Cassation sociale, 20 mars 2001, n° 99-13.179 cassation sociale - Editions Tissot

Jurisprudence sociale

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Cassation sociale, 20 mars 2001, n° 99-13.179

Le comité d’entreprise a le droit de s’opposer à la suppression par l’employeur des horaires variables. Si l’employeur ne tient pas compte de l’avis négatif du CE, le juge peut lui interdire d’appliquer sa décision.

Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mardi 20 mars 2001
N° de pourvoi: 99-13179
Publié au bulletin Rejet.

Président : M. Gélineau-Larrivet ., président
Rapporteur : M. Boubli., conseiller rapporteur
Avocat général : M. Kehrig., avocat général
Avocats : la SCP Vier et Barthélemy, la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin., avocat(s)


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué rendu en référé (Montpellier, 25 janvier 1999), qu'un accord-cadre relatif aux horaires de travail a été conclu au Crédit lyonnais le 7 juillet 1983, précisant notamment les modalités de dérogation à l'horaire collectif par la mise en place d'horaires individualisés ; que l'article 3 de cet accord définit la procédure d'institution des horaires variables qui, en cas de conclusion favorable du comité d'établissement, donne lieu à l'élaboration d'un projet de règlement dans le cadre d'une concertation avec le comité d'établissement ; qu'un règlement instituant les horaires variables a, ainsi, été adopté dans l'agence de Perpignan ; qu'en marge de la négociation sur la réduction du temps de travail ayant donné lieu à un accord collectif du 12 décembre 1996, ne concernant pas l'établissement de Perpignan, la direction du Crédit lyonnais a entendu remettre en cause la pratique des horaires individualisés et a consulté le comité d'établissement de Perpignan le 12 décembre 1997, qui s'est opposé à cette modification ; que, le 2 mars 1998, le Crédit lyonnais a fait connaître néanmoins au personnel la mise en place de nouveaux horaires ; que le syndicat CFDT, en tant que partie adhérente à l'accord-cadre du 7 juillet 1983, a demandé au juge des référés de faire défense au Crédit lyonnais de supprimer l'horaire variable ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir interdit sous astreinte au Crédit lyonnais de supprimer les horaires variables à l'agence de Perpignan, alors, selon le moyen :

1° que, selon l'article 3, alinéas 2 et 3, de l'accord-cadre du 7 juillet 1983, il appartient à la direction de chaque établissement de " procéder à une étude analysant notamment la compatibilité entre, d'une part, la mission et les spécificités des unités de l'établissement et, d'autre part, la pratique des horaires variables " et que " si les conditions sont défavorables, celles-ci font l'objet d'une information motivée au comité d'établissement " ; qu'il en résulte que si l'étude à laquelle procède la direction de chaque établissement fait apparaître des conditions défavorables au maintien des horaires variables, le comité d'établissement doit seulement en être informé de manière motivée ; qu'en exigeant néanmoins l'absence d'opposition du comité d'établissement, la cour d'appel a violé l'article 3, alinéas 2 et 3, de l'accord-cadre du 7 juillet 1983 ;

2° qu'il résulte de l'article 3, alinéa 9, de l'accord-cadre du 7 juillet 1983 que " le règlement des horaires variables (...) fait l'objet d'aménagements chaque fois qu'une adaptation s'avère nécessaire en raison notamment de l'évolution de la mission ou des spécificités de l'unité ou d'une demande du personnel " et que " ces modifications sont déterminées par la direction après concertation avec le comité d'établissement " ; qu'en exigeant néanmoins l'absence d'opposition du comité d'établissement au motif inopérant que la modification envisagée par le Crédit lyonnais affecte la durée des plages fixes et l'importance des reports, la cour d'appel a violé l'article 3, alinéa 9, de l'accord-cadre du 7 juillet 1983 ;

3° qu'il résulte des dispositions de l'article L. 122-36 du Code du travail qu'en cas de modification ou de retrait des clauses du règlement intérieur, l'avis du comité d'établissement doit avoir été sollicité par l'employeur ; qu'en exigeant néanmoins de celui-ci qu'il ne rencontre pas d'opposition du comité d'établissement, la cour d'appel a violé l'article L. 122-36 du Code du travail ;

4° que, méconnaissant les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, la cour d'appel s'est abstenue de répondre aux moyens déterminants des conclusions d'appel du Crédit lyonnais pris en premier lieu de ce que " la modification du règlement de chaque établissement est à l'entière discrétion du chef d'établissement sous la seule réserve de la consultation par la direction du comité d'établissement " (p. 5, alinéa 9), pris en deuxième lieu de ce que " l'accord-cadre ne s'impose pas aux différentes agences du Crédit lyonnais, chaque chef d'établissement ayant l'opportunité ou possibilité, en fonction de son agence, de ses structures, de son personnel, de ses objectifs, de ses besoins, d'appliquer ou non l'horaire variable, ce dont l'accord-cadre lui donne la possibilité " (p. 6, premier alinéa), enfin de ce que " l'article 3 de l'accord-cadre permet au Crédit lyonnais de dénoncer un règlement intérieur si la pratique des horaires variables devient incompatible avec la nécessité des services puisque l'appréciation de la direction sur ce point est une des conditions de la mise en place et donc du maintien des horaires variables " (p. 6, alinéa 5) ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article 3, dernier alinéa, de l'accord-cadre du 7 juillet 1983 que les modifications du règlement instituant les horaires variables sont déterminées par la direction après concertation avec le comité d'établissement, et que les modifications qui affectent la durée des plages fixes ou l'importance des reports ne sont retenues qu'en cas de non-opposition des élus du comité d'établissement ; que la cour d'appel, qui a constaté que les modifications affectaient la durée des plages et l'importance des reports, a exactement décidé que ces modifications n'étaient possibles qu'en l'absence d'opposition du comité d'établissement ; qu'après avoir constaté que le comité d'établissement s'était opposé à la modification envisagée, la cour d'appel a pu décider que sa mise en application par le Crédit lyonnais caractérisait un trouble manifestement illicite ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.