Etape
1 -
Sanctionner par un éventuel licenciement un fait de vie privée commis sur le lieu de travail
Il est très important de vérifier si l'incident a eu lieu dans les locaux de l'entreprise : ateliers, bureaux ou locaux collectifs (cantine, par exemple), voire même dans les parties extérieures comme le parking. Ensuite, il faut vérifier si l'incident a eu lieu pendant ou en dehors du temps de travail de l'intéressé.
En effet, dès lors que les faits se sont produits sur le lieu de travail et même en dehors du temps de travail, ils peuvent donner lieu à une sanction disciplinaire : ces faits sont alors considérés comme ayant été commis par le salarié dans le cadre de son activité professionnelle.
Un salarié ayant laissé son chien dans sa voiture sur le parking de l'entreprise peut faire l'objet d'un licenciement pour faute grave si le chien s'échappe et agresse une salariée de l'entreprise. Il manque en effet à son obligation de ne pas mettre en danger d'autres salariés dans l'enceinte de l'entreprise.
La question de la possibilité de sanctionner va en revanche se poser dans les cas où les faits fautifs se sont produits hors du temps de travail et hors de l'entreprise.
Etape
2 -
Vérifier si les faits reprochés ne traduisent pas un non-respect des obligations professionnelles
Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail.
Votre salarié, même en dehors de son travail, conserve certaines obligations qui ne disparaissent pas dès qu'il a quitté l'entreprise. Tous vos salariés sont tenus notamment à une obligation de loyauté qui leur interdit, par exemple, de travailler pendant leur absence pour maladie ou pendant leurs heures de délégation.
A été déclaré irrégulier le licenciement pour faute grave d'une salariée, coupable d'un détournement de fonds commis au préjudice d'une association dont elle exerçait les fonctions de trésorière sur ses lieux de travail, au motif que, bien que l'association ait son siège social dans les locaux de l'employeur et présente des liens étroits avec celui-ci, les faits reprochés ne constituaient pas des manquements aux obligations professionnelles.
Si le contrat le prévoit, un de vos collaborateurs peut être tenu de respecter une clause lui interdisant de travailler en même temps pour une autre entreprise que la vôtre, même non directement concurrente.
Certains salariés sont également tenus à une obligation de probité dans le cadre de leur travail. Ainsi a été validé le licenciement pour faute grave d'un salarié d'une caisse d'allocations familiales ayant, en qualité d'allocataire d'une autre caisse, minoré ses déclarations de ressources afin de bénéficier de prestations.
Cas du retrait de permis de conduire
Si un salarié qui exerce des fonctions de chauffeur ou livreur dans votre entreprise se voit retirer son permis de conduire en raison de son état d'ébriété, constaté pendant le week-end, il n'est plus en mesure d'exercer son travail chez vous et vous pouvez donc le sanctionner, voire le licencier. Mais là encore, attention toutefois à ne pas recourir à un licenciement disciplinaire. En effet, les juges considèrent que le retrait du permis de conduire pour des faits de la vie privée ne peut entraîner qu'un licenciement non disciplinaire car il n'y a pas manquement du salarié à ses obligations professionnelles.
En revanche, si le retrait du permis est sans incidence sur son travail, vous ne pouvez pas le sanctionner.
Le licenciement peut néanmoins être disciplinaire dès lors que le salarié commet une faute. Tel est par exemple le cas d'un salarié qui conduit un véhicule de l'entreprise nécessitant un permis particulier alors que celui-ci n'est plus valide faute de renouvellement d'un certificat médical d'aptitude.
Il convient toutefois d'être prudent dans la mesure où, même en cas de retrait du permis de conduire empêchant le salarié de remplir ses obligations professionnelles, la faute grave n'est pas systématiquement retenue selon l'ancienneté du salarié ou encore l'absence de faits identiques antérieurs. Ainsi, par exemple, la faute grave ne peut pas être retenue dès lors que le salarié dont le permis a été retiré a stoppé le véhicule et a donc arrêté de conduire dès qu'il s'en est trouvé incapable et qu'il n'avait fait l'objet d'aucun fait similaire au cours des 11 précédentes années d'ancienneté dans l'entreprise.
Si vous avez vérifié cette question et que les faits reprochés sont d'une autre nature, il vous faut alors analyser leurs conséquences sur l'activité de votre entreprise.
Convention collective "Transports routiers"(n° de brochure 3085)Pas de dispositions particulières
Etape
3 -
Analyser les conséquences sur l'entreprise du comportement du salarié
Il est en effet indispensable de pouvoir établir si, oui ou non, les faits reprochés ont créé un préjudice à l'entreprise : trouble du bon déroulement du travail, mésentente entre les salariés, ambiance exécrable, remise en cause de l'autorité hiérarchique, démotivation au travail, arrêts de travail, etc.
Les faits reprochés peuvent également causer un préjudice vis-à-vis de l'extérieur : discrédit sur la réputation de l'entreprise, sur la qualité de son fonctionnement donc, éventuellement, de ses produits, atteinte à la réputation de ses dirigeants ou de ses cadres.
ExemplesUn salarié tenant sur son lieu de travail des propos racistes à l'égard d'un collègue, même après son service, a légitimement été sanctionné.
Le salarié qui profère des menaces sur le téléphone personnel d'une collaboratrice qu'il avait menacé de détruire de façon très professionnelle et de faire circuler des bruits sur elle, alors que le médecin du travail avait invité l'employeur à prendre des mesures de protection à son égard, peut légitimement être licencié.
Le salarié qui adopte un comportement insistant, évolutif puis violemment agressif par l'envoi d'un message pornographique, insultant, dégradant et très préjudiciable pour sa destinataire, caractérisant un harcèlement sexuel, peut être licencié pour faute grave.
En revanche, les violences conjugales ne sauraient constituer un motif de licenciement valable dès lors que l'employeur ne prouve pas l'existence d'un trouble objectif au sein de l'entreprise.
Dans le même esprit, les évènements survenus durant la nuit séparant 2 jours de séminaire professionnel relèvent de la vie privée des salariés et ne peuvent pas justifier un licenciement dès lors notamment que la qualité du travail accompli le lendemain n'a pas été affectée par l'absence ou la fatigue des salariés.
Pour analyser si le trouble entraîné par le comportement du salarié est vraiment objectif et grave, il faut prendre en compte à la fois les fonctions du salarié et la finalité de votre entreprise : plus le salarié aura une position élevée dans la hiérarchie, plus sa conduite devra être exempte de reproches.
Par ailleurs, si le lien entre la nature de la faute et l'activité de votre entreprise est fort, le préjudice entraîné sera plus évident.
Etape
4 -
Prendre éventuellement une sanction proportionnée
Lorsque vous aurez réuni tous les éléments, vous pourrez mettre en oeuvre une procédure disciplinaire et décider, éventuellement, du licenciement du salarié, le cas échéant pour faute grave.
Rappelons que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié au travail même pendant la période de préavis et qui, en conséquence, conduit au licenciement immédiat.
Si vous souhaitez recourir au licenciement pour faute, assurez-vous que le fait tiré de la vie privée :
- a eu lieu dans l'entreprise même : par exemple, un salarié ivre se rend dans l'entreprise, même en dehors de son temps de travail, pour y commettre des actes de violence ;
- ou a été effectué avec les moyens de l'entreprise : par exemple, un salarié réalise une escroquerie à l'extérieur de l'entreprise, mais en utilisant les services de l'entreprise.
Convention collective "Transports routiers"(n° de brochure 3085)Pas de dispositions particulières