Jurisprudence sociale
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Cassation sociale, 18 septembre 2019, n° 18-12.446
Si le CDD conclu pour remplacer un salarié absent a pour terme la fin de l'absence de ce salarié, il n'est pas exigé que l'employeur y mette fin par écrit.
Cour de cassation chambre sociale Audience publique du mercredi 18 septembre 2019 N° de pourvoi: 18-12446 Publié au bulletin Rejet
M. Cathala (président), président SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat(s)
Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 20 décembre 2017), que Mme M... a été engagée en qualité de déléguée dentaire par la société Pierre Fabre santé information suivant contrat à durée déterminée du 12 avril 2012 pour une durée minimale de deux mois et huit jours pour le remplacement d'une salariée, déléguée dentaire, absente pour congé de maladie ; que la société lui a notifié, par lettre du 11 décembre 2014, le licenciement pour inaptitude de la salariée remplacée intervenu le 10 décembre 2014 et la fin consécutive de son contrat de travail ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir la requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et paiement d'un rappel de salaire et d'indemnités de rupture ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes alors, selon le moyen :
1°/ que le contrat à durée déterminée, conclu pour le remplacement d'un salarié absent, a pour terme la fin de l'absence du salarié remplacé ; qu'ainsi, un tel contrat de remplacement prend fin le jour du licenciement du salarié remplacé ; que dès l'instant que la relation de travail se poursuit à l'expiration du terme du contrat de travail à durée déterminée, sans signature d'un nouveau contrat à durée déterminée, et quelle que soit la nature de l'emploi occupé, le contrat de travail devient un contrat à durée indéterminée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que par courrier du 10 décembre 2014, la société Pierre Fabre Santé Information a licencié Mme V... pour inaptitude et impossibilité de reclassement et que ce n'est que le 11 décembre 2014 que la société Pierre Fabre Santé Information a notifié par courrier à Mme M... que son contrat de travail à durée déterminée conclu pour pallier l'absence de Mme V... prenait automatiquement fin à la date du licenciement de cette dernière ; qu'en décidant pourtant de débouter Mme M... de sa demande de requalification des contrats de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, aux motifs inopérants que "les dispositions relatives au contrat à durée déterminée de remplacement ne prévoient pas les modalités d'information du salarié et n'exigent donc pas une notification écrite" et qu'il "convient de dire que l'information donnée par téléphone a valablement notifié à Mme M... la fin du contrat de remplacement", tandis qu'il résultait de ses propres constatations que l'employeur avait attendu le 11 décembre 2014 pour notifier à la salariée le terme de son contrat de travail au 10 décembre 2014 et que l'exécution du contrat de travail s'était donc poursuivie au-delà de ce terme, la cour d'appel a violé les articles L.1245-1 et L. 1243-11 du code du travail ;
2°/ que seule la cessation définitive d'activité du salarié remplacé entraîne de plein droit la fin du contrat à durée déterminée ; que lorsqu'un contrat à durée déterminée a été conclu sans terme précis, pour remplacer un salarié absent, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve de l'événement constitutif du terme et de sa date, et qu'il a valablement notifié au salarié remplaçant la date de ce terme ; qu'en retenant toutefois, par des motifs inopérants, que l'employeur avait valablement notifié à Mme M..., le jour même, le licenciement de Mme V... le 10 décembre 2014 et la cessation de son contrat à durée déterminée, par un simple appel téléphonique ne garantissant pourtant nullement la justification par l'employeur de la date du terme du contrat ni de son motif, et ne permettant donc pas au salarié de savoir si le contrat cessait effectivement et régulièrement ou s'il se poursuivait au contraire, la cour d'appel a encore violé les articles L. 1245-1 et L. 1243-11 du code du travail, ensemble l'article 1315 du code civil dans sa version applicable au litige ;
Mais attendu que si, en application de l'article L. 1242-7 du code du travail, le contrat à durée déterminée conclu pour remplacer un salarié absent a pour terme la fin de l'absence de ce salarié, il n'est pas exigé que l'employeur y mette fin par écrit ;
Et attendu qu'ayant relevé qu'il n'était pas discuté que l'absence de la salariée remplacée avait définitivement pris fin le 10 décembre 2014 et retenu souverainement que Mme M... avait été informée par un appel téléphonique à cette même date de la fin de son contrat à durée déterminée, la cour d'appel, qui a constaté que l'intéressée, bien qu'informée de la fin de son contrat, avait travaillé le jour suivant de son propre chef, a pu en déduire, sans se déterminer par des motifs inopérants, que la demande de requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée devait être rejetée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme M... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour Mme M...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté Mme M... de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE Mme M... a été engagée par la société Pierre Fabre Santé Information, en qualité de déléguée dentaire, par contrat à durée déterminée du 1er février 2012, pour une durée de 2 mois et 3 semaines et 3 jours en remplacement de Mme Laura O..., déléguée dentaire temporairement absente pour congé de maternité ; un nouveau contrat à durée déterminée a été signé le 12 avril 2012, cette fois pour une durée minimale de 2 mois et 8 jours pour assurer le remplacement de Mme V..., déléguée dentaire temporairement absente pour congés de maladie ; par courrier du 10 décembre 2014, la société Pierre Fabre Santé Information a licencié Mme V... pour inaptitude et impossibilité de reclassement ; par courrier du 11 décembre 2014, la société Pierre Fabre Santé Information a notifié à Mme M... que « suite au licenciement pour inaptitude de Mme N... V..., intervenu le 10 décembre 2014, le contrat à durée déterminée conclu avec vous le 1er mai 2012 afin d'assurer le remplacement dans ses fonctions de Mme N... V... temporairement absente pour congés maladie étant devenu sans objet, il prend fin automatiquement à cette date » ; Mme M... a saisi le conseil de conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt par requête du 19 mars 2015 ; considérant, sur la requalification du contrat, que Mme M... soutient qu'ayant été rengagée pour remplacer Mme V... pendant son arrêt de maladie de la société Pierre Fabre Santé Information aurait dû mettre fin à son contrat de travail à durée déterminée dès le 10 décembre, date de notification du licenciement de Mme V..., et qu'en lui notifiant la fin de la relation contractuelle seulement le lendemain, 11 décembre par courrier recommandé, elle laissé se poursuivre la relation contractuelle au-delà de son terme ce qui entraîne la transformation en contrat à durée indéterminée ; qu'il n'est pas discuté que l'absence de Mme V... a pris fin le 10 décembre 2014 ; que par mail ayant pour objet « demande de confirmation » adressé à la société Pierre Fabre Santé Information le 10 décembre 2014 à 16h35, Mme M... a indiqué à son interlocutrice avoir reçu un appel de son directeur régional dans l'après-midi qui lui annonçait que son contrat de travail prenait fin aujourd'hui, lui a rappelé que cette pratique était interdite et lui a demandé une confirmation écrite de la fin de ce contrat ; que Mme M... confirme d'ailleurs avoir été informée par téléphone de la fin de la relation contractuelle le 10 décembre 2014 ; que, dès lors que le contrat de travail conclu pour assurer le remplacement d'une salariée absente jusqu'à la reprise du travail par cette salariée a pour terme la fin de l'absence de la salariée remplacée et que les dispositions relatives au contrat à durée déterminée de remplacement ne prévoient pas les modalités d'information du salarié et n'exigent donc pas une notification écrite, il convient de dire que l'information donnée par téléphone a valablement notifié à Mme M... la fin du contrat de remplacement ; que c'est donc de son propre chef et passant outre à cet appel téléphonique qu'elle a travaillé le jour suivant ;
1°) ALORS QUE le contrat à durée déterminée conclu pour le remplacement d'un salarié absent, qui a pour terme la fin de l'absence du salarié remplacé ; qu'ainsi, un tel contrat de remplacement prend fin le jour du licenciement du salarié remplacé ; que dès l'instant que la relation de travail se poursuit à l'expiration du terme du contrat de travail à durée déterminée, sans signature d'un nouveau contrat à durée déterminée, et quelle que soit la nature de l'emploi occupé, le contrat de travail devient un contrat à durée indéterminée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que par courrier du 10 décembre 2014, la société Pierre Fabre Santé Information a licencié Mme V... pour inaptitude et impossibilité de reclassement et que ce n'est que le 11 décembre 2014 que la société Pierre Fabre Santé Information a notifié par courrier à Mme M... que son contrat de travail à durée déterminée conclu pour pallier l'absence de Mme V... prenait automatiquement fin à la date du licenciement de cette dernière ; qu'en décidant pourtant de débouter Mme M... de sa demande de requalification des contrats de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, aux motifs inopérants que « les dispositions relatives au contrat à durée déterminée de remplacement ne prévoient pas les modalités d'information du salarié et n'exigent donc pas une notification écrite » et qu'il « convient de dire que l'information donnée par téléphone a valablement notifié à Mme M... la fin du contrat de remplacement », tandis qu'il résultait de ses propres constatations que l'employeur avait attendu le 11 décembre 2014 pour notifier à la salariée le terme de son contrat de travail au 10 décembre 2014 et que l'exécution du contrat de travail s'était donc poursuivie au-delà de ce terme, la cour d'appel a violé les articles L. 1245-1 et L. 1245-11 du code du travail ;
2°) ET ALORS QUE seule la cessation définitive d'activité du salarié remplacé entraîne de plein droit la fin du contrat à durée déterminée ; que lorsqu'un contrat à durée déterminée a été conclu sans terme précis, pour remplacer un salarié absent, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve de l'événement constitutif du terme et de sa date, et qu'il a valablement notifié au salarié remplaçant la date de ce terme ; qu'en retenant toutefois, par des motifs inopérants, que l'employeur avait valablement notifié à Mme M..., le jour même, le licenciement de Mme V... le 10 décembre 2014 et la cessation de son contrat à durée déterminée, par un simple appel téléphonique ne garantissant pourtant nullement la justification par l'employeur de la date du terme du contrat ni de son motif, et ne permettant donc pas au salarié de savoir si le contrat cessait effectivement et régulièrement ou s'il se poursuivait au contraire, la cour d'appel a encore violé les articles L. 1245-1 et L. 1245-11 du code du travail, ensemble l'article 1315 du code civil dans sa version applicable au litige.
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