d'appel qui immédiatement tente à nouveau la conciliation qui pourra intervenir sur les bases suivantes. a) indemnité correspondant au préjudice financier réel impliquant l'exécution financière des clauses du contrat b) indemnité de réparation du préjudice moral et professionnel laissée à l'appréciation de la commission compétente avec toutefois un minimum de six mois de salaire fixe. Il en résulte que lorsque l'employeur envisage la rupture du contrat de travail de l'éducateur, le litige doit être porté devant la Commission Juridique qui convoque les parties et tente de les concilier, l'intervention de cette commission constituant une garantie de fond pour le salarie. Cette saisine est obligatoire et elle doit nécessairement intervenir avant la rupture s'agissant d'une garantie conventionnelle imposant à l'employeur le respect de règles procédurales de rupture plus contraignantes que celles prévues par la loi. Or, il ne peut être que constaté que la SASP TOULOUSE FOOTBALL CLUB a procédé à la rupture anticipée pour faute grave du contrat de travail à durée déterminée du salarie sans avoir saisi cet organisme préalablement à la décision de rupture qu'elle envisageait de prendre, la saisine de la Commission Juridique par le salarié, une fois la rupture consommée et alors au surplus que cette saisine était limitée à la possibilité pour ce dernier d'être autorisé ; 3 signer dans un autre club étant indifférente à cet égard et ne saurait permettre une régularisation, a posteriori, de la défaillance de fond ainsi commise par l'employeur. Le non-respect par l'employeur de garanties conventionnelles constitutives de garanties de fond prive la rupture à l'initiative de l'employeur de toute légitimité indépendamment des motifs de celle-ci ;- sur les conséquences de la rupture : En application des dispositions de l'article L 1243-4 du code du travail, dans le cas d'une rupture abusive du contrat de travail à durée déterminée ; le salarié est en droit de prétendre à des dommages intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat, ce qui au cas présent représente une somme d'un montant de 165. 000 euros qui n'est pas critiqué par l'employeur. Il a également, droit au salaire durant la mise à pied conservatoire du 28 avril au 13 mai 2008 et dont il a été injustement privé. Le montant du rappel de salaire dû à ce titre à M. X... doit être calculé sur son seul salaire brut de base, l'intéressé ayant, durant la période de mise à pied, continué à bénéficier de ses divers avantages en nature (voiture et téléphone) ainsi qu'il résulte des pièces du dossier et notamment, du courrier recommandé de l'employeur en date du 13 mai 2008 lui réclamant cette restitution. Par conséquent, le montant du rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire doit être fixé à la somme de 3. 593, 86 euros. Les indemnités fixées par le premier juge au titre de la voiture de fonction et du téléphone portable ne font l'objet d'aucune discussion de la part des parties ; sur les primes d'objectifs : Par courrier du mai 2007, le Club a indiqué à M. X... que lors de chaque saison contractuelle (saisons 07-08, 08-09, 09-10), il lui définirait un plan de bonus lui donnant droit, en fonction du pourcentage de réalisation de ses objectifs annuels fixés par le Club, au versement d'une prime brute pouvant représenter jusqu'à 30 % de son salaire annuel de base. Il n'est pas justifié d'objectifs annuels fixés par le Club pour la saison 2007-2008 et le contrat de travail a été rompu le 13 mai 2008. Il est constant, par ailleurs, qu'au cours des cinq saisons précédentes, M. X... a bénéficié d'une prime d'objectifs annuelle moyenne de euros. Il n'est produit aux débats aucun élément relativement aux performances qui ont pu être réalisées par M. X... au cours de la saison 2007-2008 et qui auraient pu lui permettre d'obtenir, en fin de saison, une prime d'objectifs dépassant la moyenne de celles obtenues au cours des saisons précédentes. La rupture du contrat de travail à la date du 13 mai 2008 a indéniablement privé M. X... d'une chance de percevoir des primes d'objectifs à l'issue des saisons 2007-2008, 2008-2009 et 2009-2010 ; en cas de perte de chance, la réparation du dommage ne peut être que partielle, étant précisé que la réparation du dommage résultant de la perte d'une chance ne présente pas un caractère forfaitaire mais correspond à une fraction des différents préjudices subis. Cette perte de chance doit, par conséquent, être compensée. en considération des données de la cause et des primes obtenues les années précédentes, par l'allocation à M. X... d'une somme de 29. 000 euros » ;
1. ALORS QUE les juges ne peuvent faire application d'un texte conventionnel illégal ; qu'une convention ou un accord collectif ne peut avoir pour effet d'empêcher la rupture du contrat de travail pour faute grave du salarié, et encore moins imposer à l'employeur de recourir à la résiliation judiciaire du contrat, laquelle est interdite par la loi ; que l'article 681 de la Charte du Football professionnel qui dispose que : « le contrat de l'éducateur (…) n'est pas résolu de plein droit si l'une des parties ne satisfait pas à son engagement ; conformément aux dispositions de l'article 1184 du code civil, la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté a le choix soit ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible ou de demander la résolution avec dommages intérêts ; toutefois et indépendamment des droits des parties de poursuivre en justice la résolution, le litige doit être porté devant la commission juridique » imposait comme seul mode de rupture du contrat de travail sa résiliation judiciaire et obligeait les parties à saisir, à l'occasion de ce mode de rupture obligatoire, une commission juridique de conciliation ; qu'en considérant que ces dispositions faisaient obligation à l'employeur de saisir la commission juridique préalablement à la rupture anticipée du contrat pour faute grave, ce que ne prévoyait nullement le texte qui se bornait à imposer le respect d'obligations illégales, la Cour d'appel a violé les articles 681 et 51 de la Charte du Football professionnel, ensemble l'article L. 1243-1 du Code du travail ;
2. ALORS QUE l'article 681 de la Charte du football professionnel qui impose, en cas de litige sur l'exécution du contrat, à porter ce dernier devant une commission « indépendamment » de la « poursui te en justice de la résolution du contrat », n'oblige à saisir ladite commission qu'en cas d'action en résiliation judiciaire d'une part, ne prévoit pas une saisine antérieure à cette action d'autre part, ni à aucun autre mode de rupture qui n'est pas même envisagé ; qu'en considérant que ces dispositions faisaient obligation à l'employeur de saisir la commission juridique préalablement à une rupture anticipée du contrat du contrat pour faute grave, la Cour d'appel a violé les articles 681 et 51 de la charte du Football professionnel ;
3. ALORS QU'il résultait des courriers du conseil de M. X... saisissant la commission juridique, qu'il ne réclamait pas seulement l'autorisation de signer avec un autre club, mais aussi de « prendre acte de la rupture intervenue » (courrier du 10 juillet 2008), ainsi que « d'obtenir l'ensemble des indemnités auxquelles il a aurait contractuellement et conventionnellement droit » (courrier du 27 juin 2008) ; qu'en conséquence de cette saisine, la Commission avait, par décision du 15 juillet 2008, « enregistré la résiliation en date du 14 mai 2008 » ; qu'en considérant que la saisine de la commission se limitait à la possibilité de signer avec un autre club, la Cour d'appel a dénaturé les courriers suscités ensemble la décision de la commission, et a méconnu l'interdiction faite aux juges de dénaturer les documents de la cause ;
ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES QUE « Monsieur X... a été embauché en qualité d'entraîneur formateur selon contrat à durée déterminée du 12 juillet 2002 jusqu'au 30 juin 2004. Il était plus particulièrement chargé de la direction de l'entraînement des joueurs du centre de formation. Ce contrat à durée déterminée a fait l'objet d'avenants et de renouvellements. Le dernier avenant a été conclu pour la période du 1 er juillet 2007 au 30 juin 2010. Il a fait l'objet selon lettre du 13 mai 2008 d'un " licenciement " pour faute grave. S'agissant d'un contrat à durée déterminée, c'est la rupture du contrat qui doit être envisagée dans les conditions de l'article L 1243-1 du code du travail. Il en résulte que le contrat à durée déterminée ne peut être rompu par anticipation, sauf accord des parties, que pour faute grave ou en cas de force majeure. Aux tenues de la lettre de rupture, l'employeur reprochait à Monsieur X... une altercation avec un de ses subordonnés, altercation ayant perturbé le bon fonctionnement du centre de formation à une période cruciale de son fonctionnement. Il ajoutait que l'attitude violente dont avait fait preuve Monsieur X... contrevenait aux dispositions du règlement intérieur et que le retentissement médiatique de l'altercation avait porté atteinte à l'image du club. Les faits en eux mêmes sont établis. Il apparaît que le 7 avril 2008 Monsieur X... a eu une altercation avec un de ses subordonnés. Il a exercé à son encontre des violences relevant d'une contravention de 4ème classe et a été condamné de ce chef par la juridiction de proximité au paiement d'une amende contraventionnelle par décision du 6 mai 2009. Des faits de violence sur le lieu de travail à l'encontre d'un subordonné constituent manifestement une attitude fautive dans la mesure, où, même s'il n'est pas contesté que l'attitude de ce subordonné a pu être également fautive, Monsieur X... devait être en mesure d'exercer son autorité de façon adaptée. La seule question est donc celle de l'appréciation de la gravité de cette attitude fautive. En effet, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, seule la faute grave peut justifier la rupture du contrat à durée déterminée, c'est à dire une faute d'une gravité suffisante pour que le maintien du salarié dans l'entreprise y compris pendant un temps restreint ne puisse être envisagée. Or, il apparaît que l'attitude de l'employeur a été pour le moins hésitante. En effet, dès le lendemain de cette altercation, Monsieur X... était convoqué à un entretien fixé au 15 avril 2008 (pièce 9). Cet entretien n'a pas eu lieu puisque le 15 avril il résulte des propres affirmations de l'employeur, que Monsieur X... était à la gendarmerie pour déposer plainte pour des faits étrangers au présent débat. Quoiqu'il en soit, il est constant qu'à la date de la convocation, l'employeur ne prenait aucune mesure de mise à pied conservatoire. Ce n'est que postérieurement et plus précisément dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, datée du 28 avril 2008 que l'employeur a pris une décision de mise à pied conservatoire. Il apparaît donc qu'entre le 7 avril et le 28 avril, l'employeur n'a pas considéré que l'éviction immédiate de l'entreprise s'imposait. Cet élément est en lui-même insuffisant pour considérer qu'il n'y avait pas faute grave, au regard notamment de la situation d'arrêt de travail de Monsieur X..., mais il n'en demeure pas moins, qu'elle n'était pas immédiatement perçue comme telle par l'employeur. D'ailleurs, le 19 avril 2008, l'employeur établissait lm communiqué aux termes duquel il expliquait l'absence de Monsieur X... par le choc émotionnel causé par l'infraction dont il avait été victime à son domicile et non par le fait qu'il avait commis une faute disciplinaire. Ce n'est que près de 10 jours après un tel communiqué où il démentait les informations selon lesquelles l'altercation était à l'origine de l'éviction qu'il a pris la mesure de mise à pied conservatoire. En outre, l'altercation elle-même se plaçait dans un contexte où ce genre d'incident n'avait manifestement pas été rare au sein du TFC et ce, sans que des sanctions allant jusqu'à la rupture pour faute grave soient nécessairement prises. Or, le caractère exemplaire invoqué par l'employeur au titre des valeurs éducatives ne peut se comprendre que si les débordements ne sont jamais tolérés. Il existait par ailleurs une volonté manifeste de réorganisation qui ne saurait elle, procéder d'une faute grave. Enfin, aucun élément n'est produit sur l'atteinte au bon fonctionnement du centre de formation, l'employeur procédant sur ce point par voie d'affirmation. De l'ensemble de ces éléments il se déduit que l'employeur ne rapporte pas la preuve de ce que les faits, certes fautifs, commis par Monsieur X... relevaient d'une faute grave. Il ne pouvait donc y avoir lieu à rupture du contrat à durée déterminée. Monsieur X... peut donc prétendre à des indemnités correspondant aux rémunérations qu'il aurait dû percevoir jusqu'à la fin du contrat. Le calcul des indemnités telles que chiffrées par Monsieur X... et correspondant à l'ensemble de la rémunération avec ses accessoires, n'est pas spécialement discuté. En revanche, le demandeur ne rapporte pas la preuve d'un préjudice moral spécifique qui ne serait pas réparé par ces indemnités, il sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts. Les indemnités seront donc fixées ainsi que suit : (…) ; 165 000, 00 € au titre de L'indemnité équivalente au salaire jusqu'au terme du contrat, 6 324, 00 € au titre de la voiture de fonction, 2 550, 00 € au titre du téléphone portable, 39000, 00 € au titre de la prime d'ancienneté. Il n'est pas justifié d'une urgence telle que l'exécution provisoire autre que de droit doive être ordonnée. Pour les besoins de l'exécution provisoire de droit, la moyenne des trois derniers mois sera fixée à 6748, 60 € » ;
1. ALORS QUE constitue une faute grave le fait, pour un salarié, de se rendre responsable, au temps et lieu du travail, de violences physiques envers un subordonné entraînant un arrêt de travail de ce dernier ; que la qualification de faute grave s'impose a fortiori lorsque l'auteur de tels agissements a pour mission d'encadrer et de former des enfants et des adolescents ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont constaté que M. X... qui occupait un poste d'« entraineur formateur » dans un centre de formation de jeunes footballeurs (enfants et adolescents), « plus particulièrement chargé de la direction » dudit centre, avait, à l'occasion d'une réunion professionnelle, frappé l'un de ses subordonnés ; que ces violences qui relevaient d'une contravention de quatrième classe, avaient donné lieu à une condamnation pénale ; qu'il était constant que la victime de M. X..., qui avait souffert de lésions physiques à la suite de cette agression, avait fait l'objet d'un arrêt de travail durant 10 jours ; que pour décider que le comportement de M. X..., qu'elle a qualifié de « manifestement fautif » n'était pas constitutif d'une faute grave, la Cour d'appel a retenu que l'employeur, qui n avait pas mis à pied immédiatement M. X..., avait établi un communiqué à la presse où il n'incriminait pas ce dernier ; que de plus les incidents n'auraient pas été rares au sein du club ; qu'enfin il n'était pas prouvé que les violences de M. X... avaient perturbé le fonctionnement dudit club qui, « par ailleurs », voulait se réorganiser ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants au regard des faits constatés dont il résultait une faute grave, la Cour d'appel a violé l'article L. 1243-1 du Code du Travail ;
2. ET ALORS QU'en affirmant que « ce genre d'incident n'avait manifestement pas été rare au sein du TFC sans que des sanctions allant jusqu'au licenciement pour faute grave soient nécessairement prises » et qu'il « existait au sein du club une volonté manifeste de réorganisation », sans préciser ni la consistance et les auteurs desdits incidents, ni la nature et l'ampleur de la réorganisation visée, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
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