Cassation sociale, 12 décembre 2012, n° 11-20.135 cassation sociale - Editions Tissot

Jurisprudence sociale

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Cassation sociale, 12 décembre 2012, n° 11-20.135

Le juge ne peut pas requalifier d'office un CDD en CDI sans que le salarié lui en fasse la demande.

Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mercredi 12 décembre 2012
N° de pourvoi: 11-20135
Non publié au bulletin Cassation partielle

M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président
SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, avocat(s)


Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1243-1, L. 1245-1 du Code du travail et 12 du Code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er septembre 2005 par le Centre interdisciplinaire de recherche comparative en sciences sociales (CIR) en vertu d'un contrat à durée déterminée aux fins de "renforcer l'équipe du pôle Espaces publics-espaces politiques dans le cadre du projet européen Eurocoop" ; que le contrat prévoyait une période d'essai de trois mois et stipulait qu'il prendrait fin au terme du projet ; que le CIR ayant notifié le 30 novembre 2005 au salarié la rupture de sa période d'essai, celui-ci a saisi la juridiction prud'homale de demandes de rappel de salaire, d'indemnité pour fin de contrat et d'indemnité pour travail dissimulé ;

Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes, l'arrêt retient que le contrat, qui ne comporte pas les mentions légales obligatoires et prévoit une période d'essai incompatible avec un contrat à durée déterminée, doit être requalifié en contrat à durée indéterminée et que la rupture est intervenue au cours de la période d'essai ;

Attendu, cependant, que si en vertu de l'article 12 du Code de procédure civile la qualification d'un contrat de travail dont la nature juridique est indécise relève de l'office du juge, celui-ci ne peut toutefois, en application de l'article L. 1245-1 du Code du travail, requalifier d'office un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, les dispositions prévues par les articles L. 1242-1 et suivants du Code du travail, relatives au contrat de travail à durée déterminée, ayant été édictées dans un souci de protection du salarié qui peut seul se prévaloir de leur inobservation ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, en prononçant, en l'absence de demande du salarié, la requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, excepté en ce qu'elle condamne le Centre interdisciplinaire de recherche comparative en sciences sociales à payer à M. X... la somme de 493,35 euros à titre de rappel de salaire de septembre à novembre 2005, l'arrêt rendu le 29 septembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne le Centre interdisciplinaire de recherche comparative en sciences sociales aux dépens ;

Condamne le Centre interdisciplinaire de recherche comparative en sciences sociales à payer à la SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, qui renonce, en tant que de besoin, au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle, la somme de 2.500 euros en application des articles 700 du Code de procédure civile et 37 alinéa 2 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, avocat aux Conseils, pour M. Giancarlo X....

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir requalifié le contrat de travail à durée déterminée de M. X... en contrat à durée indéterminée et de l'avoir débouté en conséquence de ses demandes au titre des salaires jusqu'au 31 décembre 2007, au titre de la rupture abusive et de l'indemnité de précarité ainsi que pour travail dissimulé ;

Aux motifs que « sur la qualification du contrat du 1er septembre 2005»
«considérant qu'en vertu de l'article L. 1242-12 du Code du travail le contrat de travail à durée déterminée doit, notamment, comporter :

2° la date du terme et, le cas échéant, une clause de renouvellement lorsqu'il comporte un terme précis ;

3° la durée minimale pour laquelle il est conclu lo rsqu'il ne comporte pas de terme précis ;

6° la durée de la période d'essai éventuellement pr évue, étant observé qu'en application de l'article L. 1242-10 du Code du travail la période d'essai maximale d'un CDD ne doit pas excéder 1 mois ;

que dans le cas présent le contrat d'embauche de M. Giancarlo X..., bien qu'expressément intitulé CDD, ne comporte pas les mentions légales obligatoires, dès lors qu'aucun terme, non plus qu'aucune durée minimale ne sont définis et qu'il prévoit une période d'essai incompatible avec un CDD ;

qu'il convient dès lors de requalifier le contrat dont s'agit en contrat à durée indéterminée ;

qu'il s'ensuit que l'employeur pouvait le 30 novembre 2005 mettre fin à la période d'essai de M. X..., cet essai étant, selon les termes de la lettre, révélé « non concluant », l'employeur justifiant à l'appui de ce motif avoir reproché à diverses reprises au salarié son absentéisme » ;

Alors que les dispositions de l'article L. 1242-1 et suivants du Code du travail relatives au contrat à durée déterminée ont été édictées dans un souci de protection du salarié qui peut seul se prévaloir de leur inobservation ;

d'où il résulte qu'en requalifiant sur la seule demande de l'employeur à laquelle s'opposait M. X... son contrat de travail à durée déterminée pour débouter le salarié de la totalité de ses demandes, la cour d'appel a violé le texte susvisé ensemble les articles L. 1243-1 et L. 1245-1 du même Code.

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