Comment gérer une grève ?
Droit du travail Hôtels, cafés, restaurantsRéférence : WHC.04.4.050

Comment gérer une grève ?

Promouvoir le dialogue social n'est pas incompatible avec le fait de se préparer au conflit... Savoir réagir est une nécessité pour faire en sorte qu'un conflit collectif ou une grève soit correctement géré. En d'autres termes cela signifie que les conditions de sécurité des biens et des personnes doivent être assurées et qu'une issue doit être trouvée dans les meilleures (ou moins mauvaises) conditions pour chacune des parties respectives.

Comment se préparer, matériellement et intellectuellement, à vérifier qu'une grève est licite et à la gérer au mieux ?

Dans cette page

La bonne méthode

Etape  1 -  Former en amont les managers à la gestion d'une grève

Réagir correctement face à un conflit collectif, gérer une grève, cela s'apprend. Il est utile de former son management, y compris le management de proximité, à la découverte des relations sociales. À titre indicatif, les points à aborder peuvent être les suivants :

  • l'histoire du syndicalisme, le paysage syndical français et européen ;
  • les stratégies respectives des syndicats et les enjeux actuels du syndicalisme ;
  • la structure d'une organisation syndicale ;
  • le fonctionnement des syndicats et du CSE ;
  • les droits et devoirs des grévistes ;
  • le rôle du manager pendant le conflit.
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Etape  2 -  Mettre en place une alarme sociale en prévention

Vous pouvez envisager de privilégier la négociation afin d'éviter tout conflit social, en mettant en place une alarme sociale, notamment en prévoyant un système de préavis avant le déclenchement de la grève. Concrètement, un courrier peut être remis à la direction par les partenaires sociaux indiquant le sujet susceptible de motiver un conflit et les revendications, ce qui marque le début d'une période de concertation, dont les résultats sont formalisés dans un procès-verbal, avant déclenchement du préavis de grève. 

Exemples

  • réception des organisations syndicales dans les 48 heures suivant la remise du courrier ;
  • le cas échéant, période de concertation de 15 jours (avec début des négociations sous 5 jours, et préavis limité à 3 jours en cas de désaccord persistant) ;
  • dans tous les cas, formalisation des résultats dans un procès-verbal ou un relevé de conclusions.

La mise en place d'un tel préavis peut passer par un accord avec les organisations syndicales. Toutefois, les salariés pourraient ne pas respecter cet accord, le préavis ne pouvant pas être imposé.

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Etape  3 -  S'assurer que la grève est licite

Mettre en oeuvre le droit de grève nécessite que les conditions suivantes soient remplies :
  • cessation de travail collective : la cessation du travail par un salarié isolé dans l'entreprise ne peut pas être qualifiée de grève. Elle consiste en un abandon de poste ou un acte d'indiscipline passible de sanctions, sauf si elle s'associe à une grève nationale ou qu'elle concerne l'unique salarié de l'entreprise ;
  • cessation de travail totale : elle ne peut pas être partielle. Ainsi, le fait de freiner la cadence de production ou de ralentir l'activité ne peut pas être considéré comme l'exercice normal du droit de grève et peut être sanctionné. Par exemple, la grève zélée, qui consiste en une application stricte des consignes données par l'employeur (par exemple, en accélérant le rythme de travail à outrance) et qui a pour effet de désorganiser la production, ou, à l'inverse, la grève perlée, qui est une exécution du travail volontairement ralentie ou défectueuse, sont des mouvements illicites. En revanche, la grève tournante, formée d'une succession d'arrêts de travail affectant par roulement des catégories de salariés, services, fonctions ou secteurs d'activité différents, constitue bien une grève licite ;
  • revendications d'ordre professionnel : la grève doit viser la satisfaction de revendications d'ordre professionnel, qui peuvent concerner les conditions de travail, la protection de l'emploi, la défense des droits collectifs, la rémunération, etc. Ainsi, le mouvement qui consiste à soutenir des revendications d'ordre politique n'est une grève que s'il s'accompagne de revendications professionnelles concernant l'ensemble des salariés. De même, la grève de solidarité soutenant des revendications professionnelles en faveur de salariés extérieurs à l'entreprise est illicite, sauf si les revendications concernent l'ensemble de la collectivité des salariés ;
  • revendications déjà exprimées : l'employeur doit avoir eu connaissance des revendications avant ou au moment de l'arrêt du travail. Elles peuvent être faites par tout moyen, et exiger l'envoi d'une lettre recommandée est illégal. Par ailleurs, la connaissance par l'employeur de ces revendications ne signifie pas que les grévistes aient à respecter un préavis.

Lorsque l'employeur n'est pas informé des revendications et qu'il n'est pas au courant des motifs de la cessation du travail, les salariés grévistes ne peuvent pas se prévaloir de la protection attachée au droit de grève.

Notez-le

Si toutes les conditions sont remplies, la grève est licite et les garanties prévues pour les salariés s'appliquent, notamment la suspension du contrat de travail et la suspension du pouvoir de licencier pour faute, sauf en cas de faute lourde.

Si elles ne sont pas remplies, le mouvement est illicite et chaque salarié participant sera donc en faute, puisque le contrat de travail ne sera pas suspendu.

Etape  4 -  Constituer une cellule de crise

Une cellule de crise est constituée de managers qui vont piloter l'ensemble des actions destinées à gérer correctement un conflit social, principalement : sécurisation des biens et des personnes, communication, négociation, organisation éventuelle de la réquisition. Il est important de la constituer en période calme pour être en mesure de l'activer en cas de nécessité. Vous prévoirez principalement : la liste des membres (direction, responsables techniques, juridiques, financiers, observateurs, etc.), les rôles respectifs, la périodicité des réunions.

Rédigez une liste téléphonique spécifique, qui facilitera la communication entre les principaux participants opérationnels. Mettez régulièrement à jour cet annuaire et rediffusez-le afin de prendre en compte les nouveaux arrivants.

De manière indicative, la liste peut comprendre les membres du comité de direction, appuis corporate (juridique, communication, relations sociales, ressources humaines, sécurité, etc.) ou externes (cabinet d'avocats, fédération professionnelle, d'assurance, experts-comptables, etc.), correspondants syndicaux/élus, huissier, DREETS, inspection du travail, autres autorités administratives (mairie, impôts, préfet, etc.), commissariat, principaux sous-traitants, pompiers, sociétés voisines, etc.

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Etape  5 -  Anticiper la modification des procédures de gestion et les procédés d'activité

Il faut :

  • s'interroger sur la capacité à reporter une partie de l'activité sur d'autres établissements lorsque l'entreprise en comporte plusieurs ;
  • modifier, le cas échéant, les procédés de gestion administrative du personnel pour prendre en compte la distinction grévistes/non-grévistes ;
  • prévoir un moyen d'assurer l'entrée et la sortie des non-grévistes ;
  • adapter les moyens de protection des données informatiques (sauvegardes de disques durs, cryptages, etc.) ;
  • anticiper les blocages du site (repérage des points sensibles ou fragiles d'un site donné).

Prévoyez une procédure permettant de mettre rapidement à l'abri les documents confidentiels (les documents fiscaux, les documents tarifaires, les listes des clients et fournisseurs, les documents concernant la rémunération du personnel, les délégations de pouvoirs, etc.).

Attention

Même en période de grève, l'employeur demeure en principe responsable de la sécurité dans l'entreprise.

Le cas échéant, il pourra choisir d'adapter les horaires, à condition de :

  • procéder à des aménagements progressifs ;
  • accomplir les formalités légales (information et consultation des représentants du personnel, information préalable de l'inspection du travail, information du personnel par affichage) ;
  • communiquer largement sur les raisons économiques justifiant ces aménagements de manière à ce qu'ils ne soient pas perçus par le personnel comme une mesure de rétorsion.

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Etape  6 -  Constituer des dossiers de suivi

Bien décider, c'est avant tout être bien informé. À ce titre, vous devez analyser la situation en relevant notamment :

  • la forme du conflit ;
  • le nombre de jours de grèves ;
  • le nombre de grévistes ;
  • la liste et l'évolution des revendications.

Rassemblez des preuves en vue d'un éventuel contentieux. Il peut s'agir :

  • de constats d'huissiers ;
  • de témoignages ;
  • de constats de gendarmerie lorsque des plaintes sont déposées ;
  • de comptes rendus/documents écrits (réunions de représentants du personnel, synthèses de l'encadrement, tracts, journaux internes, communications de la direction, etc.) ;
  • de documents/rapports techniques ;
  • etc.

Ce dossier permettra également de tirer les leçons du conflit.

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Evitez les erreurs

Le rôle des RP

Les sanctions possibles

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Textes officiels

  • C. trav., art. L. 3122-27 (récupération des heures perdues), L. 1242-6 (remplacement des grévistes par CDD), L. 1251-10 (remplacement des grévistes par intérim), L. 2511-1 (définition et régime de la grève)
  • C. pén., art. 224-1 (séquestration de personnes), 322-1 (destruction, dégradation ou détérioration de biens), 431-1 (entrave au travail)
  • Cass. soc., 8 février 2012, n° 10-14.083 (le refus du salarié gréviste de restituer son véhicule de service ne constitue pas une faute lourde)
  • Cass. soc., 9 mai 2012, n° 10-24.307 (la nullité du licenciement n'est pas limitée au cas où le salarié est licencié pour avoir participé à une grève mais s'étend à tout licenciement prononcé à raison d'un fait commis au cours de la grève et qui ne peut être qualifié de faute lourde)
  • Cass. soc., 9 mai 2012, n° 10-26.497 et n° 11-15.579 (le blocage d'un camion qui n'entrave pas la liberté du travail et ne désorganise pas l'entreprise ne constitue pas une faute lourde et conditions de la mise à pied conservatoire des grévistes)
  • Cass. soc., 8 octobre 2014, n° 13-18.873 (l'entrave à la liberté du travail justifie une mise à pied à titre conservatoire)
  • Cass. soc., 22 octobre 2014, n° 13-19.858 (modalités de présentation des revendications à l'employeur)
  • Cass. crim., 13 novembre 2014, n° 13-84.826 (la seule présence sur les lieux ne suffit pas à caractériser la participation directe et personnelle à une séquestration)
  • Cass. soc., 11 février 2015, n° 13-14.607 (les salariés ne sont pas tenus de cesser le travail pendant toute la durée du préavis de grève)
  • Cass. soc., 30 juin 2015, n° 14-11.077 (pas de protection des salariés grévistes qui n'ont pas exprimé leurs revendications à l'employeur)
  • Cass. soc., 14 octobre 2015, n° 14-10.145 (le fait que les salariés grévistes aient allumé un feu à l'extérieur de des locaux de l'entreprise ne suffit pas à justifier sa fermeture pour des raisons de sécurité)
  • CE, 4e et 1re ch. réunies, 27 mai 2021, n° 433078 (si un représentant du personnel entrave la liberté du travail d'autres salariés, cela peut justifier son licenciement)

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