Jurisprudence sociale
Version gratuite
Cassation sociale, 3 février 2021, n° 18-25.129
Pendant la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, l'employeur ne peut rompre ce contrat que s'il justifie d'une faute grave de l'intéressé ou d'une impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.
RÉPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
IK
COUR DE CASSATION ______________________
Audience publique du 3 février 2021
Cassation
M. SCHAMBER, conseiller doyen faisant fonction de président
Arrêt n° 176 F-D
Pourvoi n° M 18-25.129
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 FÉVRIER 2021
M. M... B..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° M 18-25.129 contre l'arrêt rendu le 28 septembre 2018 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Cegelec Elmo, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Sornay, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. B..., de la SCP Boullez, avocat de la société Cegelec Elmo, après débats en l'audience publique du 9 décembre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Sornay, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 28 septembre 2018), M. B... a été engagé le 2 janvier 2006 en qualité d'électricien par la société Elmo entreprise, aux droits de laquelle se trouve la société Cegelec Elmo.
2. Le contrat de travail a été suspendu à la suite d'un accident du travail survenu le 17 décembre 2014.
3. Licencié pour faute grave le 30 décembre 2014 en raison de retards répétés à sa prise de service, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. Le salarié fait grief à l'arrêt de limiter à une certaine somme la somme allouée à titre d'indemnité de grand déplacement, alors « qu'est réputé en grand déplacement l'ouvrier qui travaille dans un chantier métropolitain dont l'éloignement lui interdit - compte tenu des moyens de transport en commun utilisables - de regagner chaque soir le lieu de résidence, situé dans la métropole, qu'il a déclaré lors de son embauchage et qui figure sur son bulletin d'embauche ; que la cour a constaté que le salarié, résidant à Dunkerque, a été affecté sur des chantiers à Paris, en Seine-et-Marne et en Seine-Saint-Denis ; qu'en se bornant à prendre en compte les moyens de transport en commun utilisables entre Dunkerque et la gare de Paris Nord, quand les moyens de transport visés par la convention collective sont ceux entre le chantier métropolitain et le lieu de résidence du salarié, la cour d'appel a violé l'article 8.10 de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics. »
Réponse de la Cour
Sur la recevabilité du moyen
5. L'employeur conteste la recevabilité du moyen. Il soutient qu'il est nouveau, mélangé de fait et de droit et dès lors irrecevable.
6. Cependant, le salarié a invoqué devant la cour d'appel le fait qu'il ne pouvait, en n'utilisant que des moyens de transport en commun, regagner chaque soir son domicile dunkerquois et prendre l'embauche à l'heure prévue le lendemain compte tenu des horaires pratiqués.
7. Le moyen est donc recevable.
Sur le bien fondé du moyen
Vu l'article 8.10 de la convention collective nationale de ouvriers de travaux publics du 15 décembre 1992 :
8. Aux termes de ce texte, est réputé en grand déplacement l'ouvrier qui travaille dans un chantier métropolitain dont l'éloignement lui interdit - compte tenu des moyens de transport en commun utilisables - de regagner chaque soir le lieu de résidence, situé dans la métropole, qu'il a déclaré lors de son embauchage et qui figure sur son bulletin d'embauche.
5. Pour limiter la somme allouée au salarié au titre des indemnités de grand déplacement, l'arrêt retient qu'en dehors des périodes d'indisponibilité des moyens de transport pour cas de force majeure et grèves ou des jours de fin de chantier après 19 heures, le salarié effectuait ses trajets en train entre Dunkerque, où il avait sa résidence, et la gare du Nord à Paris, et qu'en dehors des circonstances exceptionnelles susvisées, le salarié, qui était en mesure de rejoindre son domicile au moyen de transports en commun, ne pouvait prétendre au versement d'indemnités de grand déplacement.
6. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le salarié n'établissait pas que les trajets entre son lieu de résidence et la gare SNCF de Dunkerque et ceux entre la gare du Nord et les différents chantiers en région parisienne ne pouvaient pas s'effectuer par des transports en commun, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, et le troisième moyen, réunis
Enoncé du moyen
9. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande au titre des frais périodiques de transport et de limiter à une certaine somme la somme allouée à titre de dommages-intérêts pour non-respect des dispositions conventionnelles, alors :
« 1°/ que la cassation qui sera prononcée sur le premier moyen emportera par voie de conséquence la censure du chef du dispositif de l'arrêt qui a débouté le salarié de sa demande au titre des frais périodiques de transport, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°/ que la cassation qui sera prononcée sur le premier moyen emportera par voie de conséquence la censure du chef du dispositif de l'arrêt qui a limité la condamnation de la société à payer au salarié des dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à ses obligations conventionnelles s'agissant des indemnités de grand déplacement qu'il aurait dû percevoir dans les seuls cas de fins de chantier tardives et d'indisponibilité du service ferroviaire, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 624 du code de procédure civile :
10. La cassation prononcée sur le premier moyen entraîne par voie de conséquence celle des dispositions de l'arrêt rejetant la demande formée au titre des frais périodiques de transport d'une part, et limitant à 2 000 euros la somme allouée à titre de dommages-intérêts pour non-respect des dispositions conventionnelles d'autre part.
Sur le quatrième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
11. Le salarié fait grief à l'arrêt attaqué de dire le licenciement fondé sur une faute grave et de le débouter de ses demandes d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement nul, alors « que pendant la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, seul un manquement à l'obligation de loyauté peut constituer une faute grave ; qu'en retenant que la faute grave est caractérisée compte tenu de la fréquence et de la répétition des absences en dépit de l'avertissement délivré en 2013, de leur impact sur l'organisation du service et de ses absences injustifiées, quand aucun manquement à l'obligation de loyauté n'était reproché au salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-9 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 1226-9 du code du travail :
12. Selon ce texte, pendant la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, l'employeur ne peut rompre ce contrat que s'il justifie d'une faute grave de l'intéressé ou d'une impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.
13. Pour dire que la faute grave est caractérisée et que l'employeur n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 1226-9 du code du travail permettant le congédiement pour faute grave d'un salarié dont le contrat de travail est suspendu suite à un accident du travail, l'arrêt retient que compte tenu de la fréquence des retards, de leur répétition en dépit de l'avertissement décerné en 2013, de leur impact sur l'organisation du service et de ses absences injustifiées, la poursuite du contrat de travail était impossible durant le délai-congé.
14. En statuant ainsi, alors que pendant la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, l'employeur peut seulement, dans le cas d'une rupture pour faute grave, reprocher au salarié des manquements à l'obligation de loyauté, la cour d'appel, qui n'a pas constaté un tel manquement, a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 28 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai autrement composée ;
Condamne la société Cegelec Elmo aux dépens ;
En application l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Cegelec Elmo et la condamne à payer à M. B... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. B...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité à 9 888,46 euros la somme allouée à titre d'indemnité de grand déplacement.
AUX MOTIFS QU'il ressort du contrat de travail conclu le 2/1/2006 entre la société Elmo et M. B... que celui-ci se déclarait domicilié [...] ; qu'il résulte par ailleurs des débats et il n'est pas contesté que sur toute la période visée dans sa réclamation M. B... a travaillé exclusivement sur des chantiers situés en région parisienne, notamment porte de la Villette à Paris, en Seine-et-Marne et en Seine-Daint-Denis ; qu'au vu des justificatifs de toute nature produits aux débats il appert que durant l'ensemble de la période visée dans sa réclamation M. B... résidait de manière effective et stable à Dunkerque, localité figurant sur son contrat de travail ; que s'il est exact qu'occasionnellement l'intéressé a pu résider chez son frère ou en tout autre lieu en région parisienne il s'est agi d'une résidence précaire et épisodique utilisée à l'occasion des chantiers ; qu'au vu des nombreux billets de train produits aux débats, pour des trajets entre Dunkerque et Paris Nord, il appert que compte tenu de ses horaire et des nombreuses liaisons ferroviaires entre ces deux villes M. B... ne s'est pas toujours trouvé dans l'impossibilité de regagner son domicile le soir ; qu'il appert en effet que durant toute la période d'exécution de son contrat de travail, à l'exception des périodes d'indisponibilité des moyens de transport pour cas de force majeure et grèves et des chantiers se terminant après 19 heures, il a utilisé le train pour regagner chaque soir son domicile où il était en mesure d'employeur ce moyen de transport, étant observé que le premier train entre Dunkerque et Paris partait à 5 heures 04 et que le retour était possible de Paris-Nord à 19h52 ; que M. B... soutient avoir dû se lever chaque matin de bonne heure pour se rendre sur ses chantiers mais ce point corrobore les éléments précités démontrant qu'il avait généralement la possibilité de rentrer chez lui au moyen des transports en commun, chaque soir après son travail ; que s'il résulte des justificatifs qu'outre le train M. B... assurait les trajets Dunkerque Paris en voiture il n'en demeure pas moins qu'en dehors des fins de chantier tardives et des services ferroviaires interrompus il ne lui était pas impossible, au sens de la Convention collective, d'utiliser les moyens de transport en commun ; qu'eu égard aux justificatifs versés aux débats il sera alloué à M. B..., après déduction des indemnités de petits déplacements afférentes, la somme de 9 888,46 euros au titre des périodes durant lesquelles il était empêché d'utiliser les moyens de transport en commun en raison de l'indisponibilité des transports en commun et de ses horaires tardifs de fin de service.
AUX MOTIFS à les supposés adoptés QUE il n'est pas discuté que la distance entre Dunkerque et Paris est bien supérieure à 50 km et que le temps de trajet notamment en train est nettement supérieur à 1h30 ; qu'en réalité, Monsieur M... B... intervenait sur des chantiers à plus de 200 km de chez lui lorsqu'il demeurait à Dunkerque ; que cependant, Monsieur M... B... invoque avoir dû payer des trajets aller-retour quotidien Dunkerque-Paris pour aller travailler et rentrer chez lui de sorte que la présomption précitée ne peut s'appliquer ; qu'il produit d'ailleurs plusieurs tickets de train Dunkerque-Paris et Paris-Dunkerque à cette fin ; qu'ainsi Monsieur M... B... n'est pas éligible aux indemnités de grands déplacements car c'est le critère du découcher qui détermine le régime applicable ; qu'il indique être rentré chez lui chaque soir à Dunkerque, il n'y a pas de découcher de sorte que le régime est celui des indemnités de petits déplacements ; qu'il n'est pas contesté que Monsieur M... B... a perçu les indemnités de petits déplacements et primes de panier comme prévu à son contrat de travail.
1° ALORS QUE se trouve en situation de grand déplacement au sens de l'article 8.10 de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics le salarié qui est affecté sur un chantier se situant en dehors de la zone de petits déplacements, c'est-à-dire à une distance de plus de 50 kilomètres du siège social, de l'agence régionale ou du bureau local de l'entreprise ; que la cour a relevé que le salarié résidait de manière effective et stable à Dunkerque et avait travaillé exclusivement sur des chantiers situés en région parisienne ; qu'en déterminant le montant alloué en considération des seules périodes où le salarié était empêché d'utiliser les moyens de transport en commun, quand une distance de plus de 300 kilomètres séparait le chantier du lieu de résidence de l'intéressé, ce dont il résultait un temps de trajet de plus d'une heure et trente minutes à l'aller et au retour, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé articles 8.1 à 8.4 et 8.10 de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics.
2° ALORS à tout le moins QU'en vertu de l'article 8.10 de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics, est réputé en grand déplacement l'ouvrier qui travaille dans un chantier métropolitain dont l'éloignement lui interdit – compte tenu des moyens de transport en commun utilisables – de regagner chaque soir le lieu de résidence, situé dans la métropole, qu'il a déclaré lors de son embauchage et qui figure sur son bulletin d'embauche ; qu'il résulte de l'article 8.11 que l'indemnité de grand déplacement, qui a pour objet de compenser les frais correspondant au logement, à la nourriture et aux dépenses supplémentaires qu'entraîne pour le salarié l'éloignement de son foyer, a un caractère forfaitaire excluant l'exigence de justification des dépenses engagées ; qu'en limitant le droit à une indemnité de grand déplacement eu égard aux justificatifs versés aux débats par le salarié pour les périodes durant lesquelles il était empêché d'utiliser les moyens de transport en commun en raison de leur indisponibilité et de ses horaires tardifs de fin de service quand l'indemnité de grand déplacement est due indépendamment de la justification des dépenses engagées, la cour d'appel a violé les articles 8.10 et 8.11 de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics.
3° ALORS QU'est réputé en grand déplacement l'ouvrier qui travaille dans un chantier métropolitain dont l'éloignement lui interdit – compte tenu des moyens de transport en commun utilisables – de regagner chaque soir le lieu de résidence, situé dans la métropole, qu'il a déclaré lors de son embauchage et qui figure sur son bulletin d'embauche ; que la cour a constaté que le salarié, résidant à Dunkerque, a été affecté sur des chantiers à Paris, en Seine et Marne et en Seine Saint Denis ; qu'en se bornant à prendre en compte les moyens de transport en commun utilisables entre Dunkerque et la gare de Paris Nord, quand les moyens de transport visés par la convention collective sont ceux entre le chantier métropolitain et le lieu de résidence du salarié, la cour d'appel a violé l'article 8.10 de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics.
4° ALORS QU'un même déplacement ne peut à la fois constituer un petit déplacement et un grand déplacement au sens de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics ; qu'en déduisant les indemnités de petits déplacements afférentes de la somme allouée au titre de l'indemnité de grand déplacement, la cour d'appel a violé les articles 8.2 et 8.10 de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande au titre des frais périodiques de transport.
AUX MOTIFS QU' il résulte des éléments précités que M. B... était en situation de grand déplacement lorsque les circonstances ne permettaient pas son retour chaque soir à Dunkerque, soit lors des interruptions des services de transport en commun soit à raison de ses horaires de fin de service ; que son droit à indemnités pour voyages de détente suppose cependant que pendant une période continue au moins égale à deux semaines il ait été placé dans l'impossibilité de regagner son domicile de Dunkerque à raison d'une interruption des services ferroviaires et/ou de fins de service tardives ; qu'il ne résulte d'aucune pièce qu'il ait été confronté à de telles situations.
1° ALORS QUE la cassation qui sera prononcée sur le premier moyen emportera par voie de conséquence la censure du chef du dispositif de l'arrêt qui a débouté le salarié de sa demande au titre des frais périodiques de transport, en application de l'article 624 du code de procédure civile.
2° ALORS QUE les frais de transport en commun engagés périodiquement par le déplacé pour se rendre dans la localité située dans la métropole où il a déclaré résider au moment de son embauchage, à condition qu'il y ait conservé une résidence, et pour revenir au lieu de son travail, sont remboursés au prix d'un voyage en 2e classe ; que suivant l'éloignement de cette localité, et sauf aménagement particulier, pour une meilleure fréquence, convenu entre l'employeur et l'intéressé, il est accordé un voyage aller et retour toutes les 2 semaines de 251 à 500 kilomètres ; que les frais de transport de l'ouvrier lui sont dus, soit qu'il se rende dans la localité visée au premier alinéa, soit qu'un membre de sa famille se rende auprès de lui ; qu'en décidant que le droit du salarié à bénéficier d'une indemnité supposait qu'il justifie avoir été placé dans l'impossibilité de regagner son domicile à Dunkerque à raison d'une interruption des services ferroviaires et/ou de fins de service tardives pendant une période continue au moins égale à deux semaines, la cour d'appel qui a ajouté une condition à la loi qui n'y figure pas, a violé l'article 8.14 de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité à 2 000 euros la somme allouée à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions conventionnelles.
AUX MOTIFS QU'il résulte de ce qui précède que l'employeur n'a pas fait le nécessaire afin de remplir M. B... de ses droits à indemnités de grand déplacement dans les cas de fins de chantier tardives et d'indisponibilité du service ferroviaire alors même qu'au regard des mentions figurant sur son contrat de travail il était inévitable que M. B... ne serait pas systématiquement en mesure de rejoindre Dunkerque en utilisant les moyens de transport en commun ; que de ce fait M. B... a subi un dommage physique, moral et financier dès lors que faute de paiement des indemnités de grands déplacement il lui est arrivé de regagner son domicile en voiture plutôt que de choisir un hébergement sur place.
ALORS QUE la cassation qui sera prononcée sur le premier moyen emportera par voie de conséquence la censure du chef du dispositif de l'arrêt qui a limité la condamnation de la société à payer au salarié des dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à ses obligations conventionnelles s'agissant des indemnités de grand déplacement qu'il aurait dû percevoir dans les seuls cas de fins de chantier tardives et d'indisponibilité du service ferroviaire, en application de l'article 624 du code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement fondé sur une faute grave et d'AVOIR débouté le salarié de ses demandes d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement nul.
AUX MOTIFS QUE dans la lettre de licenciement l'employeur reproche à M. B... d'avoir à 9 reprises, entre le 8 octobre et le 8 décembre 2014, pris son service avec retard sans en aviser son supérieur hiérarchique et sans justification valable ; qu'il lui fait également grief de ne pas avoir prévenu sa hiérarchie de son absence pour maladie du 12 au 14 novembre 2014 et d'avoir été absent les 10 novembre et 1er décembre 2014 sans l'avertir ; que M. B... ne conteste pas être arrivé en retard les 9 jours considérés mais il prétend avoir informé son supérieur ; que le grief tiré de l'absence d'information de la hiérarchie sur les absences pour maladie du 12 au 14/11/2014 n'est établi par aucune pièce ; que les éléments versés aux débats ne permettent pas de déterminer s'il a ou non informé son supérieur ; que le doute devant profiter au salarié il y a lieu de dire qu'il a prévenu ses responsables de tous ses retards ; que pour autant, il s'est agi de retards répétés sur une courte période et le fait qu'il en ait informé son employeur ne permet pas d'exclure la faute d'autant que le 9/9/2013 M. B... avait été sanctionné d'un avertissement pour des faits similaires avant de faire l'objet par la suite de rappels à l'ordre verbaux ; que M. B... expose en outre que pour chaque jour de retard visé dans la lettre de licenciement il n'a pu arriver à l'heure en raison de perturbations du service ferroviaire mais les bulletins de retard délivrés par la SNCF concernent les journées des 19 mars et 15 juillet 2014 non visées dans la lettre de licenciement ; que force est donc de constater qu'aucun élément ne permet d'excuser ses retards lors des prises de service visées dans la lettre de licenciement ; que le salarié les explique par le fait qu'il résidait à Dunkerque et qu'il lui était difficile d'arriver à l'heure mais cette argumentation est inopérante dès lors qu'ayant choisi de résider à plus de 200 km de son lieu de travail il lui appartenait de s'organiser pour arriver à l'heure fixée par son employeur ; que c'est tout aussi vainement qu'il impute à ce dernier la responsabilité de ses retards pour ne pas lui avoir payé ses indemnités de grand déplacement alors que les retards visés dans la lettre de licenciement ne sont pas intervenus en période d'indisponibilité des transports en commun ou d'horaires empêchant leur utilisation ; que M. B... ne peut non plus valablement soutenir que son employeur serait fautif pour ne pas lui avoir trouvé un chantier plus proche de son domicile alors qu'il n'en avait pas l'obligation et qu'il ne s'est à aucun moment engagé à le faire ; que M. B... soutient que ses absences des 10 novembre et 1er décembre 2014 étaient dues à son état de santé mais il ne verse aucun certificat médical justifiant des causes de son absence le 10/11/2014, de sorte que le grief est établi ; que compte tenu de la fréquence des retards, de leur répétition en dépit de l'avertissement décerné en 2013, de leur impact sur l'organisation du service et de ses absences injustifiées la poursuite du contrat de travail était impossible durant le délai-congé ; (qu'il) en résulte que la faute grave est caractérisée et que l'employeur n'a pas méconnu les dispositions de l'article L.1226-9 du code du travail permettant le congédiement pour faute grave d'un salarié dont le contrat de travail est suspendu suite à un (acci)dent du travail.
1° ALORS QUE pendant la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, seul un manquement à l'obligation de loyauté peut constituer une faute grave ; qu'en retenant que la faute grave est caractérisée compte tenu de la fréquence et de la répétition des absences en dépit de l'avertissement délivré en 2013, de leur impact sur l'organisation du service et de ses absences injustifiées, quand aucun manquement à l'obligation de loyauté n'était reproché au salarié, la cour d'appel a violé l'article L.1226-9 du code du travail.
2° ALORS QUE la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'elle est fondée sur une violation délibérée par le salarié de ses obligations contractuelles ; qu'en disant que c'est vainement que le salarié impute la responsabilité de ses retards à l'employeur pour ne pas lui avoir payé ses indemnités de grand déplacement aux motifs que les retards reprochés ne sont pas intervenus en période d'indisponibilité des transports en commun ou d'horaires empêchant leur utilisation, quand le défaut de versement des indemnités de grand déplacement avait empêché le salarié de se loger à proximité du chantier et d'arriver en conséquence à l'heure chaque matin, peu important les périodes d'indisponibilité des transports en commun ou d'horaires empêchant leur utilisation, la cour d'appel a violé les articles L.1235-4 et L.1235-9 du code du travail.ECLI:FR:CCASS:2021:SO00176
Aller plus loin sur “Jurisprudence Faute grave”
Articles liés du Code du travail
|
|