Jurisprudence sociale
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Cassation sociale, 17 janvier 2018, n° 16-26.560
Une absence injustifiée constitue une faute grave justifiant le licenciement lorsque, en dépit d'un courrier et d'une mise en demeure, la salariée n'établit ni avoir adressé les justificatifs de son absence ni avoir informé l'employeur de sa date de retour dans l'entreprise, de sorte qu'il ne pouvait être reproché à ce dernier, laissé sans nouvelles, de ne pas avoir organisé de visite de reprise.
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 17 janvier 2018 N° de pourvoi: 16-26560 Non publié au bulletin Rejet
Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président), président SCP Odent et Poulet, SCP Zribi et Texier, avocat(s)
Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 15 décembre 2015), que Mme Y... a été engagée par la société Bleu Lyon Centre en qualité de femme de chambre le 27 mai 2004 selon plusieurs contrats de travail à durée déterminée pour accroissement temporaire d'activité ou en remplacement de salariées ; que la relation de travail s'est poursuivie à compter du 1er janvier 2007 par contrat à durée indéterminée à temps partiel pour exercer les mêmes fonctions ; que la salariée a été victime d'un accident de travail le 26 octobre 2007 ; que son contrat de travail a été transféré à la société Killian Services à compter du 6 avril 2009 ; que mise en demeure de justifier son absence les 6 avril et 13 mai 2009, la salariée, licenciée le 12 août 2009, a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes le 10 novembre 2009 ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le second moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à voir constater la nullité de son licenciement et de celles en paiement des salaires échus du 21 avril 2009 jusqu'à la date de sa réintégration, alors, selon le moyen :
1°/ que seule la visite de reprise du travail par le médecin du travail met fin à la période de suspension du contrat de travail ; qu'en reprochant à Mme Y... de ne pas avoir justifié de ses absences, quand, faute d'organisation d'une visite de reprise, son contrat de travail demeurait suspendu, de sorte que la salariée, qui n'avait pas à venir travailler, n'avait commis aucune faute, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-9, L. 1226-13 et L. 1234-1 du code du travail ;
2°/ que la seule absence d'une justification de prolongation d'un arrêt de travail, même à la demande de l'employeur, ne constitue pas une faute grave de nature à justifier qu'il soit mis fin au contrat de travail au cours de la période de suspension du contrat de travail résultant d'un arrêt de travail consécutif à un accident du travail ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-9, L. 1226-13 et L. 1234-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté qu'en dépit d'un courrier du 7 avril 2009 et d'une mise en demeure du 13 mai 2009, la salariée n'établissait ni avoir adressé les justificatifs de son absence depuis le 5 mars 2009 ni avoir informé l'employeur de sa date de retour dans l'entreprise de sorte qu'il ne pouvait être reproché à ce dernier, laissé sans nouvelles, de ne pas avoir organisé de visite de reprise, la cour d'appel a pu décider que cette absence injustifiée constituait une faute grave justifiant le licenciement ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, signé et prononcé par le président et Mme Aubert-Monpeyssen conseiller le plus ancien en ayant délibéré conformément aux dispositions des articles 452 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, en son audience publique du dix-sept janvier deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour Mme Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Mme Y... fait grief à l'arrêt attaqué
D'AVOIR dit que le contrat de travail à durée déterminée du 27 au 30 mai 2004 est conforme aux dispositions des articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1242-7 et L. 1242-12 du code du travail et DE L'AVOIR déboutée de sa demande de requalification de son contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée et de sa demande en paiement d'une indemnité spéciale de requalification ;
AUX MOTIFS PROPRES ET ADOPTES QUE « les cinq premiers contrats de travail visaient l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise et les deux derniers le remplacement d'un salarié en cas d'absence, deux cas prévus par l'article L. 1242-2 du code du travail pour la conclusion d'un contrat de travail à durée déterminée ; que la faible durée des emplois très ponctuels durant les années 2004 et 2005 ne permet pas de retenir un recours de façon systématique au contrat à durée déterminée pour faire face à un besoin structurel de main d'oeuvre ; que notamment les douze jours de travail exécutés durant les deux années 2004 et 2005 confirment vraiment que l'accroissement de l'activité de l'entreprise était réellement temporaire et ne relevait pas d'un besoin structurel de main d'oeuvre ; qu'il s'agissait donc bien d'une succession de contrats à durée déterminée ; que, de même, les contrats conclus pour remplacer successivement deux salariées absentes, répondent aux exigences de la loi » ;
ALORS QU'en cas de litige sur le motif du recours, il appartient à l'employeur de rapporter la preuve, par référence aux données factuelles précises, de la réalité du motif d'accroissement temporaire de l'activité énoncé dans le contrat à durée déterminée ; qu'en se bornant à relever la faible durée et le caractère très ponctuel des emplois de Mme Y..., sans vérifier, comme elle le devait, si l'employeur rapportait la preuve concrète d'un accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1242-2 du code du travail et 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Mme Y... fait grief à l'arrêt attaqué
DE L'AVOIR déboutée de sa demande tendant à voir constater la nullité de son licenciement et de celles subséquentes en paiement des salaires échus du 21 avril 2009 jusqu'à la date de sa réintégration ;
AUX MOTIFS QUE « Mme Y... ne justifie pas de ce qu'elle aurait avisé son employeur de la date de la fin de l'arrêt de travail afin qu'il puisse organiser la visite médicale de reprise ; qu'elle ne justifie pas davantage de ce qu'elle aurait informé son employeur de la poursuite de l'arrêt de travail, malgré les demandes formulées par lettres recommandées des 7 avril et 13 mai 2009 ; que la lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement rappelait qu'elle n'avait toujours pas justifié de son absence depuis le 5 mars 2009, malgré les courriers de l'employeur des 7 avril et 13 mai 2009 ; que l'article 10 de son contrat de travail à durée indéterminée précise que la salariée s'engage à informer la société employeur de toute absence dans les 24 heures, par tout moyen, et qu'elle devra justifier l'absence dans les 48 heures par un document se rapportant au motif de la carence et indiquant la durée de celle-ci ; que malgré la durée des instances, elle n'a versé aucuns certificats médicaux ; qu'en conséquence, l'attitude de la salariée qui n'a jamais répondu aux courriers de l'employeur et surtout n'a jamais justifié de ses absences au travail par la production de certificats médicaux confirmant son inaptitude temporaire caractérise une faute grave justifiant son licenciement, dès lors que l'employeur, d'une part, établit l'exactitude des faits imputés à la salariée dans la lettre de licenciement, d'autre part, démontre que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis » ;
1°) ALORS QUE seule la visite de reprise du travail par le médecin du travail met fin à la période de suspension du contrat de travail ; qu'en reprochant à Mme Y... de ne pas avoir justifié de ses absences, quand, faute d'organisation d'une visite de reprise, son contrat de travail demeurait suspendu, de sorte que la salariée, qui n'avait pas à venir travailler, n'avait commis aucune faute, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-9, L. 1226-13 et L. 1234-1 du code du travail ;
2°) ALORS, en toute hypothèse, QUE la seule absence d'une justification de prolongation d'un arrêt de travail, même à la demande de l'employeur, ne constitue pas une faute grave de nature à justifier qu'il soit mis fin au contrat de travail au cours de la période de suspension du contrat de travail résultant d'un arrêt de travail consécutif à un accident du travail ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-9, L. 1226-13 et L. 1234-1 du code du travail.
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