Cassation sociale, 29 juin 2017, n° 15-21.672 cassation sociale - Editions Tissot

Jurisprudence sociale

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Cassation sociale, 29 juin 2017, n° 15-21.672

En cas de transfert du contrat de travail sur le fondement de l’article L. 1224-1 du Code du travail (succession, vente, fusion, etc.), c’est le nouvel employeur qui peut être condamné à l’indemnité de requalification d’un CDD en CDI, et non l’entreprise cédante ayant conclu le CDD litigieux.

Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du jeudi 29 juin 2017
N° de pourvoi: 15-21672
Non publié au bulletin Cassation partielle

M. Frouin (président), président
SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Richard, avocat(s)


 

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X...a été engagé en qualité de cuisinier par la société Sodexo santé médico-social par contrats à durée déterminé en date du 16 décembre 2010 sans terme précis afin de remplacer une salariée absente pour cause de maladie et être affecté au service de restauration de la maison de retraite du « clos des muriers » ; que ce service a été repris à compter du 9 novembre 2011 par la société Restalliance, laquelle lui a proposé un avenant à son contrat de travail qu'il a refusé de signer ; qu'il a été absent entre les 9 et 13 novembre 2011 puis en arrêt de travail pour maladie ; que la société Restalliance l'a avisé que son contrat à durée déterminée prendrait fin le 7 février 2012, date à laquelle la salariée qu'il était chargé de remplacer, licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement, quittait l'entreprise ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale en requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et en condamnation du dernier employeur à lui payer des sommes au titre de la requalification et de la rupture abusive du contrat de travail ; que devant la cour d'appel, la société Restalliance a fait intervenir la société Sodexo santé médico-social ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 1224-1 du code du travail ;

Attendu que pour condamner la société Sodexo santé médico social à payer au salarié des sommes au titre d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents, et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage dans la limite de six mois, l'arrêt retient que la rupture du contrat de travail est la conséquence directe des erreurs initiales commises par le premier employeur dans la conclusion du contrat à durée déterminée dont la requalification en contrat à durée indéterminée a été prononcée, que la rupture du contrat de travail du salarié a eu lieu au moment du licenciement de la salariée remplacée, soit au terme du contrat litigieux conclu par le premier employeur et que le second employeur n'était à l'origine ni de la conclusion du contrat ni de son terme ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le droit aux indemnités liées à la rupture du contrat de travail naît à la date de cette rupture et que leur paiement incombe à l'employeur qui a prononcé la rupture, la cour d'appel, qui a constaté que le contrat de travail avait pris fin après son transfert auprès de la société Restalliance, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Sodexo santé médico social à payer à M. X... des sommes au titre d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents, et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées au salarié au jour du licenciement dans la limite de six mois d'indemnités, l'arrêt rendu le 19 mai 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;

Condamne la société Restalliance aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Restalliance et condamne celle-ci à payer à la SCP Richard la somme de 1 500 euros et à la société Sodexo santé médico social la somme de 1 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la société Sodexo santé médico social.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société Sodexo Santé Médico Social à payer à M. Jean-Marc X... les sommes de 1 532, 17 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, les congés payés y afférents, 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, et à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées au salarié au jour du licenciement dans la limite de six mois d'indemnités ;

AUX MOTIFS QUE l'obligation de paiement d'une indemnité de requalification d'un contrat à durée déterminée naît dès la conclusion du contrat ; que c'est la société Sodexo Santé Médico Social qui a contracté avec M. X... qui n'a pas remis le contrat dans les 48 heures et qui a omis de préciser la qualification exacte de l'emploi ; que le salarié était en droit de la réclamer au nouvel employeur ; que cependant, l'ancien employeur ayant été appelé à la procédure, le paiement de l'indemnité de requalification allouée à M. X... sera mis à sa charge ; que de plus, la rupture du contrat de travail est la conséquence directe des erreurs initiales commises par le premier employeur ; que la rupture a eu lieu au moment du licenciement de la salariée remplacée, au terme du contrat litigieux conclu par la société Sodexo Santé Médico Social ; que la société Restalliance n'est à l'origine, ni de la conclusion du contrat ni de son terme ; que les conséquences juridiques du licenciement sans cause réelle et sérieuse incomberont à la société Sodexo Santé Médico Social ;

ALORS QUE si l'indemnité de requalification naît dès la conclusion du contrat à durée déterminée en méconnaissance des exigences du code du travail et pèse donc sur l'employeur l'ayant conclu, en revanche, le droit aux indemnités liées à la rupture du contrat de travail naît à la date de cette rupture et leur paiement incombe à l'employeur qui a prononcé la rupture ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses propres constatations selon lesquelles le contrat de travail de M. X... avait pris fin après son transfert à la société Restalliance, étant acquis aux débats que, le 7 février 2012, c'était la société Restalliance qui avait mis fin au contrat à durée déterminée en cours, en raison du licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement de Mme Y..., la salariée que M. X... remplaçait, ce dont il résultait que l'indemnisation de la rupture du contrat de travail incombait à celle-ci, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 1224-1 et L. 1235-2 et suivants du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société Sodexo Santé Médico Social à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées au salarié au jour du licenciement dans la limite de six mois d'indemnités ;

AUX MOTIFS QUE compte tenu du licenciement sans cause réelle et sérieuse, il y avait lieu d'ordonner « à la SAS Restalliance » de rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées au salarié au jour du licenciement dans la limite de six mois d'indemnités,

ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à une absence de motifs ; qu'en énonçant, dans ses motifs, que compte tenu du licenciement sans cause réelle et sérieuse, il y avait lieu d'ordonner « à la SAS Restalliance » de rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées au salarié au jour du licenciement dans la limite de six mois d'indemnités, et en condamnant, dans son dispositif, la société Sodexo Santé Médico Social à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées au salarié au jour du licenciement dans la limite de six mois d'indemnités, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.    

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