Le travail de nuit - Droit du travail Transports routiers –p- Editions Tissot
Le travail de nuit
Droit du travail Transports routiersRéférence : WTR.02.1.090

Le travail de nuit

Dans le secteur des transports routiers, le recours au travail de nuit est encadré par les dispositions conventionnelles et réglementaires particulières. Ces règles divergent selon le secteur concerné (marchandises, voyageurs, transport de fonds, etc.) et selon la catégorie de personnel (sédentaire/roulant).

Comment définir le travail de nuit et la notion de travailleur de nuit ? Quelles sont les durées maximales à respecter ? Quelles contreparties octroyer aux salariés ?

Dans cette page

La bonne méthode

Etape  1 -  Savoir définir le travail de nuit

Pour les salariés sédentaires, est considéré comme du travail de nuit tout travail effectué entre 21 heures et 6 heures du matin.

Pour les salariés roulants, est considéré comme du travail de nuit tout travail effectué entre 22 heures et 5 heures du matin.

Pour le secteur du transport de fonds et de valeur, est considéré comme du travail de nuit tout travail effectué entre 22 heures et 7 heures du matin (accord du 10 juillet 2002 relatif au travail de nuit dans le transport de fonds).

Toutefois, une autre période de 7 heures consécutives comprise entre 21 heures et 7 heures, incluant l'intervalle entre 24 heures et 5 heures, peut être substituée à la période 22 heures/5 heures par une convention ou un accord collectif étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement. À défaut d'accord et lorsque les caractéristiques particulières de l'activité de l'entreprise le justifient, cette substitution peut être autorisée par l'inspecteur du travail, après consultation des délégués syndicaux et avis du comité social et économique.

Pour cela il faut :

  • être situé dans une zone touristique internationale : celles-ci seront délimitées par les ministres chargés du Travail, du Tourisme et du Commerce, compte tenu du rayonnement international de ces zones, de l'affluence exceptionnelle de touristes résidant hors de France et de l'importance de leurs achats ;
  • être couvert par un accord de branche, de groupe, d'entreprise ou d'établissement ou par un accord conclu à un niveau territorial prévoyant cette faculté : l'accord doit prévoir certaines garanties au profit des salariés.

En pratique, cette nouvelle disposition ne devrait guère concerner les entreprises de transports routiers, hormis certaines entreprises de transport de voyageurs implantées dans ces zones touristiques internationales.

Convention collective "Transports routiers" (n° de brochure 3085)

Etape  2 -  Savoir définir le travailleur de nuit

Il est important de bien distinguer travail de nuit et travailleur de nuit car ces 2 notions ne se recoupent pas.

Est considéré comme travailleur de nuit, tout salarié :

  • soit qui accomplit, au moins 2 fois par semaine, selon son horaire de travail habituel, au moins 3 heures de son temps de travail quotidien pendant la période de travail de nuit ;
  • soit qui accomplit tout ou partie de son activité de nuit au moins 270 heures sur toute période de 12 mois consécutifs.

Dans le secteur du transport de fonds et de valeur, la notion de travailleur de nuit s'apprécie différemment.

Est considéré comme travailleur de nuit, le salarié :

  • soit qui accomplit au moins 2 fois par semaine, selon son horaire de travail habituel, au moins 3 heures de son temps de travail quotidien durant la période 22 h – 7 h ;
  • soit qui accomplit au moins 50 heures de son temps de travail durant la période 22 h – 7 h sur une période de référence d'un mois.

Le passage d'un horaire de jour à un horaire de nuit (ou vice versa) constitue une modification du contrat de travail qui doit être acceptée par le salarié. Est illicite la clause du contrat de travail qui prévoit que le salarié peut passer d'un horaire de jour à un horaire de nuit (ou inversement) selon les besoins et les nécessités de l'entreprise ou du service.

Cette modification du contrat de travail est réputée fondée sur un motif économique. L'employeur doit alors respecter les formalités imposées par les textes :

  • information individuelle par lettre recommandée avec avis de réception ;
  • délai de réflexion d'un mois pour que le salarié fasse connaître son refus (en cas de procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, ce délai est réduit à 15 jours). S'il ne répond pas dans ce délai, il est réputé avoir accepté la modification.

À défaut de respecter ces conditions, l'employeur ne peut se prévaloir ni d'un refus ni d'une acceptation de la modification du contrat de travail par le salarié. Il ne pourra pas, par exemple, engager la procédure de licenciement économique.

Même dans l'hypothèse où cette procédure aurait été respectée, lorsque le salarié refuse la modification de son contrat, l'employeur, pour pouvoir procéder au licenciement, doit justifier de l'existence de difficultés économiques, de mutations technologiques ou de la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, et il doit respecter la procédure de licenciement pour motif économique.

Attention

Un salarié qui travaille le jour peut notamment refuser de passer à un travail de nuit lorsque ce changement est incompatible avec des obligations familiales impérieuses, notamment avec la garde d'un enfant ou la prise en charge d'une personne dépendante. Ce refus ne peut en aucun cas constituer une faute ou un motif de licenciement.

Le changement d'organisation du travail de nuit qui prévoit notamment la possibilité pour l'employeur de supprimer les majorations des heures de nuit constitue également une modification du contrat à laquelle le salarié doit consentir.

Il en est de même lorsque le salarié dont le contrat de travail prévoyait un horaire de jour a accepté de travailler partiellement de nuit, sans qu'aucun avenant soit signé, puis a refusé par la suite d'exécuter sa prestation de travail selon les prévisions de son contrat en horaire de jour.

Dans certains cas, l'organisation du travail mise en place dans l'entreprise peut impliquer, dans le cadre d'un travail « par roulement » des horaires diversifiés, de jour comme de nuit, et laisser à l'employeur la possibilité de permuter. Dans ce cas, la jurisprudence considère que, lorsque les horaires du salarié n'ont pas été contractualisés, le simple fait qu'il soit amené à effectuer plus d'heures de nuit ne constitue pas une modification du contrat de travail.

Convention collective "Transports routiers" (n° de brochure 3085)

Etape  3 -  Vérifier que les durées maximales de travail sont respectées

Les textes conventionnels, le Code du travail et le Code des transports fixent des durées maximales quotidiennes et hebdomadaires à respecter en cas de travail de nuit. Ces durées concernent les salariés qui répondent à la qualification de travailleur de nuit (voir étape 2) ou qui travaillent tout ou partie entre 0 h et 5 h.

Les dispositions légales suivantes s'appliquent :

  • la durée quotidienne de travail effectuée par un travailleur de nuit ne peut excéder 8 heures consécutives ;
  • cette durée de travail de nuit, calculée sur la base d'une période de 12 semaines consécutives, ne peut dépasser 40 heures par semaine ;
  • pendant le service de nuit, les salariés bénéficient de la pause légale de 20 minutes au bout de 6 heures ;
  • les travailleurs de nuit bénéficient d'un repos quotidien de 11 heures pris obligatoirement après la période travaillée.

Le tableau ci-après présente les dispositions conventionnelles spécifiques pour les différents secteurs du transport routier. Faute de dispositions particulières pour certaines catégories, ce sont les dispositions légales qui s'appliqueront.

 

Durée maximale quotidienne

Durée maximale hebdomadaire
(calculée sur une période de 12 semaines consécutives)

 

Personnel roulant

Personnel sédentaire

Personnel roulant

Personnel sédentaire

TRANSPORT ROUTIER DE MARCHANDISES LOGISTIQUE ET DÉMÉNAGEMENT

10 heures

Pouvant être portées à 12 heures une fois/semaine ou 2 fois/semaine dans la limite de 6 fois par période de 12 semaines si la durée hebdomadaire du travail est répartie sur 5 jours au moins.

8 heures

48 heures pour les personnels roulants « grands routiers » ou « longue distance »

46 heures pour les autres personnels roulants
(dispositions non étendues)
 

40 heures

 

Durée maximale quotidienne

Durée maximale hebdomadaire
(calculée sur une période de 12 semaines consécutives)

 

Personnel roulant

Personnel sédentaire

Personnel roulant

Personnel sédentaire

TRANSPORT ROUTIER DE PERSONNES

10 heures

Le temps de conduite entre 21 heures et 6 heures est limité à 4 heures.
 

8 heures

-

40 heures

 

Durée maximale quotidienne

Durée maximale hebdomadaire
(calculée sur une période de 12 semaines consécutives)

 

Personnel roulant

Personnel sédentaire

Personnel roulant

Personnel sédentaire

TRANSPORT DE FONDS ET DE VALEUR

Le convoyage de fonds et l'alimentation des distributeurs de billets sont interdits entre 22 heures et 5 heures du matin
 

-

8 heures

-

40 heures (pause de 20 minutes au bout de 6 heures pendant le service de nuit)

TRANSPORT SANITAIRE

Régime des services de permanence

Le salarié, à condition que cela ait été prévu dans son contrat de travail, est prêt à se tenir à disposition de l'employeur pendant certaines périodes de nuit (entre 18 heures et 10 heures), les samedis, dimanches et jours fériés (entre 6 heures et 22 heures).

L'amplitude de la permanence est limitée à 12 heures mais peut aller jusqu'à 15 heures en raison du caractère imprévisible de l'activité et afin d'être en mesure de répondre à certaines demandes de missions sanitaires comme d'accomplir la mission jusqu'à son terme (c'est-à-dire lorsque le patient se trouve dans le véhicule), et dans la limite de 1 fois par semaine en moyenne, excepté pour les activités saisonnières comme pour des rapatriements sanitaires pour les compagnies d'assurances ou d'assistance, situations dans lesquelles cette limite est portée à 75 fois par année civile.

Convention collective "Transports routiers" (n° de brochure 3085)

Etape  4 -  Attribuer les compensations au travail de nuit

Les textes conventionnels prévoient diverses contreparties au travail de nuit.

Notez-le

Pour les cadres, aucun texte conventionnel ne fixe les contreparties au travail de nuit, que ce soit en matière de rémunération ou en matière de repos.

 

Compensation pécuniaire

Compensation sous forme de repos

 

Personnel roulant

Personnel sédentaire

Personnel roulant

Personnel sédentaire

TRANSPORT ROUTIER DE MARCHANDISES
LOGISTIQUE ET DÉMÉNAGEMENT

Prime de 20 % du taux horaire conventionnel à l'embauche prévu pour le coefficient 150 M, quelle que soit la catégorie du salarié concerné.

Prise en compte dans l'assiette de calcul des majorations pour heures supplémentaires.

Peut être remplacée en tout ou partie par l'attribution d'un repos compensateur de remplacement par accord d'entreprise ou, dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, par accord avec le CSE s'il est mis en place.

Les salariés qui effectuent au cours d'un mois au moins 50 heures de travail de nuit ont droit, en plus de la prime de nuit de 20 %, à un repos compensateur égal à 5 % de la totalité des heures de travail de nuit.

Les conditions de prise du repos sont fixées par un accord d'entreprise ou dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, par accord avec le CSE s'il est mis en place.

L'accord d'entreprise peut remplacer ce repos par une indemnisation équivalente.

 

Compensation pécuniaire

Compensation sous forme de repos

 

Personnel roulant

Personnel sédentaire

Personnel roulant

Personnel sédentaire

TRANSPORT ROUTIER DE PERSONNES

Les heures de temps de travail effectif donnent lieu à contrepartie pécuniaire ou sous forme de repos lorsque la durée journalière continue de travail de nuit est supérieure à une heure, à raison de 20 % de leur durée, sauf dispositions plus favorables.

Aucune indemnisation prévue

Également possible

Aucune indemnisation prévue

 

Compensation pécuniaire

Compensation sous forme de repos

 

Personnel roulant

Personnel sédentaire

Personnel roulant

Personnel sédentaire

TRANSPORT DE FONDS ET DE VALEUR

Le convoyage de fonds et l'alimentation des distributeurs de billets sont interdits entre 22 heures et 5 heures du matin

Prime horaire qui est égale à 25 % du taux réel de base appliqué dans l'entreprise au salarié concerné.

Prime prise en compte pour le calcul des heures supplémentaires.
 

Repos compensateur égal à 1 % du temps de travail de nuit.

Si l'entreprise est dotée de délégués syndicaux, les conditions et modalités de prise de ce repos sont définies par accord d'entreprise ou d'établissement.

S'il n'y a pas de délégués syndicaux, les conditions et modalités de prise de ce repos sont définies par accord avec le CSE s'il est mis en place.
 

TRANSPORT SANITAIRE

Régime des services de permanence

Le salarié, à condition que cela ait été prévu dans son contrat de travail, est prêt à se tenir à disposition de l'employeur pendant certaines périodes de nuit (entre 18 heures et 10 heures), les samedis, dimanches et jours fériés (entre 6 heures et 22 heures).

L'amplitude de la permanence est limitée à 12 heures mais peut aller jusqu'à 15 heures en raison du caractère imprévisible de l'activité et afin d'être en mesure de répondre à certaines demandes de missions sanitaires comme d'accomplir la mission jusqu'à son terme (c'est-à-dire lorsque le patient se trouve dans le véhicule), et dans la limite de 1 fois par semaine en moyenne, excepté pour les activités saisonnières comme pour des rapatriements sanitaires pour les compagnies d'assurances ou d'assistance, situations dans lesquelles cette limite est portée à 75 fois par année civile.

Les ambulanciers affectés exclusivement à des services de nuit bénéficient d'un repos égal par heure de nuit à 15 %.


Pour les autres, chaque heure d'amplitude effectuée entre 22 heures et 5 heures ouvre droit à un repos égal par heure de nuit à 5 %.

Attention

La possibilité de remplacer, par un accord d'entreprise, la compensation en repos par une indemnisation ne vous permet pas de déroger aux dispositions légales relatives aux repos compensateurs obligatoires : celles-ci sont d'ordre public et visent à protéger la santé et la sécurité des salariés.

Les majorations pour travail de nuit doivent apparaître sur le bulletin de salaire. À défaut, l'employeur doit apporter la preuve qu'il les a payées et cela ne peut pas résulter du seul fait que le salaire effectif du salarié a été supérieur au salaire minimum conventionnel.

Convention collective "Transports routiers" (n° de brochure 3085)

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Textes officiels

  • C. trav., art. L. 3122-29 à L. 3122-42 (travail de nuit)
  • C. transports, art. L. 3312-1
  • Accord du 14 novembre 2001, portant sur le travail de nuit
  • Accord du 18 avril 2002, relatif à l'ARTT dans les entreprises de transport routier de voyageurs
  • Accord du 10 juillet 2002, relatif au travail de nuit dans le transport de fonds et valeurs
  • Loi « Macron » n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (art. 254)
  • Loi n° 2016-1088, du 8 août 2016, relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels
  • Cass. soc., 16 mai 2018, n° 16-20.691 (remplacement de la compensation en repos par une indemnisation : droit aux repos compensateurs obligatoires)
  • Cass. soc., 7 novembre 2018, n° 17- 20.418 (modification du contrat en cas de suppression des majorations de salaire des heures de nuit)
  • Cass. soc., 14 novembre 2018, n° 17-11.757 (illicéité de la clause du contrat qui prévoit que le salarié peut passer d'un horaire de jour à un horaire de nuit (ou inversement) selon les besoins et les nécessités de l'entreprise ou du service)
  • Cass. soc., 28 novembre 2018, n° 17-13.158 (salarié qui travaille sans avenant selon un horaire de nuit puis refuse de revenir à son horaire contractuel de jour : modification du contrat)
  • Cass. soc., 30 janvier 2019, n° 17-22.018 (un salarié licencié pour insuffisance professionnelle alors qui travaille la nuit sans que cela soit indispensable au fonctionnement de l'entreprise, a droit à des dommages et intérêts pour violation de l'interdiction du travail de nuit)
  • Cass. soc., 10 avril 2019, n° 17-28.218 (organisation du travail par roulement : pas de modification du contrat dès lors que les horaires du salarié n'ont pas été contractualisés)
  • Cass. crim., 7 janvier 2020, n° 18-83.074 (le recours au travail de nuit doit être justifié, même s'il est prévu par la convention collective)
  • Cass. soc., 25 novembre 2020, n° 19-14.247 (à défaut de mention des majorations pour travail de nuit sur le bulletin de salaire, l'employeur doit apporter la preuve qu'il les a payées et cela ne peut résulter du seul fait que le salaire effectif du salarié a été supérieur au salaire minimumconventionnel)
  • Cass. soc., 14 septembre 2022, n° 21-13.015 (modification du contrat de travail résultant d'un passage d'un horaire de nuit à un horaire de jour même en présence d'une clause contractuelle ou conventionnelle contraire)

Convention collective