Etape
1 -
Centraliser tous les éléments en rapport avec l'erreur
Examen des faits
Quelle que soit la faute ou l'erreur que vous reprochez à l'un de vos salariés, il est essentiel d'avoir tous les éléments vous permettant de démontrer que la personne que vous avez identifiée est bien celle qui a commis l'erreur, d'autant plus lorsque l'erreur est en rapport avec un aspect monétaire.
Attention
Un salarié injustement accusé de vol pourrait demander réparation du préjudice subi et vous seriez donc contraint de lui verser des dommages et intérêts.
Examen du contexte
Pensez bien à récapituler tous les éléments relatifs au salarié (même hors contexte) : âge, ancienneté et dossier disciplinaire du salarié, fonctions occupées, statut, etc., autant d'éléments qui peuvent constituer des circonstances atténuantes ou aggravantes à la faute commise.
Notez-le
Les juges considèrent qu'un licenciement prononcé en raison d'erreurs professionnelles est sans cause réelle et sérieuse dès lors que les erreurs sont en lien avec une pathologie dont l'employeur avait connaissance. L'employeur peut juger nécessaire d'engager une enquête interne pour vérifier la véracité des faits. Les juges considèrent que l'employeur a alors pleinement connaissance des faits reprochés, l'accomplissement des vérifications fait courir le délai de prescription. Il en va toutefois différemment si le rapport réalisé est considéré comme impartial par les juges.
En effet, on ne peut pas avoir une appréciation identique d'une même faute si elle est commise par un salarié travaillant depuis de nombreuses années dans l'entreprise et auquel aucune faute n'a jamais été reprochée ou par un collaborateur nouvellement embauché dont l'attitude au travail a déjà donné lieu à des observations.
Par ailleurs, vous devez prendre en compte certains éléments qui atténuent, voire éradiquent totalement la faute de votre salarié. Ainsi, votre salarié a peut-être fait cette erreur dans un contexte qui le dédouanerait totalement (suite à une agression qui l'aurait choqué).
Il est également important de reprendre les diverses pièces de votre dossier relatif aux faits reprochés : attestation éventuelle de témoins, descriptif des faits, situation du salarié au moment des faits (problèmes personnels).
Attention
Si l'employeur a le pouvoir de contrôler et de surveiller l'activité de ses salariés, il ne peut pas mettre en oeuvre un dispositif de surveillance clandestin, qui est à ce titre déloyal (par exemple : mandater des salariés pour se rendre dans l'établissement en se présentant comme des simples clients, utiliser un huissier pour organiser un montage et recueillir une preuve de la faute). Le contrôle des communications téléphoniques est possible sous réserve de respecter plusieurs conditions : informations préalables, proportionnalité et pertinence de la mesure afin de respecter la vie privée des salariés. L'employeur ne peut, par ailleurs, procéder à la fouille des effets personnels du salarié ou de son vestiaire qu'avec son accord et à la condition de l'avoir informé de son droit de s'y opposer et d'exiger la présence d'un témoin. Toute procédure reposant sur des dispositifs pour lesquels les salariés n'ont pas été préalablement informés pourra être contestée.
Etape
2 -
Engager une procédure de sanction disciplinaire
Interdiction d'une retenue sur salaire
Le législateur pose le principe de l'interdiction des sanctions pécuniaires et amendes à l'encontre d'un salarié. Les juges ont d'ores et déjà statué pour faits similaires. Ils ont jugé que constitue une sanction pécuniaire illicite la retenue sur salaire suite à un manquant dans la caisse, peu importe les dispositions de la convention collective et du règlement intérieur : elles ne peuvent pas instituer une responsabilité pécuniaire de plein droit à l'encontre du salarié.
Notez-le
Une sanction pécuniaire est une mesure, affectant directement ou indirectement la rémunération, prise par l'employeur en raison d'une faute commise par le salarié. Elle ne doit pas être confondue avec la rétrogradation. La rétrogradation peut avoir pour conséquence une diminution de la rémunération du salarié mais est la conséquence d'un déclassement. Aussi, si la baisse de salaire n'est pas consécutive à un changement de poste, elle doit s'analyser en sanctions pécuniaires. Une rétrogradation doit, toutefois, être considérée comme une sanction disciplinaire dès lors que la modification du contrat est proposée au salarié après l'entretien préalable à une sanction disciplinaire. En cas de non-respect de l'obligation d'information du salarié sur le droit d'accepter ou de refuser la modification, la rétrogradation doit être annulée.
Toute mention contraire par exemple dans le contrat de travail ou le règlement intérieur serait réputée non écrite. Les juges ont sanctionné le fait de supprimer ou de réduire une prime au versement obligatoire comme sanction disciplinaire, de même qu'une réduction d'horaires ayant pour conséquence de réduire la rémunération du salarié.
Notez-le
Un rescrit peut être demandé à l'inspection du travail afin de s'assurer de la conformité du règlement intérieur. La décision est opposable à l'Administration tant que la situation de fait et la législation sont inchangées et tant qu'aucune modification de l'appréciation n'a été notifiée à l'employeur.
Graduation de la sanction
L'erreur d'encaissement est une faute qui peut être sanctionnée comme telle. Dans l'échelle des sanctions disciplinaires pour les fautes professionnelles, le licenciement est la sanction la plus grave. Toute faute n'aboutit pas à un licenciement. La sanction doit être graduée en fonction de :
- la faute commise : nature de la faute, faute isolée ou au contraire répétée ;
- du passé professionnel du salarié : ancienneté dans l'entreprise, ancienneté au poste, formation, nature des fonctions, place du salarié dans la hiérarchie, sanctions pour des faits analogues ;
- du préjudice subi ; et
- de votre tolérance antérieure : si vous avez longtemps toléré des erreurs de caisse, la légitimité de la sanction peut être remise en cause.
Une petite erreur de caisse commise par un salarié au passé professionnel irréprochable ne saurait justifier un licenciement. Les juges apprécient souverainement le caractère réel et sérieux du licenciement et s'assurent que la faute invoquée justifie, le cas échéant, un licenciement. La commission intentionnelle d'actes préjudiciables à l'entreprise est insuffisante à caractériser l'intention de nuire du salarié et, par conséquent, à qualifier l'existence d'une faute lourde.
Des négligences ayant permis des détournements de fonds ne sont pas nécessairement constitutives d'une faute grave.
AttentionL'employeur qui a eu connaissance de plusieurs faits fautifs et qui décide de n'en sanctionner que certains ne peut plus invoquer les autres faits pour prononcer ensuite une autre sanction disciplinaire.
Le salarié peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail en présence d'une sanction disciplinaire abusive ayant pour conséquence de rendre impossible la poursuite de la relation de travail.
Une action en responsabilité civile ne pourra être intentée à l'encontre de votre salarié qu'à la condition de caractériser une faute lourde à son égard. Une faute est une faute commise dans l'intention de nuire à l'employeur. La charge de la preuve vous revient. Une telle action est à exclure dans le cadre d'une erreur de caisse.
Mise en place de la procédure disciplinaire
S'il s'agit d'un avertissement ou d'un blâme sans report au dossier, il suffira de lui faire parvenir le courrier par lettre recommandée avec accusé de réception ou par remise en mains propres.
Attention
Respectez les dispositions du règlement intérieur concernant la procédure disciplinaire. Les formalités relatives à la mise en oeuvre ou à la modification du règlement intérieur doivent être respectées. Une sanction autre qu'un licenciement ne peut valablement être prise dans une entreprise employant habituellement plus de 50 salariés que si elle est prévue au règlement intérieur. De plus, ne reprochez pas au salarié des faits ayant déjà fait l'objet d'une sanction telle qu'un avertissement.
Pour toute autre sanction (blâme avec inscription au dossier, mise à pied, licenciement), il faudra convoquer le salarié à un entretien pour entendre ses explications en lui indiquant que vous envisagez éventuellement son licenciement.
Attention
La procédure de licenciement doit être conduite par l'employeur ou l'un de ses représentants. Il vous est possible de déléguer vos pouvoirs en la matière à l'un de vos collaborateurs disposant de l'autorité et des moyens matériels à cet effet. Attention, l'auteur du licenciement doit appartenir à votre entreprise.
La lettre de convocation doit également mentionner au salarié la possibilité de se faire assister par un représentant du personnel. Lorsqu'il n'y a pas de représentants du personnel, vous devez indiquer dans le courrier la possibilité de recourir à un conseiller et préciser l'adresse des services dans lesquels la liste des conseillers est tenue à disposition. La convocation doit être adressée par courrier recommandé ou remise en main propre contre décharge. L'absence d'un récépissé ne permet pas de remettre en cause la régularité de la procédure dès lors qu'il est établi que le salarié a régulièrement été convoqué dans les délais.
Notez-le
L'identité des membres du CSE n'a pas à être nécessairement mentionnée dans la lettre de convocation à l'entretien préalable.
L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.
Lors de cet entretien, il pourra être accompagné par une personne de l'entreprise ou un représentant inscrit sur les listes déposées en mairie et à l'unité territoriale du département (ex : direction départementale du travail). Vous devez indiquer au salarié les motifs de la décision envisagée mais en aucun cas dire la sanction retenue à son encontre. Vous devez également recueillir les explications du salarié.
Attention
Vous ne pouvez pas engager une procédure de licenciement à l'encontre d'un salarié relaxé au pénal pour des faits de vol.
La lettre de licenciement
À l'issue de cet entretien, il faudra attendre le délai légal (2 jours) pour lui faire part de votre décision. Vous devez notifier votre décision au plus tard 1 mois après le jour fixé pour l'entretien préalable. Le calcul du délai doit respecter deux principes : il court à compter du lendemain de présentation de la lettre de convocation et doit être prorogé le cas échéant jusqu'au prochain jour ouvrable.
Notez-le
Un fait fautif isolé peut justifier un licenciement pour faute grave, sans qu'il soit nécessaire qu'il ait donné lieu à un avertissement. C'est la gravité de la faute qui doit être considérée, pas nécessairement les antécédents du salarié.
La notification du licenciement doit intervenir dans les délais impartis. Une erreur dans l'adresse du salarié sur le formulaire du recommandé du courrier notifiant le licenciement à l'origine du retour du courrier entraîne la requalification du licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Jusqu'à présent l'employeur devait indiquer dans le courrier de licenciement un motif précis. L'insuffisance de motif rendait le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La lettre de licenciement fixe les limites du litige pouvant porter sur le licenciement mais il est désormais possible à l'employeur de préciser le motif de sa propre initiative ou de celle du salarié après la notification. Lorsque le salarié souhaite obtenir des précisions, il dispose d'un délai de 15 jours suivant la notification du licenciement pour faire cette demande et l'employeur doit y répondre dans un délai de 15 jours suivant la réception de la demande. L'employeur peut de sa propre initiative préciser la motivation du licenciement dans le délai de 15 jours suivant la notification.
Notez-le
L'absence de convocation formelle à un entretien préalable à toute sanction ne fait pas courir les dispositions relatives au délai de notification de la sanction.
Ces dispositions sont entrées en vigueur avec la publication du décret du 29 décembre 2017 fixant les modèles types de courriers de licenciement.
Exemple
Un comportement irresponsable et un comportement ayant causé un trouble au sein de l'organisation ne constituent pas des griefs suffisamment précis et vérifiables.
La procédure de précision des motifs de licenciement permet à l'employeur de clarifier les motifs notifiés dans la lettre de licenciement. L'insuffisance des motifs ne prive plus le licenciement de cause réelle et sérieuse mais ouvre droit pour le salarié à une indemnité d'au moins 1 mois de salaire. Vous devez donc veiller à une rédaction claire des motifs de licenciement dans le courrier de notification ou la lettre ultérieure précisant les motifs.
Notez-le
Vous pouvez mentionner dans la lettre de licenciement des avertissements signifiés à votre salarié même si ces derniers sanctionnaient des faits différents.
Notification par lettre recommandée électronique
Vous pouvez adresser des documents par voie électronique à vos salariés. La valeur juridique de la lettre recommandée électronique est identique à celle d'une lettre recommandée classique avec accusé de réception.
Les conditions de validité de la lettre recommandée électronique sont :
- la garantie, par le tiers chargé de l'acheminement, de l'identité du destinataire et de l'expéditeur ;
- la garantie et la vérification des dates d'expédition et de réception.
Notez-le
Depuis le 1er janvier 2019, l'expéditeur n'a plus à obtenir l'accord préalable du destinataire non professionnel à la réception d'une lettre recommandée électronique.
Le tiers chargé de l'acheminement doit informer le destinataire qu'une lettre recommandée électronique lui est destinée et que, pendant un délai de 15 jours à compter du lendemain de l'envoi de l'information, il a la possibilité d'accepter ou de refuser sa réception.
Lorsque le destinataire l'accepte, le prestataire chargé de l'acheminement adresse le courrier. En cas de refus, il doit en informer l'expéditeur.
Attention
Depuis le 1er janvier 2019, en cas de refus de réception de la lettre recommandée électronique, l'expéditeur (l'employeur) et le destinataire (le salarié) ne peuvent plus demander l'envoi papier.
Le tiers chargé de l'acheminement de la lettre doit conserver les informations contenues dans la lettre, le document original électronique et l'empreinte informatique pendant 1 an au minimum. Durant 1 an vous pouvez accéder aux informations envoyées.
Réorganisation du travail ou mise en place de la formation
L'erreur de caisse peut être constitutive d'une faute justifiant la mise en oeuvre de votre pouvoir disciplinaire, mais vous devez vous interroger sur les raisons ayant conduit le salarié à commettre l'erreur. L'erreur peut avoir été commise lors des arrivées des clients, alors que le salarié devait gérer des appels téléphoniques, ou suite à la mise en place d'un nouveau logiciel de gestion des plannings et des encaissements.
Une réorganisation du travail peut être envisagée avec, par exemple, la présence d'un salarié supplémentaire au moment des arrivées des clients.
L'employeur doit fournir aux salariés les moyens nécessaires à la réalisation de leur travail avec notamment la mise en place de la formation.
Convention collective "Hôtels, cafés, restaurants"(n° de brochure 3292)Pas de dispositions particulières