Cassation sociale, 17 octobre 2006, n° 05-40.769 cassation sociale - Editions Tissot

Jurisprudence sociale

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Cassation sociale, 17 octobre 2006, n° 05-40.769

Le salarié licencié sans que l’employeur ait demandé l’autorisation de licenciement peut soit être réintégré, soit prétendre à diverses indemnisations en violation du statut protecteur. Le salarié peut refuser une proposition de réintégration de l’employeur.

Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mardi 17 octobre 2006
N° de pourvoi: 05-40769
Non publié au bulletin Rejet

Président : M. BAILLY conseiller, président


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu que M. X..., au service de la société KS Motorac en qualité de chef magasinier, a été élu membre du comité d'entreprise le 23 avril 2001 ; que la société envisageant la suppression de plus de dix emplois dans le cadre d'une restructuration a mis en place un plan social, qui a été approuvé par le comité d'entreprise le 27 avril 2001 ; que le salarié a été licencié le 7 mai 2001 sans autorisation de l'inspection du travail ; que l'employeur lui a, par courrier du 14 juin 2001, proposé une réintégration qu'il a refusée ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société KS Motorac fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 7 décembre 2004) d'avoir dit le licenciement nul et de l'avoir en conséquence condamnée à payer au salarié diverses sommes à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur, d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour rupture abusive, alors, selon le moyen :

1 / que se contredit en violation de l'article 455 du nouveau code de procédure civile, l'arrêt qui énonce d'abord que la proposition de réintégration faite à M. X... n'était " pas véritablement sérieuse dans la mesure où son poste était supprimé " et qui constate ensuite " qu'il n'est nullement établi que le mandat de l'intéressé aurait pris fin de facto avec la fermeture du magasin de Blanc-Mesnil, celui-ci pouvant se poursuivre dans de nouvelles conditions " ;

2 / que la protection d'ordre public prévue à l'article L. 436-1 du code du travail est instituée dans l'intérêt du mandat représentatif et non du salarié lui-même et que le contrat de travail s'exécute de bonne foi ; de sorte que viole ce texte et l'article L. 120-4 du code du travail l'arrêt qui refuse de sanctionner la réticence du salarié protégé qui, après avoir participé à la négociation du plan social et en avoir revendiqué le bénéfice en signant une convention de conversion, laisse devenir définitif son licenciement prononcé par erreur et refuse aussitôt toute réintégration afin de bénéficier d'une indemnisation correspondant aux salaires couvrant la période de protection due à son mandat, mais sans assumer celui-ci ;

3 / qu'en allouant à M. X... une indemnité de 64 723,75 euros correspondant au plein de ses salaires jusqu'à la fin de son mandat et en faisant ainsi abstraction des rémunérations qu'il se targuait d'avoir perçu par ailleurs pendant la période considérée, notamment en entrant au service d'autres entreprises comme le faisait valoir la société KS Motorac, la cour d'appel a consacré un cumul de ressources de même nature en violation des articles L. 436-1 du code du travail et 1382 du code civil ;

4 / que l'arrêt qui alloue une indemnité forfaitaire sans rapport avec le préjudice réellement subi par l'intéressé, et qui ne tient pas compte des salaires et/ou des revenus de remplacement que ce dernier a pu percevoir, revêt le caractère d'une pénalité au sens de l'article 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne saurait être infligée sans texte la prévoyant, ainsi que le soutenait la société KS Motorac, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que le salarié, licencié sans autorisation administrative, avait, comme il en avait la faculté, refusé la réintégration qui lui était proposée, a exactement décidé qu'il avait droit, à titre de sanction de la méconnaissance par l'employeur du statut protecteur, à une indemnité égale à la rémunération qu'il aurait perçue depuis la date de son éviction jusqu'à l'expiration de la période de protection, peu important qu'il ne soit pas resté à la disposition de l'employeur ; que cette indemnité ne constitue pas une peine au sens de l'article 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société KS Motorac à payer à M. X... une somme à titre d'indemnité de licenciement, alors, selon le moyen, que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'il résulte tant de l'arrêt attaqué que des conclusions d'appel de M. X..., que ce dernier ne demandait plus la condamnation de la société KS Motorac à lui verser une indemnité de licenciement ; qu'en lui allouant néanmoins la somme de 662,42 euros à ce titre, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé ainsi les articles 4 et 5 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu que s'il a été alloué des sommes non demandées, il appartient à la partie à laquelle la décision fait grief de saisir la juridiction qui a statué dans les conditions prévues par les articles 463 et 464 du nouveau code de procédure civile ;

Que le moyen n'est pas recevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société KS Motorac aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne la société KS Motorac à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille six.