Jurisprudence sociale
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Cassation sociale, 9 novembre 2017, n° 16-17.808
L'établissement distinct permettant l'élection de délégués du personnel se caractérise par le regroupement d'au moins 11 salariés constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres susceptibles de générer des réclamations communes ou spécifiques et travaillant sous la direction d'un représentant du chef d'entreprise, peu important que celui-ci n'ait pas le pouvoir de se prononcer lui-même sur ces réclamations.
L'existence d'un établissement distinct ne peut donc être reconnue que dans le cas où l'effectif de l'établissement permet la mise en place de délégués du personnel.
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du jeudi 9 novembre 2017 N° de pourvoi: 16-17808 Non publié au bulletin Cassation partielle
Mme Guyot (conseiller doyen faisant fonction de président), président Me Le Prado, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat(s)
Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 11 juin 2012 par la société Sft Gondrand frères (la société) en qualité de déclarant en douane, exerçant au sein de l'agence de Chambéry ; qu'il a été victime le 22 novembre 2013 d'un accident du travail ; qu'après avoir saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, il a été licencié le 6 juillet 2015 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles L. 1226-10 et L. 1226-15 du code du travail, en leur rédaction applicable en la cause, et l'article L. 2312-2 du même code ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient qu'en application des dispositions de l'article L. 2312-1 du code du travail c'est l'établissement qui constitue le périmètre d'élections des délégués du personnel lesquelles ne sont obligatoires que si l'effectif est au moins égal à onze salariés sauf accord collectif élargissant cette obligation, qu'en l'espèce, l'établissement de Chambéry compte sept salariés à la date du licenciement, que le salarié ne justifie pas de l'existence d'un accord collectif prévoyant l'élection de délégués du personnel quelque soit le nombre de salariés et qu'il ne peut être reproché à l'employeur de n'avoir pas consulté des délégués du personnel inexistants au sein de l'établissement et de ne pas avoir consulté les éventuels délégués du personnel d'autres établissements ;
Attendu, cependant, que l'établissement distinct permettant l'élection de délégués du personnel se caractérise par le regroupement d'au moins onze salariés constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres susceptibles de générer des réclamations communes ou spécifiques et travaillant sous la direction d'un représentant du chef d'entreprise, peu important que celui-ci n'ait pas le pouvoir de se prononcer lui-même sur ces réclamations ; qu'il en résulte que l'existence d'un établissement distinct ne peut être reconnue que si l'effectif de l'établissement permet la mise en place de délégués du personnel ;
Qu'en statuant comme elle a fait, par des motifs inopérants, alors qu'il résultait de ses constatations que le site de Chambéry ne pouvait constituer un établissement distinct pour la mise en place de délégués du personnel et que les salariés exerçant sur ce site devaient nécessairement être rattachés à un établissement au sens des délégués du personnel, ce dont il résultait qu'ils ne pouvaient être privés du droit qu'ils tirent de l'article L. 1226-10 du code du travail à la consultation des délégués du personnel en cas d'inaptitude, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute le salarié de ses demandes au titre d'une résiliation judiciaire de son contrat de travail et à titre de rappel de salaires, l'arrêt rendu le 24 mars 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur les autres points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne la société Sft Gondrand frères aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sft Gondrand frères à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille dix-sept. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;
D'AVOIR rejeté les demandes de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, de rupture abusive du contrat de travail et de rappels de salaire et de congés payés afférents ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' «en application de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, le juge formant sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande ; Ainsi, si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient aussi à ce dernier de fournir préalablement des éléments suffisamment précis de nature à étayer sa demande et à permettre à l'employeur d'y répondre; En l'espèce, M. X... produit: son contrat de travail qui prévoit certes un horaire hebdomadaire moyen de 3 7h30 mais ce sur l'année "grâce à l'attribution de jours spécifiques de repos", ses bulletins de salaire qui retiennent une durée mensuelle de travail de 152 heures soit 35 heures par semaine, mais font également apparaître la prise de jours RTT, une fiche horaire datant de 2012 sans plus de précision, faisant apparaître une première semaine de 37h30 et un seconde semaine, dont seul le premier jour est renseigné manuellement, les autres renvoyant au premier, faisant également apparaître un temps de travail de 37h30, conformément au contrat, un courrier qu'il a adressé à la société le 2 juin 2014 pour réclamer les horodatages de juin 2012 au 22 novembre 2013 en arguant de la réalisation d'heures supplémentaires depuis l'embauche ; Compte tenu du lissage sur l'année du nombre d'heures effectuées et du bénéfice non contesté par le salarié d'une pause quotidienne de 12 minutes et de 9 jours de RTT, la cour constate que les pièces produites démontrent au contraire le respect des dispositions légales et que M. X... n'a pas effectué d'heures supplémentaires; Le salarié doit être débouté de ses demandes de ce chef comme l'ont retenu les premiers juges ; M. X... a été embauché en qualité d'agent déclarant en douane, il bénéficie d'un coefficient 150 groupe 1 de l'annexe 3 de la convention collective nationale des transports routiers, applicable au contrat de travail ; Il est constant que cette convention prévoit que les fonctions d'agent déclarant en douane relèvent du groupe 6 et non du groupe 1 ; elle attribue à ce groupe un coefficient de 200 susceptible d'être porté jusqu'à 400 "pour les agents ayant fait preuve pendant deux années de qualités et capacités professionnelles exceptionnelles"; M. X... qui a été embauché en 2012, s'est trouvé en mi-temps thérapeutique puis en arrêt de travail, ne pouvait prétendre accéder à un coefficient de 400 mais aurait dû néanmoins se voir affecter un coefficient 200 ; Pour autant il apparaît que le salarié a été rémunéré très au-delà du minimum conventionnel du coefficient 200 et n'a donc subi aucun préjudice matériel du fait de cette erreur de coefficient ; Il n'a pas davantage été privé de la possibilité de cotiser pour la retraite complémentaire des assimilés cadres, cette possibilité n'étant ouverte qu'aux techniciens et agents de maîtrise "classés à une cote hiérarchique brute égale ou supérieure à 300" de sorte que même s'il s'était vu attribuer un coefficient 200, il n'aurait pas pu cotiser; M. X... ne peut donc invoquer un manquement de l'employeur de ce chef; Il résulte du principe "à travail égal, salaire égal", dont s'inspirent les articles L.1242-14, L.1242-15, L.2261-22.9, L.2271-1.8º et L.3221-2 du code du travail, que tout employeur est tenu d'assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale. En application de l'article 1315 du code civil, s'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe "à travail égal, salaire égal" de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ou de traitement, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant le cas échéant cette différence ; En l'espèce, M. X... se contente d'affirmer que les déclarants en douane qui travaillent sur le site d'Annemasse ont le statut de cadre, sans apporter le moindre élément probant à cet égard. La société Gondrand produit pour sa part le bulletin de salaire de Mme Y..., agent déclarant en douane au sein de l'établissement d'Annemasse, qui fait apparaître que la salariée bénéficie exactement de la même classification que M. X... soit agent de maîtrise, groupe 1 coefficient 150 ; Aucune inégalité de traitement ne peut être invoquée par M. X.... Le contrat de travail prévoit en son article 5 concernant la rémunération, que celle -ci sera "assortie d'une gratification de fin d'année à la discrétion de l'employeur. Le salarié doit être présent au 31 décembre de chaque année pour bénéficier du versement de cette gratification. En raison même de sa nature aléatoire et des modalités de son versement étroitement dépendantes de l'expression de la volonté de la société SFT Gondrand Frères, cette gratification ne saurait être considérée comme un élément contractuel." ; Ainsi quand bien même M. X... aurait perçu cette indemnité en décembre 2012, son montant n'étant au demeurant pas égal à un mois de salaire et rien ne permettant de déterminer le calcul du montant réclamé par le salarié pour 2013, il ne peut soutenir que cette gratification est contractuellement intégrée à son salaire et soumise à sa seule présence alors que les dispositions précitées énoncent précisément le contraire ; Il n'établit par ailleurs nullement que les autres salariés auraient perçu cette gratification et qu'il aurait donc été le seul à ne pas la recevoir de façon inégalitaire; M. X... doit être débouté de sa demande et aucun manquement ne peut être reproché à la société à ce titre. Lorsque le licenciement intervient postérieurement à l'introduction de la demande de résiliation judiciaire formée par le salarié, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur est ou non justifiée avant de prononcer sur le bien-fondé du licenciement; Dans l'hypothèse où la résiliation judiciaire est justifiée, celle-ci produit alors les effets d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse ; Il convient dès lors, au regard des dispositions de l'article 1184 du code civil, d'examiner si l'inexécution prétendue de ses obligations par l'employeur, résultant du contrat synallagmatique que constitue le contrat de travail, présente une gravité suffisante pour justifier ladite résiliation. En l'espèce, la cour a retenu ci-avant qu'aucun des manquements allégués par M. X... n'était établi ; en l'absence de faute de l'employeur, la résiliation judiciaire du contrat de travail ne peut être prononcée ainsi que l'ont retenu les premiers juges ».
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU' « aux termes de l'article 1184 du code civil, tout salarié peut saisir le conseil de prud'hommes afin d'obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail en cas de manquements de l'employeur à ses obligations; que l'article L .1231-1 du code du travail précise que « le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre » : qu'en droit, l'article L.1235-1 dispose qu'il appartient au juge d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties pour justifier un licenciement; qu'en droit l'article L 3171-4 du code du travail indique :« En cas de litige relatif à l''existence ou au nombre d'heures de travail accompli, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles » ; que l'article 6 du code de procédure civile précise :« A l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder»; En l'espèce, M. X... demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail au motif que la société Gondrand, son employeur, a eu des manquements graves à ses obligations : Le contrat de travail de M. X... dans son article 5 prévoit un horaire hebdomadaire moyen de référence de 37,50 heures. M. X... bénéficiait d'un repos de 12 minutes par jour soit une heure par semaine. De plus, il avait droit 9 jours de RTT par an. Le nombre de jours travaillés annuellement est de 227. Le nombre de jours travaillés en déduisant les 9 jours de RTT est de 218. Le nombre d'heures travaillées par jour est de 36,50 heures. (37.50 heures prévues au contrat de travail - 12 mn x5) = 1 heure de repos par semaine. Le nombre d'heures travaillées par an 218 x 7,50 = 1591,40 heures Nombre de semaine travaillées par an 227: 5 = 45,40 heures Nombre d'heures travaillées par semaine en moyenne par an: 1591,40 : 45,40 = 35,00 heures. En conséquence, les bulletins de paie remis à M. X... sont conformes. La demande de paiement d'heures supplémentaires effectuée par M X... est sans fondement. M. X... a été embauché au poste de déclarant en douane groupe 1, coefficient 150 de l'annexe 3 de la CCN. M. X... revendique un positionnement au groupe 6 qui lui permettrait d'un coefficient de 200, ce qui d'après lui, pourrait lui faire accéder aux dispositions de l'article 4 bis de la CCN du 14 mars 1947 de l'Argic et être ainsi assimilé au statut cadre. Pour pouvoir bénéficier du statut cadre assimilé, la convention collective indique qu'il faut avoir un coefficient égal ou supérieur à 300. Le simple changement de groupe au sein de l'annexe 3 étant insuffisant, le groupe 6 revoyant au coefficient 200. En conséquence, la demande de M. X... est sans fondement. L'article L.3211-1 du code du travail précise qu'une prime est obligatoire pour l'employeur lorsque son versement résulte d'un usage répondant à un caractère de généralité, de constance et de fixité. En l'espèce, l'article 5 du contrat de travail de M. X... indique que sa rémunération sera assortie d'une gratification présentant un caractère discrétionnaire et non contractuel, de nature aléatoire, dépendante de la société Gondfrand. Aucun montant n'est'prévu. Elle ne répond pas aux critères précités du code du travail. En conséquence, la demande de M. X... est sans fondement».
ALORS QU'aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, lorsque le salarié produit des éléments de nature à étayer sa demande au titre des heures supplémentaires accomplies, l'employeur doit justifier des horaires de travail effectivement réalisés par le salarié ; que pour rejeter la demande du salarié au titre des heures supplémentaires effectuées et de congés payés afférents, la cour d'appel a affirmé, par motifs propres et adoptés, que compte tenu du lissage sur l'année du nombre d'heures effectuées et du bénéfice non contesté par le salarié d'une pause quotidienne de 12 minutes et de 9 jours de RTT, les pièces produites démontrent le respect des dispositions légales et que l'intéressé n'a pas effectuées d'heures supplémentaires ; qu'en statuant par ces motifs inopérants, alors qu'en présence d'éléments fournis par le salarié de nature à étayer sa demande, il appartenait à l'employeur de justifier de la durée exacte du travail, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L.3171-4 du code du travail.
ET ALORS QUE l'employeur a l'obligation d'attribuer au salarié la classification conventionnelle correspondant aux fonctions exercées dont dépend directement sa rémunération, élément déterminant du contrat de travail ; que la cour d'appel qui a constaté que l'employeur n'avait pas appliqué au salarié le coefficient conventionnel auquel il avait droit en sa qualité d'agent déclarant en douane aurait dû déduire de ses propres énonciations que l'employeur avait manqué à ses obligations contractuelles et que cette violation avait eu nécessairement une incidence sur sa rémunération ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L.1221-1 du code du travail.
ALORS, par ailleurs, QUE les conditions auxquelles l'employeur peut soumettre son engagement de verser une prime doivent être précises et objectives afin que le salarié puisse vérifier que le calcul de sa rémunération a été effectué conformément aux engagements de l'employeur ; qu'à défaut, l'avantage est dû sans condition ; que la cour d'appel a débouté le salarié de sa demande de rappel de prime de gratification annuelle pour l'année 2013 aux motifs que cette prime ne pouvait être considérée comme un élément contractuel et que son versement était laissé à la discrétion de l'employeur ; qu'en statuant ainsi bien qu'elle ait relevé que le versement de cette prime était prévu par l'article 5 du contrat de travail relatif à la rémunération et qu'en l'absence de précision par l'employeur des conditions de son versement, cette prime était due au salarié, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.
ALORS, en toute hypothèse, QUE la cassation à intervenir des chefs de dispositif de l'arrêt qui ont débouté le salarié de sa demande de rappels d'heures supplémentaires, de congés payés afférents, de prime de gratification et qui ont affirmé que l'employeur n'avait commis aucun manquement en refusant d'appliquer au salarié la classification conventionnelle à laquelle il pouvait prétendre entraînera, par voie de conséquence, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt qui a débouté le salarié de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur avec les conséquences indemnitaires afférentes par application des articles 624 et 625 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;
D'AVOIR considéré que le licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle et impossibilité de reclassement reposait sur une cause réelle et sérieuse et débouté l'intéressé de ses demandes afférentes à un licenciement illicite ;
AUX MOTIFS QUE « l'article L.1226-10 du code du travail prévoit que "lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail. ". L'article L1226-12 précise que "lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement. L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions ». Il ressort des dispositions de l'article L.1226-15 du code du travail que, lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte prévues à l'article L.1226-10 du même code, le tribunal saisi peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis ; en cas de refus de la réintégration par l'une ou l'autre des parties, le tribunal octroie au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure à douze mois de salaire, qui se cumule avec l'indemnité compensatrice et, le cas échéant, l'indemnité spéciale de licenciement prévues à l'article L.1226-14 du même code; En l'espèce, M. X... reproche à la société Gondrand d'avoir omis de consulter les délégués du personnel et d'avoir manqué à son obligation de reclassement. Sur le premier point, il convient de rappeler qu'en application des dispositions de l'article L. 2312-1 du code du travail c'est l'établissement qui constitue le périmètre d'élections des délégués du personnel lesquelles ne sont obligatoires que si l'effectif est au moins égal à 11 salariés sauf accord collectif élargissant cette obligation. En l'espèce, l'établissement SFT Gondrand Frères de Chambéry compte moins de 11 salariés (7 à la date du licenciement) et M. X... ne justifie pas de l'existence d'un accord collectif prévoyant l'élections de délégués du personnel quelque soit le nombre de salariés; dès lors, à défaut de délégués du personnel et alors que ceux-ci ne sont pas obligatoires dans l'établissement concerné, il ne peut être reproché à l'employeur de n'avoir pas consulté des délégués du personnel inexistants au sein de l'établissement ni de n'avoir pas consulté les éventuels délégués du personnel d'autres établissements. S'agissant du reclassement, le médecin du travail a conclu à l'inaptitude de M. X... au poste de déclarant en douanes; il retient en outre une "contre- indication à la station debout prolongée Ou à la marche prolongée ainsi qu'au port de charge même minime et au travail administratif nécessitant de la concentration mentale ou la conduite d'un véhicule. Un poste de reclassement à temps partiel à domicile ou en milieu de travail adapté pourrait être envisagé." ; Le registre du personnel de la société SFT Gondfrand Frères permet de constater qu'au cours des mois de mai, juin et juillet 2015 soit entre l'avis d'inaptitude et la date du licenciement, la société a procédé au recrutement de 4 salariés dans les postes suivants : cariste manutentionnaire, agent trieur, agent déclarant en douane et employé de transit, tous ces postes supposent une station debout prolongée et pour certains le port de charge et sont donc incompatibles avec l'avis du médecin du travail. L'employeur justifie en outre avoir recherché un reclassement auprès des fédérations dont il est adhérent en l'espèce la Fédération nationale des transports routiers et la Fédération des entreprises de Transport et Logistique de France, consultées par courrier du 5 juin 2015 reprenant in extenso l'avis d'inaptitude et précisant les fonctions précédemment occupées ainsi que les coordonnées du salarié ; Il apparaît ainsi que la société SFT Gondfrand Frères a procédé à une recherche loyale de reclassement de son salarié, qui ne peut prétendre à une recherche au sein de sociétés basées à l'étranger à défaut de permutabilité, et que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement est dès lors fondé; M. X... sera en conséquence débouté de l'ensemble de ses demandes; il supportera la charge des dépens de première instance et d'appel et versera à la société Gondfrand frères la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ».
ALORS QUE l'avis des délégués du personnel doit être recueilli avant que la procédure de licenciement d'un salarié déclaré inapte à son emploi en conséquence d'un accident de travail ou d'une maladie professionnelle soit engagée; que les délégués du personnel devant être consultés sur les possibilités de reclassement du salarié déclaré inapte suite à un accident du travail ou une maladie professionnelle sont, dans le cas où l'entreprise ne comporte pas d'établissement distinct, les délégués de l'entreprise, dont la mise en place est obligatoire dès lors que son effectif atteint onze salariés; qu'il ne saurait être caractérisé d'établissement distinct en l'absence de regroupement d'une communauté de travail d'au moins onze salariés; que la cour d'appel a constaté que l'établissement Sft Gondrand Frères de Chambéry dans lequel avait été affecté le salarié était inférieur à onze salariés ; qu'il s'en déduisait nécessairement que l'établissement en cause ne constituait pas un établissement distinct doté d'institutions représentatives du personnel propres, en sorte et que les délégués du personnel au niveau de l'entreprise devaient être consultés; qu'en décidant que les délégués du personnel n'avaient pas à être consultés avant l'engagement de la procédure de licenciement du salarié pour inaptitude consécutive à un accident du travail, la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1226-10 et L. 2312-1 du code du travail.
ET ALORS QUE l'avis d'inaptitude émis par le médecin du travail déclarant le salarié inapte à occuper son poste de travail ne dispense pas l'employeur de rechercher des possibilités de reclassement au sein de l'entreprise, et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; que les juges du fond doivent caractériser l'impossibilité de l'employeur de mettre en oeuvre de telles mesures ; qu'en s'abstenant de caractériser une telle impossibilité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L.1226-10 du code du travail.
ALORS, par ailleurs, QUE l'employeur doit procéder à une recherche loyale de reclassement d'un salarié inapte ; qu'en considérant que l'employeur avait respecté son obligation de reclassement sans vérifier, comme elle y était pourtant invitée par le salarié, si l'employeur ne recherchait pas au sein de l'entreprise, au moment de l'engagement de la procédure de licenciement, des assistants opérationnels, poste qui aurait pu être proposé au salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1226-10 du code du travail.
ALORS, en toute hypothèse, QUE les juges du fond sont tenus de caractériser la possibilité ou, au contraire, l'impossibilité d'effectuer la permutabilité du personnel parmi les sociétés du groupe auquel l'employeur appartient ; qu'en se bornant à affirmer que l'employeur n'était pas tenu de procéder à une recherche de reclassement auprès des sociétés du groupe auquel appartenait l'employeur basées à l'étranger à défaut de permutabilité du personnel sans caractériser cette absence de permutabilité, la cour d'appel a, à nouveau, entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L.1226-10 du code du travail.
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