Etape
1 -
Qui prend acte de la rupture ?
La prise d'acte ne peut être initiée que par le salarié dans le but d'imputer la rupture sur la responsabilité de l'employeur. Toutefois, la prise d'acte de la rupture du contrat de travail peut également être valablement présentée par l'avocat du salarié. Une fois la décision notifiée à l'employeur, le salarié doit saisir le conseil de prud'hommes.
Avant la prise d'acte, le salarié n'a pas à formuler une demande préalable à l'employeur ni à le mettre en demeure de régulariser la situation.
Attention
La prise d'acte de rupture doit être adressée directement à l'employeur. Elle ne peut pas être demandée devant la juridiction prud'homale.
Ce mode de rupture recouvre des réalités très diverses et révèle souvent une réaction du salarié à des manquements supposés ou réels de son employeur.
Convention collective "Transports routiers"(n° de brochure 3085)Pas de dispositions particulières
Etape
2 -
Les effets de la prise d'acte de rupture
La rupture produira les effets :
- soit d'un licenciement abusif, si les faits que le salarié invoque à l'égard de son employeur sont démontrés ;
- soit, dans le cas contraire, d'une démission.
Autrement dit, si les manquements reprochés à l'employeur sont établis, le salarié obtiendra gain de cause et recevra les indemnités de licenciement, de préavis et de congés payés, ainsi que des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Une décision a même admis le versement de dommages et intérêts supplémentaires lorsque la prise d'acte était intervenue dans des circonstances vexatoires pour le salarié. Le salarié pourra également obtenir des dommages et intérêts réparant la perte de chance de bénéficier des informations relatives à la portabilité de la prévoyance.
Dans le cas contraire, il sera considéré comme démissionnaire et perdra ses indemnités de rupture et son droit à l'assurance chômage.
Attention
Dans le cas d'une démission requalifiée en prise d'acte aux torts de l'employeur, l'indemnité de préavis est due même si ce dernier, sur demande du salarié, l'avait dispensé de l'exécution du préavis de démission. Une décision a posé le principe que la prise d'acte n'interdisait pas l'exécution d'un préavis, par exemple, lorsque :
- le salarié souhaite organiser son départ de l'entreprise ;
- l'employeur, pour éviter que le départ précipité du salarié ne perturbe trop le fonctionnement de l'entreprise, demande à ce dernier d'exécuter un préavis et que le salarié l'accepte. Le déroulement du préavis ne remet pas en cause la gravité des manquements reprochés à l'employeur.
Seuls les faits « suffisamment graves » peuvent justifier que la prise d'acte de rupture du contrat par le salarié soit imputable à l'employeur et assimilée à un licenciement sans cause réelle et sérieuse (voir l'onglet « Questions/réponses »).
Notez-le
Le bureau de jugement du conseil de prud'hommes est saisi directement, sans phase de conciliation. Il a un délai de 1 mois pour rendre un jugement.
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Etape
3 -
Le sort du contrat de travail et la délivrance des documents de fin de contrat
Le contrat de travail est définitivement rompu dès la prise d'acte de rupture par le salarié. Ce dernier ne peut se rétracter. La cessation du contrat de travail est donc immédiate et définitive : tout évènement postérieur est sans effet.
Exemple
Si le salarié prend acte de la rupture en raison d'un manquement de l'employeur à l'obligation de paiement du salaire, le fait que l'entreprise soit placée en liquidation judiciaire quelques jours après ne remet pas en cause la prise d'acte : le salarié ne peut pas se rétracter et accepter par la suite un contrat de sécurisation professionnelle dans le cadre d'un licenciement économique.
La prise d'acte met fin au contrat de travail au jour de la notification par le salarié de sa décision. Dès lors, il y a lieu de mettre en oeuvre la procédure habituelle concernant la sortie des effectifs :
- établissement de la dernière fiche de paie ;
- remise de l'état récapitulatif de l'épargne salariale ;
- établissement du solde de tout compte (avec indemnisation des congés payés non pris) ;
- établissement du certificat de travail ;
- mention de la sortie sur le registre du personnel ;
- établissement de l'attestation Pôle emploi par le biais de la DSN ;
- établissement du certificat de congés payés dans les entreprises relevant d'une caisse de CP.
Il convient de noter, concernant l'attestation Pôle emploi, que la mention concernant le motif de rupture du contrat doit bien être « prise d'acte de la rupture du contrat par le salarié » et non démission ou licenciement. Pour cela, cochez la case « autre motif » et indiquez les motifs du salarié.
Enfin, même si le salarié est à l'initiative de la rupture, il peut être utile de lui envoyer un courrier recommandé l'informant :
- de la levée de la clause de non-concurrence (si tel est votre souhait) ;
- d'une demande de rendez-vous pour la restitution du véhicule, des clefs, du badge, des outils, de l'ordinateur portable, du téléphone, etc. ;
- de la mise à disposition de son solde de tout compte ;
- le cas échéant, que vous contestez les griefs invoqués.
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Etape
4 -
La suite de la prise d'acte
Dans la quasi-totalité des cas, la prise d'acte constitue la première étape dans la logique contentieuse engagée par le salarié.
Elle sera suivie soit par un courrier, d'avocat ou non, visant à demander réparation des préjudices subis, soit directement par une convocation devant le conseil de prud'hommes.
Dès lors, il faut impérativement bannir l'attentisme et préparer votre défense.
En pratique, la lettre de prise d'acte sera motivée. Si tel n'était pas le cas, le juge peut quand même rechercher la réalité des griefs du salarié pour motiver sa décision.
Les griefs sont fondés
Il convient ici d'étudier deux hypothèses :
- la première est celle où l'employeur est de mauvaise foi et n'a pas souhaité tenir compte des demandes du salarié, exprimées pourtant à plusieurs reprises.
Dès lors, l'employeur essayera de démontrer que les demandes du salarié étaient irréalistes ou qu'il a été empêché d'y donner suite pour des raisons cohérentes, réelles et démontrables ; - la seconde est celle où les griefs invoqués par le salarié semblent fondés mais qu'il n'a jamais prévenu qu'il prendrait acte de la rupture de son contrat, la situation est plus délicate.
Il est de coutume dans cette situation que le salarié ait en fait préparé sa sortie et qu'il tente ainsi d'imputer à l'employeur une volonté qui est la sienne : quitter l'entreprise tout en touchant des indemnités.
Les moyens de se défendre sont ici plus nombreux car il faut s'attacher à démontrer la volonté claire du salarié de quitter l'entreprise et que la prise d'acte n'est qu'une façon pour lui de ne pas démissionner et de s'arroger, s'il gagne, des dommages et intérêts.
Ainsi, il faut rechercher les preuves d'un nouvel engagement, concomitant pour le salarié (la prise d'acte peut être utilisée pour démarrer plus vite dans un nouveau travail, sans devoir respecter le préavis lié à la démission et ne pas rater ainsi, un emploi prometteur).
De même, il faut rassembler des témoignages, pièces visant à démontrer que la véritable raison de la rupture est liée au souhait du salarié de partir et non au comportement, certes peut-être pas exemplaire, de l'employeur.
Les griefs ne sont pas fondés
Ici, comme cela vient d'être vu, il faut par tous moyens démontrer que le salarié a cherché par des griefs fantaisistes à ne pas assumer les conséquences d'une démission et de son souhait de quitter l'entreprise.
Notez-le
Dans ce cadre, le salarié peut être condamné à indemniser l'employeur pour le préavis non exécuté et, si l'action est abusive, à verser des dommages et intérêts. Cependant, l'inexécution du préavis par un salarié ayant à tort pris acte de la rupture de son contrat de travail n'est pas abusive en elle-même. Elle ne justifie pas à elle seule le versement de dommages et intérêts pour brusque rupture.
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